13 pépites architecturales
pour inscrire Rennes
dans la modernité

En 2030, la ligne d'horizon rennaise s’enrichira de nombreux bâtiments innovants, qui viendront compléter les immeubles iconiques du siècle précédent, (les Horizons, le Mabilay, la Barre Saint-Just, Les Champs-Libres ou Cap Mail…). Du Conservatoire au Panorama, en passant par le Mur habité et l’immeuble Chromosome, coup de projecteur sur ces nouvelles pépites au cœur du projet urbain.

Lors de la concertation, les Rennais n'ont pas manqué d’affirmer qu’il faut "pousser l’innovation architecturale". Valoriser le patrimoine d’hier ne doit pas empêcher de créer celui de demain. Les habitants interrogés dans la cadre de la concertation de Rennes 2030 affirment même vouloir "des tours, non pour densifier, mais pour donner du souffle à la ville". Ils souhaitent qu’elles soient monumentales, transparentes avec beaucoup de verre, végétalisées, innovantes, futuristes et surprenantes. Ils attendent la création de nouveaux emblèmes "pour renforcer l’image de la ville à l’extérieur". Quelque 71% des Rennais interrogés souhaitent davantage de bâtiments audacieux. Ce "manque d’audace, accentue l’image d’une ville étape, de passage, qui manque de punch", affirment-ils. Même discours du côté des acteurs de l’urbain consultés : "Rennes est une ville trop raisonnable". Ils affirment non sans humour que la ville est "un bon élève qui devrait s’encanailler", qu’il faut "redonner confiance aux concepteurs" et surtout leur "offrir un espace d’expression avec plus de marges de manœuvre".
Les 13 "pépites architecturales" présentées dans ce document montrent qu’ils ont été entendus. 

INSIDE

Mail François-Mitterrand / Centre

Au croisement du mail et du canal d'Ille-et-Rance, le programme Inside insère l’architecture historique d’une demeure en briques rouges du 19e siècle dans une résidence contemporaine haut de gamme.

Associé à des surfaces commerciales, l’ensemble immobilier dessiné par l’agence d’architecture Barré-Lambot héberge 30 logements dont une maison de ville.

Signe distinctif ?
Concilier patrimoine et modernité

L’audace selon… Philippe Barré. Architecte associé, agence Barré-Lambot, Nantes.

« En face, l’immeuble de Jean Nouvel… Derrière, les Horizons de Georges Maillols… Entre ces deux constructions emblématiques, il restait encore un peu de place pour dessiner la skyline du centre-ville.
Le cahier des charges de la Ville de Rennes imposait de garder cette ancienne maison de caractère du 19e siècle. Mais il autorisait à construire en hauteur.
Nous avons choisi d’affirmer au maximum cette verticalité avec une silhouette élancée de quatre niveaux, un volume contemporain comme suspendu, presque en équilibre sur une maison de patrimoine ». 
« Côté canal, la façade sera traitée en moucharabieh, un motif très utilisé dans l’architecture traditionnelle des pays arabes. Ce rideau protégera l’intimité des balcons. Mais sa structure sera composée de briques de ton clair pour faire écho aux briques rouge de la maison d’angle. Les deux façades auront le même gabarit. Ce jeu de déplacement et de rappel dans le choix des matériaux permet de marier deux époques, l’ancien et le moderne ».

« Un seul logement occupera chaque étage du bâtiment le plus élevé. On parle de beaux et de grands appartements, pourvus de longues terrasses habitées, protégées par des persiennes coulissantes.
Au dernier niveau, nous avons dessiné un logement d’exception avec un patio, un solarium et un couloir de nage extérieur de 15 m de long. Je ne crois pas qu’il en existe d’autres à Rennes ».

Le siège Espacil

rue Guy Ropartz / Maurepas-Gayeulles

Situé à l'angle de la nouvelle place du marché, à deux pas la future station Gayeulles de la ligne B du métro, le bâtiment conçu par Forma6 rassemble 6000 m2 de bureaux répartis sur trois niveaux.

Le siège du bailleur social Espacil est aussi un immeuble d’habitation de 110 logements locatifs et en accession à la propriété. Avec une brasserie au rez-de-chaussée.

Signe distinctif ?
Une tour de 17 étages.

L’audace selon… Catherine Daumas, Architecte associée, agence Forma 6, Nantes.

