Pourquoi y a-t-il deux Corées ?

Avant de devenir l'une des dictatures les plus cruelles et terrifiantes du monde, la Corée du Nord était unifiée à la Corée du Sud. Ce pays jadis unique a connu de nombreux bouleversements au cours du IXe et XXe siècle le conduisant à une séparation qui semble aujourd’hui définitive.

Au cours du IXe et XXe siècle, la Corée qui autrefois ne formait qu'un seul et même pays, a connu de nombreux chambardements. Son histoire est indissociable de celle de la Chine, du Japon et de la Russie. Mais également des Etats-Unis comme nous le verrons plus tard.

Mais il faut tout d’abord remonter en 1863, à l’époque de la Dynastie Joseon (1392-1910) dont le dernier roi est Kojong. A cette période, la Corée est un pays renfermé sur lui-même, peu développée, pratiquant une politique isolationniste, n’intervenant donc jamais dans les affaires internationales. Sa seule relation avec l’extérieur est commerciale qu’elle entretient avec la Chine, à laquelle elle est soumise. Elle est littéralement son « vassale ».


Mais la Corée est aussi un lourd objet de convoitise pour le Japon. Grands conquérants de l'Asie, les Japonais voient un potentiel important dans la péninsule coréenne et souhaitent remplacer la Chine en tant que « protecteur ». Après plusieurs tentatives vaine pour faire « ami-ami » avec la Corée, le Japon, rusé, réalisera un coup de maitre en 1876, avec le traité de Gangwha.

Ce traité fait suite à l'incident de Gangwha qui implique des navires militaires japonais venus surveiller les côtes coréennes. Croyant à une attaque, les Coréens ouvrent le feu… et c’est l’incident diplomatique ! Mal leur en prie, en effet, car la Japonais, clamant être venus en paix, retournent ce geste contre eux et réclament des excuses. Pour les obtenir, le Japon envoie un négociateur en Corée, chaleureusement escorté par 6 navires de guerre. Et afin de mieux convaincre ces bornés de coréens, le pays du soleil levant exercera un blocus tout autour de la péninsule, poussant finalement le roi Kojong à signer ce traité.

Celui-ci dit que la Corée doit désormais ouvrir 3 de ses ports au Japon et décrète qu’elle est un état indépendant, et donc qu’elle ne doit plus se soumettre à la Chine. Si ce traité a plutôt l’air sympa sur le papier, ce n’est finalement qu’un premier pas du Japon pour acheminer sa dominance en Corée.

Une influence japonaise grandissante

L'influence japonaise s’affirme en 1894 quand une révolution paysanne éclate. Dépassée, la Corée demande de l’aide à la Chine qui dépêche ses soldats sur le territoire coréen. Aide qui n’enchante pas le Japon, qui décide de faire un peu zèle : des soldats japonais débarquent à leur tour à Incheon en dépit des protestation chinoises et coréennes. Si le problème de la révolte est réglée, un autre se pose : aucun des deux pays ne veut retirer ses troupes de la Corée, soucieux de l’influence qu’il peut exercer sur elle. Mais le Japon est déterminé : il a un pied en Corée et ne compte pas s’arrêter là. Las de n’arriver à aucun accord diplomatique, il finit par envoyer toute sa flotte ainsi que des troupes supplémentaire sur le territoire convoité.


Le 23 Juillet 1894, le Japon envahit Séoul et installe un nouveau régime pro-japonais, abrogeant au passage tous les traitements d’alliance avec la Chine. Une guerre sino-japonaise éclate mais ces derniers, en pleine révolution industriel, écrase littéralement la Chine, pays alors encore très agricole. Avril 1885, le traité de Shimonoseki est signé : la Chine renonce à sa suzeraineté sur la Corée. Le Japon confirme prépondérance.

L'écrasante domination japonaise

Mais c’est suite à un nouveau conflit armée en 1904, cette fois contre la Russie qui lorgnait elle aussi sur les côtes coréennes afin d’avoir un accès permanent au pacifique, que le Japon affirme sa domination définitive. La Russie étant affaiblie par la Révolution russe remettant en question le pouvoir des tsars, le Japon expédie la guerre et finit par imposer à la Corée un protectorat.

Le protectorat : il s’agit d’une forme de colonisation, impliquant le contrôle d’un Etat sur un autre, mais elle diffère en cela que les institutions existantes et la nationalité sont maintenues.

