La gare de Rennes, de la vapeur à la grande vitesse

160 ans d'histoire

Le 26 avril 1857, Rennes fêtait l'arrivée du chemin de fer. Une révolution, à l’époque, qui permettait de relier la capitale en… dix heures, et le début du développement de la ville au sud de la Vilaine. Cent soixante-ans plus tard, le 2 juillet 2017, à 10h24, le premier train LGV, assurant la liaison Rennes-Paris en moins de 1h30, entrait en gare.

La construction
de la première gare

Archives de Rennes. 100 Fi 13 : Vue du bâtiment de la gare et d'une partie de la cour des voyageurs (angle sud-est) avec deux fiacres au second plan, XIXème - début XXème siècle.


La gare aurait pu se trouver au nord
de la Vilaine

Si l'idée de construite une gare à Rennes fut lancée en  1846, huit ans s'écoulèrent avant le choix final de son implantation. Huit ans d'hésitations, d'argumentations et... de vifs débat.

Dès 1849, le choix de l'implantation de la gare de Rennes, dont on ne sait pas encore si elle sera gare d’étape, terminus…, suscite bien des discussions. Pour les élus et les notables, ce ne peut être qu’au nord de la Vilaine – rue de Fougères, prairies Saint-Georges (actuel quartier du vélodrome) ou encore sur le mail d’Onges (quai Dujardin et avenue Aristide-Briand). Les ingénieurs des Ponts et Chaussées la préfèrent, eux, au sud du fleuve, en pleine campagne.

«À cette époque, on ne mesure pas encore les conséquences sur le développement de la ville de l’arrivée du chemin de fer», note Jean-Yves Veillard, ancien conservateur du Musée de Bretagne, dans une interview de 1992 où il retrace 135 ans d’histoire de la gare. En 1854, le gouvernement décide de prolonger la ligne jusqu’à Brest. L’année suivante, le ministre de l’Agriculture, du Commerce et des Travaux publics tranche en faveur du choix des ingénieurs : ce sera au sud de la Vilaine, sur l’emplacement des poudrières de Lorette, à plus d'un kilomètre du centre, loin des quartiers peuplés. La gare va devenir le moteur du développement de tout un quartier.

Les Trois Joyeuses

Dimanche 26 avril 1857, à 16h05, le chemin de fer entre en gare, ayant mis Paris à dix heures de Rennes. C'est l’occasion de trois jours de festivités, « Les Trois Joyeuses », comme on les nomma.

Depuis la première ligne inaugurée en Bretagne en 1851 jusqu'aux années 1870, c'est un rituel identique qui a présidé aux inaugurations. Ainsi, à Rennes, la gare, bien qu'inachevée, accueille un autel devant lequel se déroule la bénédiction des locomotives. Après celle-ci, l'église affirme par la voix de l'évêque qu'elle ne s'oppose en rien au progrès. A sa suite, le préfet ou le ministre souligne combien le chemin de fer va être bénéfique pour la région. Enfin, le maire fait de même et remercie la compagnie. Les rues sont pavoisées. Des illuminations décorent les bâtiments et les rues, les habitants sont invités à faire de même. Un feu d'artifice  s'impose ; concert, bal cavalcade complètent les réjouissances.

Pour fêter l'évènement, Edouard Vaumort réalise une série de dix lithographies, figurant la cavalcade, les chars des métiers ou, comme, ci-dessus, ici, la bénédiction des locomotives. Au centre de la composition trônent les locomotives, admirées par une foule nombreuse. Les costumes du pays de Rennes côtoient les crinolines. Un habile encadrement permet de placer le blason de la ville, la ruche symbole de toute activité, les porteurs des bannières et ceux des chefs-d’œuvre évoquant l’industrie rennaise.

Une architecture néoclassique

La gare est l'oeuvre de l'architecte de la Compagnie de l'Ouest, Victor Benoist Lenoir. Il réalise un édifice néoclassique plutôt modeste pour cette gare de passage. L'ensemble se présente en U, avec un corps principal flanqué de deux ailes en retour d'équerre enserrant une cour cour fermée par une grille. L'horloge, motif obligatoire, domine le corps du bâtiment central. Un buffet est aménagé pour que les voyageurs puissent se restaurer.