« Affirmer une mixité d’usages dans un même bâtiment n’est pas une pratique courante. Souvent, on juxtapose. Ici, on intègre. Les bureaux, les logements et les commerces font corps dans un ensemble cohérent. C’est déjà une première audace ».

« Cette tour de 17 étages émet un signal urbain fort. Elle sera la plus haute du secteur. Elle identifiera le quartier et l’attention portée à sa rénovation urbaine. Sauf que cette tour n’est pas posée au milieu de rien. Elle fait partie d’un tout. Elle sera voisine de deux bâtiments de taille complémentaire. Ce qui donnera un dégradé de hauteurs. De 18 niveaux à 9, puis 6, puis 3… Cette mixité de hauteurs fait la politesse au paysage urbain existant. Elle fait la couture avec les nouvelles maisons individuelles et les anciennes barres d’habitation collective. Une tour, ça s’écrit ».

« On imagine souvent la densité comme une source de nuisances, de conflits… Il faut donc l’aménager pour ménager des lieux de rencontres et de convivialité. D’où ces espaces intérieurs au cœur du projet. Avec un patio, un jardin, une terrasse… Qui seront des lieux de jeux, de détente, peut-être même de jardinage. En tout cas, une respiration indispensable du bâti pour ses salariés et ses habitants ».

Le centre commercial Maurepas-Gayeulles

place Lucie et Raymond Aubrac / Maurepas


Voué à la démolition, l'ancien centre commercial du Gast cède sa place à une opération à vocation commerciale et résidentielle.

Le projet dessiné par l’agence Studio 02 réunit une grande surface alimentaire, sept boutiques, 135 places de stationnement et 86 logements.

C’est la clé de voûte de la nouvelle place du marché de Maurepas-Gayeulles.

Signe distinctif ? 
Un supermarché en pied d’immeuble,
une rue plantée en hauteur

L’audace selon… Thomas Collet. Architecte associé, studio 02, Vannes

« L’originalité du projet tient déjà dans sa programmation. Dans cette superposition de couches de commerces, de parkings, de jardins et de logements. Sur le plan technique et réglementaire (sécurité, incendie…) , c’est très compliqué à concilier. Une vraie gymnastique qui impose de beaucoup dialoguer avec les services techniques et les pompiers ».
« Les logements sont bâtis sur un socle de deux niveaux dédiés aux commerces et aux voitures. La vie résidentielle démarre sur le toit où nous avons recrée une rue centrale qui traverse l’îlot. Un fragment de ville avec ses placettes, ses jardins, son potager partagé, ses petits cabanons, ses tables de pique-nique… On y trouvera un local commun de 200 m², à la disposition des habitants pour organiser des repas de famille ou des cours de cuisine. Créer des logements individuels empilés les uns sur les autres, c’est une chose. Mais il faut aussi penser les usages collectifs pour susciter le désir d’habiter, faire naître une atmosphère propre au lieu qui nourrisse le sentiment d’identité, d’appartenance.
« La façade commerciale mettra un point final au réaménagement de la place du marché. Elle doit lui redonner un cadre, de la force, de l’élégance, du mouvement… Son enveloppe bois lui confèrera un aspect sophistiqué mais chaleureux. Depuis la place et les rues adjacentes, les piétons auront une vue directe sur les rayons du supermarché. Les "boîtes à chaussures", c’est fini. L’activité commerciale doit être ouverte sur l’extérieur pour donner envie, créer de la vie.
« Nous avions conscience de l’ambition de la Ville de Rennes, celle de redonner du souffle à Maurepas. Nous sommes très fiers de participer à cette aventure, de donner à voir une autre image d’un quartier qui a plein d’atouts à valoriser. Nous avons fait nos études à Rennes. Nous y sommes attachés ».

Habiter Plaisance

Zac Plaisance

Lové dans une boucle du canal d'Ille-et-Rance, le quartier Plaisance assemble 200 logements en petits collectifs avec de nouveaux espaces publics au bord de l’eau.

Signe distinctif ?
Uune guinguette sur les berges.

