Fondé à Bruxelles en 2011, le Festival XS a depuis lors conservé son principe et cultivé ses ambitions. En somme : concentrer en trois soirées effervescentes une série de propositions scéniques brèves (de 5 à 25 minutes), tenant de disciplines variées - théâtre, cirque, danse, marionnettes, théâtre d'objets -, par des artistes d’horizons divers.
"Si on veut innover, affirme Alexandre Caputo, conseiller artistique au National, fondateur et directeur du festival, il est fondamental de proposer des espaces d’expérimentation, de rencontre, d’échange. La forme courte, en ce sens, favorise la prise de risque. Pour les artistes, qui peuvent essayer, expérimenter, entre deux projets de plus grande envergure. Pour les publics, qui peuvent se frotter à des propositions diverses, éventuellement loin de leurs habitudes". Avec, à tout le moins, une curiosité en éveil. Au mieux, un emballement. Au pire, une déception - par nature de courte durée. Avant de repartir vers d’autres sensations.
Et pourquoi pas place de la Bourse ? C’est la grande nouveauté d’XS cette année. Si son cœur bat au National, ses pulsations se font sentir jusqu’à quelques encablures de là. Une envie née dès la fin de la première édition, précise Alexandre Caputo, et que le piétonnier aura "facilitée". Le festival a d’ailleurs trouvé en la Ville de Bruxelles un partenaire.
"Il est très important que nous, citoyens, nous réappropriions l’espace public."
Le défi du plein air, outre ses aspects techniques et sécuritaires, était de créer "un événement populaire, festif et pointu" via des spectacles "qui développent un lien fort avec l’urbain".
"La forme courte favorise la prise de risque,
pour les artistes comme pour les spectateurs"
Formes brèves, longs effets
Depuis l'an dernier, XS a noué, en collaboration avec la SACD France et Belgique, un fructueux partenariat avec le Festival d’Avignon, et qui se poursuit cette année. Présentés l’été dernier au Jardin de la Vierge, l’étonnant et visuel "Frozen" de la Cie 3637, la glaçante et hilarante conférence "Saison 1" de Florence Minder (dont l’"Episode 02" est à découvrir cette fois-ci), et "La Course", délicieux récit cycliste cousu en direct, sont désormais en production. Comme d’autres issus d’XS 2015, dont "La Convivialité", qui ouvrira la saison prochaine du National.
Si les formes brèves que présente le festival n’ont pas toutes vocation à l’expansion - et ne sont en tout cas pas à prendre comme des "brouillons" -, elles peuvent pour certaines contenir en germe une vie plus ample. La preuve par exemple avec "Au sanglier des Flandres" que Bernard Van Eeghem avait créé à XS en 2012, qui fut nominé dans la catégorie "meilleur spectacle" aux Prix de la critique cette année-là, et qui continue son chemin, notamment cette semaine aux Tanneurs.
On notera par ailleurs que, sans qu’XS soit officiellement associé au KVS (alors que le National a fait avec l’institution sœur flamande saison commune, sous la bannière "Toernee Capitale"), l’un des spectacles de l’édition 2016 porte néanmoins ses couleurs. "The Chickens Come Home to Roost" - création autour de l’activisme politique -, à découvrir dans la grande salle du National, inaugurera en version longue la saison 16-17 du Théâtre royal flamand.
Déplacer le regard
Une collaboration neuve a vu le jour pour l’édition 2016 : XS et UP, la Biennale internationale de cirque, présentent ensemble quatre spectacles relevant de cet univers très mouvant. "Le cirque intègre des formes, des langages d’autres disciplines, et ne se limite plus aux techniques circassiennes." L’inscrire dans XS - comme ce fut d’emblée le cas - permet de faire découvrir, à ceux qui n’iraient pas spontanément vers le cirque, "des univers singuliers et poétiques".
Très ancré dans son temps, XS se fait ainsi l’écho de "la préoccupation de la cité", comme le souligne Alexandre Caputo : "Depuis le moment où on vient au monde, on est confronté à des visions dominantes. Le but de l’art est de nous ouvrir à d’autres conceptions, d’autres possibles, d’autres réalités. Ce que propose par exemple Moutoufs, spectacle de Jasmina Douieb sur le témoignage de cinq acteurs belges d’origine maghrébine".
Il y a les histoires dont on a conscience, qu’on va voir au cinéma, qu’on raconte à nos enfants. Et les autres, dont la ville fourmille. "En cela le théâtre contredit le fameux Tina (there is no alternative) : si, d’autres possibles existent !"
C’est le moment d’ouvrir les yeux, de tendre l’oreille et de se laisser gagner par l’effervescence XS, comme extra small, mais aussi comme excès.
Festival XS, Bruxelles (Théâtre national et place de la Bourse), du 17 au 19 mars. Infos, programme complet, rés. : 02.203.53.03, www.theatrenational.be
Hors les murs,
en marge,
en réseau
La ville nous appartient. Ce sous-titre regroupe les trois spectacles présentés samedi soir place de la Bourse : "Zéro degré" par les acrobates de la French Freerun Family, faisant du sol mais aussi des façades et des toits leur terrain de jeu, "L.U.Men" par la Cie Beau Geste, avec sa nacelle de chantier et ses trois danseurs, et "Human Brush" de Vincent Glowinski (alias Bonom), transposition performative de ses fresques de rue.
Xtras. Et si on veut jouer les prolongations ? Il y aura de la musique vendredi soir dès 23h30 au bar avec un concert de Niño de Elche, "chanteur navigant entre les genres". À la même heure, samedi, la French Freerun Family investira le théâtre dans toutes ses dimensions pour une performance extraordinaire. Il n'y aura plus qu’à danser, ainsi échauffés, jusqu’au bout de la nuit grâce au DJ qui s’installera au bar dès 23h45.
Source. XS et trois partenaires européens (le Festival d’Avignon, le théâtre Trafó de Budapest, le festival Short Theater de Rome) ont répondu à l’appel à projet européen par un réseau nommé Source, "centré sur les formes courtes, l’innovation, la citoyenneté" , avec l’ambition "de rencontrer de nouveaux publics, de soutenir la recherche et le rapprochement des artistes et de la société civile" . Une réponse de l’Union européenne est attendue d’un jour à l’autre.
