Les forces de la
Grande Région

Une série de La Dépêche et Midi Libre

L'union fait la force. La fusion aussi. Celle qui doit réunir à partir de l’an prochain les destinées de Languedoc-Roussillon et de Midi-Pyrénées va donner naissance à un grand espace dont les atouts sont incontestables.

Dans la série d’articles sur les "Forces de la nouvelle région", réalisée conjointement par La Dépêche du Midi et Midi-Libre, nous présentons ces principaux atouts. Le tourisme avec les deux destinations exceptionnelles que sont les Pyrénées et la Méditerranée ; l’économie, avec l’aéronautique et les start-up ; l’agriculture, avec la viticulture et l’agroalimentaire ; la culture, avec le théâtre et les musées ; la santé, avec les “premières médicales” et l’Institut du cancer ; enfin, la jeunesse et les universités – Toulouse et Montpellier sont sur le podium des villes françaises où il fait bon étudier ! 

Autant d’atouts qu’il faut mettre en commun.

Jean-Claude Souléry, rédacteur  en chef de La Dépêche du Midi

1/6. LE TOURISME

Les Pyrénées, sommet touristique 

Madame de Maintenon est formelle.Les Pyrénées ?« Un lieu plus affreux que je ne puis vous le dire », écrivait-elle en 1675. Regard qui fait sourire aujourd'hui… car ce sont bien des millions de touristes qui prennent désormais chaque année la direction de « la dernière frontière sauvage », hiver comme été. Ainsi, concrètement en termes d’hébergement, 16,2 millions de nuitées (6,2 millions en hiver, 10 millions en été) ont été comptabilisées dans les Pyrénées l’an passé, dont 1,122 million pour l’hôtellerie et 1,8 pour les campings – pour la seule clientèle française. Ce faisant… sachant que Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon fusionnés représentent les trois-quarts de la chaîne pyrénéenne avec 600000lits (hors Lourdes) sur cinq départements (09,11,31, 65, 66), c’est bien un poids lourd du tourisme qui occupera la frontière sud de la grande région… avec déjà 13 des 25 Grands Sites labellisés par Midi-Pyrénées tels Gavarnie ou le Pic du Midi. 

Les emblèmes de la chaîne :
du Vignemale au Canigou

Ses atouts ? Ils sont connus de tous les randonneurs et naturalistes.  Côté patrimoine naturel, il y a bien sûr le Parc national dans les Hautes-Pyrénées, mais aussi les parcs régionaux des Pyrénées ariégeoises et catalanes ; une collection de sommets emblématiques du Vignemale au Canigou ; une faune comptant l’ours et le loup ainsi qu’une flore d’une richesse exceptionnelle. Un cadre dans lequel on inscrira alors également un patrimoine préhistorique et historimoine de premier plan : de l’homo erectus de Tautavel, il y a 450000 ans, aux grottes ornées du paléolithique (en Ariège et dans les Hautes-Pyrénées) ou aux forteresses du vertige, châteaux "cathares" du Moyen-Âge (dans l’Aude et l’Ariège)… sans oublier de rajouter à ces sites « obligatoires » Lourdes (lire ci-contre). 

L’hiver et l’été s’équilibrent Mais ce décor planté, s’il faut passer sur la balance côté « euros », les sports d’hiver dimensionneront définitivement l’ensemble, avec 17 stations en Midi-Pyrénées (dont Saint-Lary, le Grand Tourmalet et Peyragudes dans les Hautes-Pyrénées pesant 70 % du chiffre d’affaires global « ski ») et 7 en Languedoc-Roussillon, soit 24 des 27 stations que compte la chaîne et qui attirent aussi une forte clientèle espagnole. 108 M€ de chiffre d’affaires pour les seules remontées mécaniques l’an passé : sachant que 1 € dépensé au télésiège génère 7 € dans la vallée et sachant aussi qu’un emploi sur six dans les Pyrénées est touristique, mais également que la particularité de la chaîne est de voir s’équilibrer hiver et été, avec notamment l’apport du thermalisme… on mesurera, en évoquant les difficultés régulières de certaines « petites » stations que la « rentabilité sociale » devra continuer à être prise en compte, « car si une station ferme, la vallée meurt », comme l’affirment les élus. 