Avant la grande Guerre, les espaces d'accueils de la gare sont modernisés. Un nouveau buffet est construit. Plus tard, un centre de tri postal est mis en place. Après la Seconde Guerre mondiale, durant laquelle la gare a été endommagée, des marquises sont placées sur les quais et le bâtiment des voyageurs est remanié.

Face à la gare, des architectures incidentes apparaissent. Un hôtel de la gare, bien seul au début, est érigé à l'angle de la place et de l'avenue du même nom. Plus tard, les lignes 1 et 2 du tramway urbain assurent une liaison avec le nord de la ville, jusqu'au fauboug de Fougères, et au cimetière du nord.

Les ateliers de Rennes

Les ateliers de Rennes ont occupé une place essentielle dans la vie économique de la ville, comme dans l'organisation spatiale et humaine de tout un quartier. Au début du XXe siècle, c'était le principal pôle ouvrier de la ville, employant selon les périodes, entre 1 200 et 1 400 personnes.

Ceux de la Compagnie de l’Ouest sont construits en 1865, huit ans après l’ouverture de la gare de Rennes, au sud de la voie ferrée, entre les quartiers Quineleu et Saint-Hélier. L’accroissement du réseau, l’augmentation du nombre des lignes et la nécessité pour la compagnie d’assurer la maintenance et l’entretien de ses machines, vont vite conduire, dès 1868, à un projet d’extension des ateliers. Les constructions sont achevées à la fin des années 1880 et comportent 18 bâtiments.

Les ateliers de chemins de fer comprennent les forges, l’ajustage, les halles de montage, les ateliers de carrosserie, de tapisserie, de peinture… C’est en Ille-et-Vilaine que les effectifs des employés du chemin de fer sont les plus importants, très largement composés du personnel des ateliers, principal pôle ouvrier de la ville employant selon les périodes, entre 1 200 et 1 400 personnes.

Les ateliers des Chemins de fer vont connaître plusieurs phases de réorganisation suivies, à partir des années 1930, d’une redistribution géographique du travail des ateliers sur l’ensemble du territoire. Après une optimisation de chaque établissement, ce sont tous les ateliers dont les fonctions vont tendre vers une hyper spécialisation : à Rennes on ne va plus réparer les locomotives mais se spécialiser dans la révision de certains véhicules, comme les autorails ou les draisines, ou encore dans la fabrication d’un modèle particulier de wagon.

Les ateliers de Rennes ont déménagé en avril 2015 sur la commune de Saint-Jacques-de-la-Lande pour devenir « technicentre » et se spécialisent à nouveau, cette fois dans la maintenance des systèmes de freinage.


Source : Bretagne Express, Les chemins de fer en Bretagne 1851-1989, Musée de Bretagne, éditions Fage, 2016

1992, la nouvelle gare

La gare de Rennes en 2006. Photographie, Didier Gouray

L'arrivée du TGV Atlantique, en 1989, sonne le glas de la gare historique de Rennes. Dès 1985, six équipes d'architectes se penchent sur le nouveau "projet gare", qui, une nouvelle fois, va modifier le visage de ce quartier.


En 1985, la gare est totalement inadaptée à sa fréquentation. D'ailleurs, la SNCF possède à l'époque, dans ses cartons, un projet d'aménagement depuis... 15 ans !  Le "projet gare" est, en septembre 1985, est le fruit d'une réflexion menée conjointement entre les élus de l'époque, les services techniques municipaux, la SNCF, la région, le Département, la Chambre de commerce... Le programme retenu comprend trois points principaux : la gare proprement dite, la circulation et l'urbanisme.

La "future" gare sera dotée d'une aire commerciale "à l'avance" et d'une aire commerciale "départ immédiat". Un coin accueil-famille sera mis à disposition des voyageurs avec tables à langer et chauffe-biberons. Sont également prévus : 240 mètres linéaires prévus pour les taxis et les "arrêts-minute", un parking de 380 places, cinq arrêts pour les transports en commun.

La nouvelle gare doit aussi permettre de relier le nord et le sud, la ville étant alors coupée en deux par le fleuve ferroviaire . D'où l'idée d'une "passerelle", terme provisoire, enjambant les voies et reliant la gare initiale au nord et une nouvelle gare-sud, s'ouvrant sur la rue de Chatillon.