L’audace selon… Claire Schorter. Architecte-urbaniste, Vitry-sur-Seine

« L’audace, ce n’est pas forcément le geste architectural ou la prouesse technique. Faire simple et humble pour respecter un site d’une grande beauté, c’est aussi courageux. Et parfois même plus compliqué. L’architecture doit se lire. Elle peut aussi s’effacer. Dans cette boucle du canal, nous avons choisi de travailler plutôt une ambiance, un mode de vie dans l’esprit d’une "cité-jardin". Comme une pièce urbaine et paysagère qui ferait sens avec son environnement ».
« Nous avons dessiné une vingtaine de bâtiment, déclinés à partir de cinq familles-type. Comme cinq briques de Lego que l’on combinerait ensemble pour créer des formes variées. Des bâtiments tous pareils mais tous différents… Le quartier sera cet assemblage de petits volumes, de ruelles piétonnes et de jardins imbriqués. Des volumes pas trop hauts pour rester à l’échelle des arbres du cimetière et des haies bocagères.».
« Le quartier sera connecté à un mini-réseau de chaleur, alimenté par géothermie. Le système couvrira 50 % de ses besoins en énergie renouvelable. Les toitures photovoltaïques (290 m²) absorberont 25 % des consommations d’électricité des parties communes ».
« Nous n’imaginions pas réaliser une opération privée de logements dans un site aussi beau, aussi bien orienté, sans créer des espaces publics qui permettent au plus grand nombre d’en profiter. La rue de Plaisance se prolongera donc en "rue des terrasses" au bord du canal. Avec un petit bâtiment que nous aimerions voir occupé par un café musical, une guinguette pour animer les lieux ».
« On aime tous transformer son logement. Le faire évoluer au fil du temps, pousser les murs si besoin. Un jardin d’hiver plutôt qu’une terrasse… Une chambre d’ami à la place du palier… Un cellier sur le balcon. Techniquement, ce sera possible. Pour que chacun se sente chez soi, que la ville reste joyeuse…

ESMA Ecole de l'image

Baud Chardonnet

Face à un grand parc naturel en bord de Vilaine, l'École supérieure des métiers artistiques (ESMA) forme ses élèves à l’image numérique, à l’animation et à la production de jeux vidéo.

Le projet (7 580 m²) intègre l’établissement d’enseignement supérieur à une résidence étudiante de 219 logements.

Signe distinctif ? 
Un terrain de sport sur le toit.

L’audace selon… Philippe Dubus. Architecte, Paris

« Le projet croise deux approches de l’architecture. L’une rationnelle au service d’un outil pédagogique de qualité. L’autre plus sensible pour révéler l’environnement exceptionnel du site. L’écriture du bâtiment est volontairement sobre. Simple, épurée. À quoi bon lutter contre un paysage naturel aussi fort ? Autant s’effacer pour le mettre en valeur ».
Tout notre travail consiste à ménager une échappée vers le paysage, des espaces de respiration. D’où le grand bandeau vitré du hall d’entrée surdimensionné et les larges fenêtres des studios pour voir le parc, la Vilaine et la silhouette de la ville au loin ».
« Entre les deux immeubles de logement, trois terrasses s’étagent en gradins. La première est rattachée à la cafétéria et aux salles d’arts plastiques. La seconde, entièrement végétalisée, coiffe le parking. La troisième sera occupée par un terrain multisports. Les étudiants joueront au foot, au volley ou au basket sur le toit de l’école. Avec un superbe décor en arrière-plan ».
« Sur la proue du bâtiment, nous avons réservé trois studios à chaque étage, réunis par une pièce commune pour former un appartement en colocation. Soit trente chambres au total sur dix niveaux. C’est un type d’habitat que ne proposent pas les résidences étudiantes traditionnelles ou les cités universitaires ».
« Le grand hall sera connecté à une salle de cinéma et à un studio de tournage. Ce sont deux outils clé de l’école. Ils accueilleront les travaux, les expositions et les projections des étudiants.
Mais on peut imaginer que ces locaux puissent servir à d’autres partenaires pour devenir - potentiellement - un équipement culturel de proximité quand l’école est fermée ».

Babia Gora
 (nom provisoire)

avenue du Pologne / le Blosne

Entre les stations de métro Blosne et Poterie, les immeubles sœurs Babia Gora rhabillent de blanc, de vert et de terrasses un quartier populaire en pleine mutation.

Calibré pour accueillir 46 logements du T2 au T5, l'ensemble immobilier héberge en rez-de-chaussée 670 m² de locaux de services, réservés à des professionnels du secteur médical (médecins, kinésithérapeutes, laboratoire d’analyses et centre de radiologie).