Bref, un gros potentiel en toute saison, qui plus est désormais inscrit au « Contrat de destination » lancé par le ministère des Affaires étrangères mais… des fragilités côté hébergement qui promettent déjà de gros chantiers. Plombée par les mises aux normes obligatoires, la petite hôtellerie familiale est aujourd’hui sinistrée tandis que l’hôtellerie propre à séduire une clientèle à forte valeur ajoutée n’existe quasiment pas : aucun cinq étoiles et seulement quelques quatre étoiles, sur le marché international, les Pyrénées ne pourront pas s’en contenter. 

Pierre Challier (La Dépêche du Midi)

Lourdes: 2e cité hôtelière deFrance

11 février 1858.Sur les bords du Gave baignant Lourdes, Bernadette Soubirous voit une Dame dans la grotte de Massabielle… C'est la première des 18 apparitions qui, avec la révélation d’une source miraculeuse, vont transformer la petite ville de Bigorre en un centre de pèlerinage mondial. Aujourd’hui ? La cité mariale, 15 000 habitants, revendique 5 millions de visiteurs dont trois millions d’excursionnistes par an, chiffre qu’il convient de mettre en regard des 626 059 pèlerins qu’ont recensés les services de réservation des Sanctuaires, en 2014, mais qui ne représentent qu’une petite partie du flux. 

En janvier 2014, Lourdes comptait encore 133 hôtels pour 10 615 chambres et 41 hôtels non classés pour 1 268 chambres soit un total de 11 883 chambres.Elle restait la 2e cité hôtelière de France après Paris et devant Nice, l’aéroport de Tarbes-Lourdes-Pyrénées, étant aussi l’un des premiers aéroports charters du territoire ! En 2012, la dépense moyenne par nuit et par personne pour un pèlerin séjournant en moyenne trois jours (incluant le transport) était évaluée à 154 €. Les trois quarts des pèlerins viennent de France, d’Italie et d’Espagne.

P. C.

Méditerranée, soleil, plages, campings

Sansouires, prés-salés, roselières… Les lagunes languedociennes recèlent des trésors. Mais la région reste avant tout « le bronze-cul de l'Europe », formule le gérant de l’un des 852 campings du Languedoc-Roussillon. Le camping, c’est l’arme d’attraction massive. Avec 12,7 % du PIB régional qui s’établit à 64 milliards d’euros par an, la région est tourismo-dépendante. Les touristes y dépensent chaque année 8 milliards d’euros. Cinq points au-dessus de la moyenne. 

Ce tourisme de masse génère 60 000 emplois directs, soit 5,5 % de l’emploi. Languedoc-Roussillon : la 4e région touristique de France Pour éviter la fuite des vacanciers vers l’Espagne, l’État a fait jadis le pari de l’attractivité d’un territoire jusque-là envahi de moustiques. Il crée, en 1963, la mission Racine. Sortent de terre les stations balnéaires de Port-Camargue, la Grande-Motte, Le Cap d’Agde et son village naturiste, Gruissan, Port Leucate, Port-Barcarès et Saint Cyprien. Avec ses cent millions de nuitées (8,8 %) et ses 15 millions de vacanciers, c’est la 4e région touristique de France, après l’Île de France, Rhône-Alpes et Paca. 

Le modèle s’essouffle-t-il ? « L’enjeu, analyse Roger Rabier de l’Insee, c’est la toujours très forte saisonnalité et la sous-utilisation des capacités d’accueil en arrière-saison. » Élargir la gamme Si le camping attire toujours autant d’estivants, c’est que ce mode d’hébergement est monté en gamme : « Désormais, une majorité de campings (52 %) sont équipés de mobile-home, ce qui conforte la région au 1er rang national de nuitées en campings. » Elle se classe 6e pour les hôtels et 5e pour les villages de vacances. Les campings ont fait l’objet d’autres investissements massifs : piscines, animations, etc. Alors que les toiles de tente sont devenues minoritaires, la fréquentation en saison estivale 2015, elle, a progressé de « 3 % à 4 % », confie Didier Arino, le directeur du cabinet spécialisé Protourisme. Et il ajoute que « le Languedoc-Roussillon est, avec Paca, le seul territoire bénéficiant de la désaffection des pays du Maghreb. 

