Dans le ravin de la mort, effacement et désolation

Le Vernet. Sept mois après la catastrophe aérienne de la Germanwings, le ravin aux 150 disparus a été nettoyé et dépollué. Les 50 tonnes de débris et de terre enlevées n'effacent pas la tragédie.

C'est le « ground zero » de l’arrière-pays dignois, le point d’effacement du vol 4U9525 de la ligne Barcelone-Dusseldörf qui jamais n’arriva. Le vallon tragique, où 150 personnes de 18 nationalités ont péri dont 72 Allemands et 50 Espagnols, est accessible à compter de ce dimanche de Toussaint. 4 hectares ont été déblayés, nettoyés, dépollués par des sociétés spécialisées. 


La piste tracée à la hâte par l’armée pour franchir à 1 500m d’altitude le col de Mariaud reste gardée par deux vigiles qui se réchauffent autour d’un feu de bois. Quatre gros sacs de robine souillée attendent d’être enlevés. Pas un bruit, pas un chant d’oiseau, pas même le souffle du vent n’arrive au fond du ravin encaissé que domine le massif des Trois-Évêchés. Sept mois après la catastrophe du 24 mars 2015 qui hante toujours la vallée, le silence est sépulcral.

« Une immense boule de feu »

Images David Coquille.

La pente est raide pour atteindre le lieu du déchaînement, repérable par un monticule scalpé, bordé de souches d'arbres déracinés. Un gros pin terrassé résume à lui seul la violence. C’est la fameuse « zone de contact » décrite par le bureau d’enquêtes et d’analyses quand « l’appareil est entré en collision avec le relief à 9h41 et 6 sec, entraînant le décès instantané de tous les occupants de l’avion ». 

C’est là sur ce lopin ravagé que l’oiseau d’aluminium et de zinc, lancé à la vitesse d’un météore -650km/h- s’est désintégré, propulsant dans le décor les confettis de 150 passagers et membres d’équipage dont Andreas Lubitz le copilote, l’auteur. « C’est comme dans les films, une immense boule de feu qui s’élève et s’éteint aussitôt, asphyxiée par son propre souffle, puis une pluie de débris et de kérosène », explique un gendarme du GTA. Les colchiques mauves de l'automne ne feront pas oublier sa macabre cueillette. 


Le squelette de l'A-320 gît lui dans un hangar à Seyne-les-Alpes. à 2h à pieds, au hameau de Mariaud, un mémorial de 150 tiges de fer a vu le jour. Cet été un journaliste iranien a été inhumé au cimetière du Vernet dans un des caveaux achetés par Germanwings. Venue de Téhéran, la famille de Milad Estami a laissé sa photo posée sur le béton. 


Trois autres caveaux contiennent eux les fragments de victimes non identifiées. Les bougies se sont éteintes mais au soleil couchant, une dame du village vient se signer. Avec elle, c’est toute la vallée qui s’incline devant les hôtes du voyage inachevé.

 David COQUILLE