Signe distinctif ? 
Un pôle médical en pied d’immeuble

L’audace selon… Nicolas Thébault. Architecte associé, Anthracite architecture, Rennes

« Nous n’avons pas voulu faire avant tout un projet audacieux. Ses habitants le diront… Notre idée était d’abord de proposer une nouvelle manière d’habiter, en accord avec l’esprit du site actuel. Pour l’instant, la parcelle est occupée par un petit parc, traversé par des sentiers, fréquenté par les enfants qui jouent au ballon. C’est le jardin de la tour. Avec Babia Gora, le végétal se retrouvera sur toute la hauteur des constructions, sous différentes formes qui "animeront" la façade.

Tous les logements disposeront d’une surface extérieure de 5 à 15 m². Certains en feront une terrasse végétalisée. D’autres la transformeront en pièce supplémentaire - type loggia d’hiver. Ceux qui veulent en faire un vrai jardin - avec trente centimètres de terre au sol - le pourront aussi ».
« La structure générale du bâtiment est assez simple. Sans trop de murs porteurs, elle l’autorise à évoluer à dans le temps, en fonction des besoins. Mais les acquéreurs auront la possibilité dès la commercialisation d’assembler deux T2 en T4. La modularité n’est pas une audace. C’est du bon sens.
« Le blanc ? La couleur fait écho aux tonalités plutôt claires des bâtiments voisins. La silhouette générale du projet est déjà assez singulière. Nous ne souhaitions pas jouer davantage sur l’effet de contraste. Le blanc permet aussi de faire ressortir davantage le végétal en façade ».
« Un potager sera aménagé sur le toit de l’un des deux immeubles. L’idéal serait qu’une association de quartier s’en empare pour faire vivre le lieu. Ce jardin partagé serait un lieu de rencontre avec une vue sympa. On pourrait y organiser la fête d’anniversaire d’un de ses enfants, par exemple. Il y a cinquante ans, on n’occupait pas un toit. Cet espace perdu était réservé aux réseaux techniques (chauffage, ascenseur…). Aujourd’hui, on libère les toits en habillant les gaines, en réduisant le nombre de sorties… Ce qui autorise de nouveaux usages ».

Le Conservatoire

Place de Zagreb / le Blosne


Sur la place du marché, le Conservatoire de Rennes délocalise la moitié de ses activités artistiques dans un écrin d'architecture à la silhouette bienveillante, au pied du métro.

Le bâtiment de 4 500 m² dessiné par l’agence Tetrarc comprend un hall, un café ouvert sur l’espace public, un auditorium de 300 places, des bureaux ainsi que de nombreuses salles d’enseignement et de pratique de la musique, de la danse et du théâtre.

Signe distinctif ? 
Une toiture photovoltaïque
sur un bâtiment à énergie positive.

L’audace selon… Olivier Perrocheau. Architecte associé, Tetrarc, Nantes

« Le conservatoire est un gros bloc sculpté auquel nous avons retiré des sphères et des cylindres pour créer un bâtiment aux lignes courbes et accueillantes. La façade principale en creux est une invitation à entrer pour voir ce qui s’y passe. 
Les deux premiers niveaux sont transparents. Ce sont les espaces de l’ouverture et du partage : le hall, le café, l’auditorium…. Les niveaux supérieurs sont davantage repliés sur eux-mêmes. Ce sont les espaces de travail, réservés aux élèves et aux enseignants ».

« La courbe est une ligne douce et dynamique. C’est une forme élégante, fluide qui sied bien aux arts, aux mouvements de la danse et aux ondes de la musique.
Les Philharmonies de Berlin et de Hambourg reprennent ce motif. Ces deux bâtiments modèles nous ont inspirés ».

« Le jardin intérieur circulaire est bordé par une galerie vitrée. Il n’est pas là simplement pour faire joli ou mettre une touche de vert. Nous l’avons pensé comme un jardin d’agrément, de rencontre mais aussi un lieu pour danser si on le souhaite ».

« Le toit est une cinquième façade. Qui ne sera pas visible de la rue, bien sûr. Mais tous les habitants des immeubles voisins l’auront en perspective. Ils verront les arbres pousser dans le patio central.

Environ 700 m² de panneaux photovoltaïques seront disposés sur les pentes du toit. Grâce à eux, le bâtiment produira plus d’énergie qu’il n’en consomme. C’est ce qu’on appelle une construction à énergie positive (BPOS) ».