Si le gouvernement coréen abdique malgré lui, cet état n’est absolument pas accepté par la population. De la colère, mouvement de révolte nait conduisant à l’assassinat du représentant japonais en Corée. En représailles, le Japon annexe la Coréen en 1910. Cette dernière devient alors une nouvelle province japonaise avec un gouvernent militaire.

L'impérialisme japonais

Une Corée japonaise jusqu'à la fin de la Seconde Guerre Mondiale

Il y aura au moins un effet bénéfique avec la domination japonaise : le Corée va se moderniser. Si le pays du matin calme ne connaitra une véritable révolution industrielle que très tardivement dans les années 70, le Japon aménage grandement le territoire dès le début du XXème siècle. Des routes sont construites, des chemins de fers, des hôpitaux, des grands ports… Mais bien évidemment, il ne s’agit là en rien d’un acte parfaitement généreux du Japon mais bien pour asseoir leur autorité. Dans les écoles nouvellement construites, seule la langue japonaise est autorisée. Le Japon a un but bien précis : faire de la Corée, son « grenier ».

En effet, le Japon va piocher directement les matières premières produites en Corée pour leur propre pays. Ce pillage des ressources coréennes provoquera d'ailleurs la famine, qui traumatise encore les coréens aujourd’hui.

Mais les Japonais se servent aussi en ressources humaines : des milliers d’hommes sont déportés dans les usines japonaises pour y travailler presque gratuitement, et ce jusque pendant la Seconde guerre mondiale. Durant cette période, autant de femmes seront également volés pour servirent de « femmes de réconforts » aux soldats japonais. Cette épisode est toujours sujet de tensions entre les deux pays de nos jours.


La Corée ne sera finalement libérée qu'en 1945, après la reddition du Japon, alors engagé aux côtés des force de l'Axe, avec l’Allemagne nazi et L’Italie fasciste, par les armées russes et américaines. Ces derniers se divisent le pays en deux zones d’occupations, administrée respectivement par l’URSS au nord et les Etats-Unis au sud. La frontière est délimitée par le 38ème parallèle.

La guerre froide, déterminante de la partition de la Corée

Si le Japon est désormais écarté, condamné à perdre tous ces territoires gagnés par le passé, l'histoire pourtant se répètent. Ceux qui maintenant se disputent la Corée sont les Américains et le Soviétiques, anciens alliés devenus rivaux tandis que débute la Guerre froide.

Mais la Corée au milieu de tout ça ?

A l’origine, aucun des deux camps, et encore moins les coréens, n’avait l’intention de laisser le pays séparé en deux. En janvier 1946, une commission mixte et paritaire, réunissant donc Américains et Soviétiques, se tient afin de rendre son indépendance à la Corée. Malheureusement, à cause de la tension croissante entre les deux parties, ces travaux n’aboutissent pas et malgré une tentative de l’ONU de régler définitivement la question, celle-ci est de nouveau avortée par l’URSS qui refuse, méfiant vis à vis de l’organisation. Ce conflit silencieux scellera le sort de la Corée.

Dans chacune des parties, on encourage l’organisation d’élections libres. Au sud, c’est un certain Syngman Rhee qui est élu. La République de Corée est fondée, la capitale devient Séoul. Au Nord, c’est l’URSS qui organise ces élections qui seront donc fortement influencé par l’idéologie communiste. La République populaire démocratique de Corée voit le et c’est Kim Il Sung qui en prend la tête et qui conservera le pouvoir jusqu’à le transmettre à ses fils. Il est ainsi le grand-père de l’actuel chef de la Corée du Nord, Kim Jong Un.


Les deux parties souhaitent la réunification mais chacun entend représenter l'entièreté du pays avec sa propre idéologie et aucun ne veut céder. Les deux camps prennent les armes… Et 5 ans à peine après la Seconde Guerre Mondiale, la Guerre de Corée éclate.

Sais tu que ... 
Officiellement la guerre de Corée n'en a que le nom. Diplomatiquement la guerre ne fut jamais déclarée ni officialisée entre les belligérants. L'intervention de l'ONU en Corée fut nommée une « action policière
source : archive.radio canada

La Guerre de Corée ( 1950-1953)

Juin 1950, le Nord franchit le 38e parallèle et envahit le Sud. L'armée nord-coréenne, largement soutenue par les forces soviétique, est bien équipée, possède des armes lourdes… contre une armée sudiste quasi inexistante. Les troupes américaines se sont retirés entre fin 46 et juin 49. Dépourvu de char ou d’avion de combat, en grande infériorité numérique, les sud-coréens se font écraser et Séoul est prise seulement 3 jours après le début de l’attaque, le 28 juin 1950.