Sur 46 dossiers reçus, six équipes, dont quatre rennaises seront retenus pour travailler sur le projet définitif. La nouvelle gare, qui sera achevée en 1992, est l'œuvre collective de trois agences rennaises : Archipole (Thierry Le Berre), BNR (Brajon Nicolas Ressaussière) et Aria (Jean-Luc Le Trionnaire).

Préalablement au démarrage du chantier, un vestige de la Seconde guerre mondiale, un blockhaus datant de 1941, sera détruit en plusieurs étapes. Dans le projet initial, ce blockhaus devait être utilisé pour permettre  une liaison piétonne entre le sud et le boulevard Magenta.

L'arrivée du TGV Atlantique et la construction de la nouvelle gare de Rennes est l'occasion pour les médias nationaux de s'intéresser à l'histoire de la gare de Rennes, avec des témoignages d'élus et responsables locaux.

L'une des évolutions marquantes de la gare de Rennes sera la construction de la station de métro Gare de la ligne a, première étape vers l'intermodalité.


 

Et demain : vers un pôle d'échanges multimodal à l'horizon 2020


 

Une gare neuve, mais aussi un nouveau quartier : EuroRennes met sur les rails un projet urbain ambitieux qui marque la porte d’entrée de la Bretagne. Avec plus de mobilité, plus d’attractivité et plus de vie autour d’un centre-ville étendu, et des premières concrétisations.

1.Rennes-Paris en 1h25
La ligne à grande vitesse (LGV) est entrée en gare dimanche 2 juillet, date du voyage commercial inaugural. Le TGV relie Rennes et Paris en 1h25 (2h05 aujourd'hui) à une vitesse de 320 km/h. Plus de vingt TGV circuleront tous les jours entre Rennes et la gare Montparnasse, dont onze sans arrêt entre les deux villes. Les horaires seront élargis. Le premier train arrivera à Paris vers 7h45. Le dernier train quittera la capitale vers 21h30.

2. Relier le nord et le sud
La nouvelle passerelle qui enjambe les voies ferrées, le long de la façade ouest de la gare de Rennes, a été ouverte au public samedi 1er juillet. Elle est accessible 24 h/24. Cette large promenade, 80 mètres de long sur une dizaine de mètres de large, assure la fonction très attendue de lien urbain, en reliant les parvis nord et sud de la gare. Souhaité et financé par la Ville de Rennes et Rennes Métropole dans le cadre de la Zac EuroRennes, ce nouvel espace public est attenant à la future zone « arrivées » de la gare. Trois escaliers mécaniques desservent les quais SNCF. A terme, la passerelle se prolongera en une allée piétonne et cyclable, qui descendra en pente douce vers le parvis nord de la gare..

3. D'un mode de transport à un autre
Outre les TGV, TER et les deux lignes de métro, la gare sera le point de ralliement de tous les modes de déplacement : vélo, taxi, bus, car… Elle permettra de passer d’un moyen de transport à un autre en toute facilité. Rénové et agrandi, le nouveau parking verra sa capacité totale d’accueil progressivement portée à 1 200 places, dont 90 places en dépose-minute. Quelque 400 places sécurisées pour les vélos et 100 places pour les motos viendront également étoffer l’offre.

4. Le parvis paysager
Exploitant la différence de niveau entre le nord et le sud des voies ferrées, l’équipe d’urbanistes-paysagistes a imaginé une colline artificielle partiellement végétalisée, dénommée « paysage construit », à l’emplacement actuel de la place de la Gare. Le paysage s’abaissera en douceur vers le parvis nord, avec de nombreux cheminements permettant d’accéder aux différents niveaux de la gare et de traverser les voies ferrées.

5. Un nouveau quartier de vie…
Des logements neufs, un cinéma, des commerces, des restaurants, une crèche,
des espaces verts… le quartier EuroRennes sera un véritable quartier de vie, étirant
le centre-ville vers le sud.
… et d’affaires
Avec ses 125 000 m2 de bureaux idéalement situés (notamment pour des sièges
sociaux d’entreprises), qui permettront d’accueillir quelque 7 000 emplois, EuroRennes sera aussi dans les prochaines années la locomotive du développement économique de la métropole.

En attendant 2020, promenons-nous dans le temps avec la vidéo présentant l'évolution de la gare de Rennes de 1970 à 2002 réalisée par SNCF Gare & Connexion à partir de cartes postales et de visuels. Bon voyage !