« Implanter dans un quartier populaire un équipement culturel considéré parfois comme élitiste n’est pas une audace. C’est un enjeu. L’accès de tous à la culture est un sujet auquel sous sommes sensibles. Nous sommes heureux d’y apporter notre contribution. Un équipement ne fait pas tout, c’est vrai. Mais ce bâtiment sera tout sauf une forteresse étanche.».

Le Panorama

Rue de Nantes / Madeleine


Un œil sur la voie de chemin de fer, le Panorama constitue le projet totem de la ZAC Madeleine, au pied du pont de Nantes. Imaginé par le cabinet Hondelatte-Laporte, l'ensemble bâti assemble deux immeubles d’habitation de 91 logements libres et sociaux, adossés à un parking automobile en silo de 125 places. Des artisans occuperont huit ateliers en façade.

Signe distinctif ? Deux tours circulaires de 11 étages identiques, sociales, libres.

L’audace selon… Mathieu Laporte. Architecte, Paris

« La forme circulaire permet d’offrir aux occupants de l’immeuble une vue très large sur la ville. Un beau panorama sur un espace très ouvert. D’où son nom…Dans un bâtiment cylindrique, toutes les façades ont la même valeur. La perception des riverains restera la même sous tous les angles, à tous les coins de rue.

La forme circulaire est aussi plus compacte. On gagne de l’espace. Ce qui nous a permis d’espacer les deux constructions de 20 m supplémentaires pour limiter les problèmes d’ombres portées.

En réalité, ce sont ses grands balcons courbes qui dessinent la silhouette circulaire de l’immeuble. Sa structure intérieure est… un hexagone. C’est plus pratique pour meubler ! ».
« Le parking silo sera couvert d’une maille métallique sur laquelle grimpera la végétation. Des arbustes et des arbres seront plantés sur la toiture. J’imagine qu’il ressemblera à terme à un gros buisson. Cet écran phonique sera aussi un filtre paysager. L’immeuble sera chauffé par une pompe à chaleur géothermique à absorption gaz pour récupérer gratuitement l’énergie du sous-sol à plus de 100 m de profondeur. Pour la maçonnerie, on nous impose souvent de construire en béton ou en parpaings. Je préfère les structures poteaux-poutres - comme ici. C’est plus léger et plus évolutif ».

« De l’extérieur, rien ne distinguera l’immeuble d’habitat social de son voisin. Les finitions des façades seront identiques. Les balcons auront la même taille : 18m² pour un T2, 36 m² pour un T3... Offrir des logements de qualité à toutes les familles, indépendamment de leurs moyens, est un combat. Je me suis battu ».

Ascension paysagère

Rue de Lorient / Centre

Là où Rennes sortit de l'eau, au temps de Condate, l’Ascension paysagère met en valeur l’ancien îlot de l’Octroi en ouvrant la ville vers ses rives.

Constitué de 135 logements libres et sociaux, le projet s’enroule autour d’une nouvelle place encadrée par un équipement culturel agrandi - le Bacchus - et des commerces de bouche.

Signe distinctif ? 
Des terrasses plantées à tous les étages.

L’audace selon… Bertrand Schippan. Architecte, directeur France MRDV, Rotterdam

« Il y a une raison derrière ce nom - Ascension paysagère. Nous avons imaginé des logements en gradins qui reprennent la qualité du site, très ouvert sur l’eau et la nature. D’où ces appartements avec de grandes terrasses qui donneront l’impression d’habiter sur un toit. Avec rien au-dessus de la tête, rien à l’horizon.Tous les logements avec vue sur la Vilaine auront une terrasse. Ces espaces seront livrés plantées d’essences locales avec un système d’arrosage automatique.
Le règlement de copropriété engagera les habitants à ne pas les dénaturer. Un jardinier assurera la maintenance. C’est la condition pour voir la végétation grimper à la verticale. L’ascension paysagère… Avec un jardin et un verger en bonus ».

« Nous avons fait attention à gommer les niveaux en travaillant les façades avec des dégradés de couleur, de matière et de lumière. Plus on montera, plus la façade sera claire, brillante et lumineuse. L’idée est de créer la vision d’un nuage de lumière qui semble flotter dans la nuit rennaise. En journée, le bâti se diluera dans le ciel. »

« Vous avez remarqué la courbure des immeubles ? Nous avons arrondi les angles pour rendre l’ensemble accueillant, ne pas gêner les voisins avec les ombres portées et inviter les piétons à passer vers la place. »

Le Mur habité

Rue Gisèle Freund / Zac Bernard - Duval

En lisière des rails, le Mur habité protège le quartier des nuisances sonores du trafic ferroviaire.