L’ONU condamne l’agression nord-coréenne et décide d’envoyer des troupes en Corée du Sud. Ce sont 16 pays qui acceptent ainsi de venir en aide aux sudistes. Parmi eux : les Etats-Unis et la France.

En Septembre 1950, les Nord-coréens occupent la quasi totalité de la Corée et ce qu'il reste de l’armée du sud est retranchée à Busan, dans le sud-est, en attente des renfort.

C’est alors que le général Douglas Macarthur décide de lancer une énorme contre offensive. Il parvient à réaliser une percée chez l’ennemi et le 15 septembre 1950, les marines arrivent à Icheon et prennent à revers les troupes nord coréennes. Séoul est regagnée le 2 octobre, et le Sud repousse les envahisseurs vers le nord, à l’aide des troupes des Nations Unies fraîchement débarquées. Ils franchissent le 38e parallèle et atteignent en un mois la frontière avec la Chine.


C’est un nouvel élément dans l’équation. La Chine, qui a connu une révolution communiste quelques mois plus tôt, se sent menacée et envoie ses troupes en renfort aux côtés de la Corée du Nord. C’est environ 180 000 hommes qui franchissent le Yalou, le fleuve qui sépare la Corée de la Chine. S’en suit alors retournements sur retournements : le 26 novembre 1950, c'est au tour des Nord-Coréens et de leurs alliés chinois de reprendre l’offensive. Incapable de faire face à ces brusques vagues d'assaut, éparpillés et mal équipés contre le froid, l’armée des Nations Unies est rejetée au delà du 38ème parallèle.

Séoul passera alors aux mains des nord-coréens en janvier 1951 avant d’être reprise en mars de la même année par les Américains, à la suite de plusieurs attaques acharnées. Juillet 1951, la frontière se stabilise… et restera la même jusqu’à nos jours. Si les dirigeants des deux camps se rencontrent, ils n’arrivent encore une fois à aucun accord.

Ce n’est qu’en juillet 1953 qu’un armistice est signé. Le conflit prend fin, pour autant, il ne s’agit pas d’un traité de paix.

Bilan : la Guerre de Corée aura duré 3 ans, causé entre 1 et 2 millions de morts selon les historiens… pour un résultat nul.

40 ans plus tard, la situation stagne

En effet, 40 ans plus tard, les grandes institutions mondiales se sont crées, transformées : la Chine s'est ouverte, l’URSS est tombée, l’Union Européen s’est construite… mais la situation en Corée reste la même.



La Corée du Sud a connu quelques changements au niveau politique, alternant entre régime totalitaire et tentatives de démocratisation. C’est seulement en 1998 qu’un président bénéficiant d’une véritable légitimité démocratique sera élu. 

Si son développement est tardif, il est néanmoins fulgurant et aujourd’hui, la Corée du Sud fait partie des 5 pays les plus riches et développé du monde.

Tout au contraire de la Corée du Nord qui a conservé son régime dynastique et dictatorial. Même si elle est isolée diplomatiquement parlant, il n’en reste pas moins aujourd’hui l’une des plus terrible dictature toujours en place. Fermée hermétiquement, personne ne sait vraiment ce qu’il s’y passe en dehors des communiqués officiels du gouvernent nord-coréen et de sa propagande. Le peuple doit vouer un culte à la personnalité des dirigeants Kim et la répression y est forte et cruelle.

La menace est longuement restée sous-jacente et silencieuse avec quelques rares provocations restées heureusement sans suite. En 2013, le Corée du Nord met fin aux différents traités de pacification avec la Corée du Sud et annonce être de nouveau en état de guerre. Entre temps, elle a développé ses armes nucléaires et les tirs de missiles, essais ou provocations, se multiplient.

Le climat se tend un peu plus depuis l’arrivée au pouvoir de Donald Trump, aux Etats-Unis. Le président républicain enchaine lui aussi les propos provoquant à l’encontre de Kim Jong-Un, l'actuel dirigeant de la Corée du Nord.


Aujourd’hui, la tension est de nouveau palpable entre les différents protagonistes et envisager une réunification de nos jours semblent définitivement impossible.

Article rédigé et mise en page par Axelle Cecchi Amiel