Long de 112 m, l'écran acoustique incorpore dans son ossature bois huit alcôves de 20 m², promises à des artisans et créateurs. Coiffés d’une coursive piétonne, les ateliers animent le parvis des Ateliers du vent.

Signe distinctif ? 
Des artistes au creux des murs

L’audace selon… Nicolas Lebunetel. Architecte-urbaniste, Montpellier

« Au départ, la commande était de réaliser un mur antibruit. Tout simplement. Mais planter une paroi en béton dans le sol n’apporte pas grand-chose à la ville, aux espaces publics, aux habitants… Il fallait donner un peu d’épaisseur à la question en créant du contenu urbain et social, adapté au contexte de ce pôle culturel en émergence.

Un mur ferme, voire enferme. Ici, il ouvre. Ce mur était une contrainte réglementaire et acoustique. Nous transformons un ouvrage technique en lieu de vie, d’activité et de rencontres.».

« Ce mur, nous l’avons imaginé comme le fond de scène d’un théâtre à l’italienne du 17e siècle. Sur la promenade piétonne, à 6 m de hauteur minimum, le public pourra suivre les concerts et les spectacles donnés dans la cour principale. Le Mur habité doit affirmer l’identité culturelle du site Avec ses huit cellules réservées à des artisans, des artistes et des créateurs, on s’inscrit bien dans l’esprit des Ateliers du vent.».

« Entre les alcôves seront percées des fenêtres paysagères de très grande taille. À travers le verre, vous apercevrez les immeubles de la Courrouze, les voies, les trains… En plus de la lumière, cette transparence apporte un confort psychologique. Un bruit est mieux accepté quand on en connaît la source. Encore plus quand on la visualise. 
Du végétal grimpera en façade. Il débordera sur la promenade. Amener un peu de vert dans un secteur encore très minéral nous semblait essentiel ».

« Dans un second temps, on prolongera la promenade en hauteur jusqu’aux bords de la Vilaine, en longeant les Magasins généraux. Histoire de bien connecter à son environnement un quartier encore un peu coincé par le train ».

Identity³

Rue de l'Alma / EuroRennes


Au-dessus du parking gare Sud étendu, Identity³ domine les voies ferrées et le nouveau quartier EuroRennes. Principalement dédié aux activités tertiaires, l’ensemble immobilier de 24 000 m² regroupe trois immeubles de bureaux de six à huit étages ainsi que des commerces en rez-de-chaussée et un cinéma de cinq salles.

Signe distinctif ? 
Un cinéma d’art et essai de 734 fauteuils - l’Arvor - à la descente du train.

L’audace selon… Jean-Paul Viguier. Architecte associé, Architecture et urbanisme, Paris

« Il y a quelques années, accueillir un immeuble de bureaux en ville n’était pas une bonne nouvelle. Parce que c’est éteint le soir, fermé le week-end et désert pendant les vacances. Pour rendre le tertiaire sympathique, la solution est d’y faire pénétrer la ville. De faire rentrer d’autres fonctions dans les bureaux. D’où l’idée d’ajouter un lieu culturel, des boutiques, un café… On crée de l’animation sur l’espace public. On suscite le désir d’aller voir ce qui se passe derrière le halo rouge du cinéma ».

« Identity ³, ce sont trois bâtiments distincts, dessinés par trois architectes différents. Chaque immeuble possède donc sa propre personnalité. Mais les trois volumes ont été pensés ensemble pour exprimer un geste commun. C’est la diversité dans l’unité ».

« Les trois immeubles sont habillés d’une résille métallique. C’est leur trait commun. Ce rideau protège leurs occupants de la chaleur et de la lumière directe. Elle permet d’offrir aux bureaux de grandes surfaces vitrées. C’est confortable pour travailler.

Mais chaque architecte a traité cette vêture à sa manière. Plus ou moins verticale, plus ou moins décoratif, avec un entrelacs de courbes, en métal déployé… Le rendu sera différent ».

« Quand on voyage à 320 km/h, on garde longtemps en tête le moment où le train entre en gare. Quelle image les voyageurs garderont-t-ils de leur arrivée à Rennes ? Je voulais que ce soit celui d’une ville créative. Une ville "dans le coup". Identity³ exprime cette intention. Chacun y verra ce qu’il veut dans ces volumes à facettes. Pour moi… des rochers taillés comme des pierres de gypse… »


Chromosome

Avenue André Malraux / Beauregard


Au sommet du parc de Beauregard, le Chromosome rassemble 130 logements libres répartis dans quatre immeubles dont une tour repère de 19 étages, perchée sur un pôle de santé.

Signe distinctif ? 
Une conciergerie numérique dans le hall

L'audace selon… François Lannou. Architecte associé, agence In Situ AE, Nantes.

« Faire un bâtiment collectif, ça veut dire quoi ? Se garer les uns à côté des autres ? Prendre le même ascenseur ? C’est un peu court comme réponse… Pour bien "voisiner", il faut se donner d’autres moyens. D’où ce grand hall vitré de 200 m² en rez-de-chaussée avec 6 m de hauteur sous plafond. Ce lieu très visible abritera des services mutualisés, un garage de vélos en libre-service, une conciergerie numérique pour recevoir ses colis et une salle commune pour organiser des événements.
À chaque étage, un grand palier très lumineux desservira quatre logements. Nous l’avons pensé comme un lieu de convivialité en devenir. Où l’on pourra mettre des tables et des chaises pour se rencontrer ».

« Vu l’emplacement sur un point haut de la ville, nous avons fait le choix de larges ouvertures pour profiter de l’ensoleillement, des vues sur le parc et la campagne. L’originalité, ce sont ces loggias entièrement vitrées, intégrées au volume. Soit 12m² en plus pour chaque appartement. Presque une pièce supplémentaire, accessible toute l’année, à l’abri de la pluie et du vent. Et que l’on pourra transformer au gré des besoins. En chambre d’appoint, en bureau… Un logement de qualité, c’est un logement flexible qui s’adapte à l’évolution des modes de vie ».

« La tour sera recouverte d’un bardage métallique pour drainer l’eau sans abîmer la façade. Pour la faire durer. Ce qui est durable, ce sera aussi le système de collecte des eaux grises (cuisine, douche, lave-vaisselle…). Les calories récupérées par le système d’échangeur thermique couvrirpnt jusqu’à 20 % des besoins d’eau chaude des logements ».


L'îlot Saint-Michel

Place Saint-Michel / Centre

En plein cœur de ville, l'îlot Saint-Michel renaît de ses cendres après l’incendie de 2010. Seize logements et un commerce en rez-de-chaussée composent l’immeuble d’habitation remonté par l’agence Explorations architecture, à cheval sur la place et la rue de la Soif.

Signe distinctif ? En ossature bois comme au Moyen-Âge

L’audace selon… Yves Pagès. Architecte associé, Explorations architecture, Paris

« Le défi est de reconstruire un immeuble d’architecture contemporaine avec des logements de qualité dans un tissu urbain resserré, en respectant le bâti traditionnelLe projet peut sembler modeste. Mais il est très complexe en raison des contraintes liées à l’histoire, aux divers règlements de protection et aux volumes du bâti d’origine. Les corps de bâtiment sont si imbriqués que nous l’appelons le Tetris à l’agence… ».

« L’architecte des Bâtiments de France avait une exigence essentielle. Celle de reconstruire l’immeuble en ossature sèche selon la tradition architecturale du Moyen Âge. Béton interdit ! Nous avons choisi le bois pour incarner le lieu. 
Nous avons beaucoup travaillé les gabarits. Comme au Moyen-Âge, l'architecture donne l’impression d’une juxtaposition de plusieurs immeubles. En réalité, il s’agit d’un seul et même bâtiment. Mais il était important de rester à l’échelle de la ville médiévale.
Nous n’avons pas repris le motif en croix du colombage. Nous lui avons préféré un graphisme plus contemporain. Comme une évocation lointaine. Mais la façade bois doit rappeler que la structure est elle-même en bois. 
L’accès aux logements se fait désormais par une cour intérieure, un ascenseur et des coursives. En bois comme avant ».

« Les grandes ouvertures apportent aux logements un confort nouveau et de la lumière. Dans ce lieu très passant, un système de stores ménage l’intimité de ses occupants, en particulier la nuit. Pour ne pas avoir la sensation d’être dans un aquarium, sous le regard des terrasses ».
Nous avons accepté le défi parce que le site est unique. Presque un symbole en centre-ville. Nous y passons plus de temps que prévu. Le coût de construction est élevé. Mais tout le monde a mis énormément d’énergie pour tourner la page ».

Interviews : Olivier Brovelli