Cela dit, « les atouts du Languedoc-Roussillon – le soleil, la plage – sont une condition nécessaire mais plus suffisante ». Le défi : sortir de l’hypersaisonnalité et créer « un tourisme des quatre saisons » ; élargir la gamme en développant excursions à la journée, courts séjours, y compris avec une clientèle régionale, filières nautisme, œnotourisme, remise en forme… Et les festivals : chercheur au CNRS, Emmanuel Négrier estime qu’il y a 400 festivals dans la région sur 6 000 événements organisés dans le pays. Et pour lesquels chaque euro d’aide, c’est 6 € de retombées économiques. « Ce qui compte, c’est le supplément d’âme, insiste Didier Arino. On n’est plus dans le 100 % farniente. La Grande-Motte a accompli sa mue, conservant ses touristes l’été, développant un tourisme d’affaires et attirant une clientèle hors saison. » 

Elle cultive une image "verte", avec ses 70 % d’espaces verts et des déambulations à vélo ; la mise en valeur de son architecture “patrimoine du XXe siècle”. Aider les entreprises à se rénover Le tourisme doit « évoluer car les demandes évoluent », insiste-t-on au conseil régional. Qui prône aussi une montée en gamme. « La mutation à venir est de la même importance que dans les années soixante. Il faut aider les entreprises à se rénover et à avoir un marketing performant. Midi Pyrénées fait une « belle promotion de son tourisme basée sur les Grands sites. On peut, demain, la reprendre et l’élargir à l’actuel Languedoc-Roussillon sous l’égide de Sud de France. C’est facile et ça marchera. » 

Il faudra aussi compter sur les nouvelles façons de partir comme l’échange ou la location de maisons entre particuliers. Pour Jorg Muller, chercheur au Crédoc, pour l’instant, « c’est l’apanage des catégories aisées. Le modèle du Languedoc-Roussillon est peu touché ». Il rappelle que « 70 % des Français sont partis en vacances lors des dix derniers mois : c’est le premier poste qui profite d’une possible sortie de crise. » Il précise que « les Français ont conservé les stratégies d’économie prises pendant la crise. Le low cost, par exemple, ce sont plutôt les classes supérieures qui y ont recours ; les autres partent près de chez eux ou en famille ». 

Olivier Schlama (Midi-Libre)

« Dynamiser la filière »

La future région vue par Georges Glandières, vice-président de l'Union des associations de tourisme social et solidaire (qui représente 10 % du  tourisme dans son ensemble). Les Unat des deux régions vont-elles fusionner ? Oui, le 10 décembre. Dans les deux régions, c’est 240 villages de vacances, auberges, refuges, associations, 8 000 emplois, 600 000 visiteurs et un chiffre d’affaires de 160 M€. Quels projets avez-vous ? Cette fusion va dynamiser toute la filière et permettre au plus grand nombre de prendre des vacances. L’opération quasi unique de faire partir 2 000 enfants sera étendue à Midi-Pyrénées. Soit 4 000 enfants. Avec les Datar du Massif central et des Pyrénées, nous créerons des produits de sports, nature et bien-être. Des packages spéléo, canyoning, parapente, randonnées sur l’Aubrac, les Pyrénées, de marche nordique, autour du bien manger… À Nant (Aveyron), nous avons un gros projet autour du bien-être et de la santé des retraités. 

Recueilli par O.SC. 

2/6. L'ECONOMIE

Un Airbus A350 XWB (Photo Airbus SAS)

Le poids lourd de l'aéronautique

Dans le monde entier, la métropole toulousaine et sa région sont connues pour Airbus et plus largement sa filière aéronautique. De Seattle à Hambourg en passant par Séville et la Chine, Toulouse est synonyme de conquête du ciel. L'avionneur européen concentre ses forces sur le territoire de la métropole de Toulouse avec son siège mondial, quatre chaînes d’assemblage (A320, A330, A350 et A380), le bureau d’études et toutes les fonctions support. Comme pour accentuer cette présence midi-pyrénéenne, Tom Enders, président d’Airbus Group fait actuellement ériger le siège mondial de la maison-mère d’Airbus en bordure des pistes de l’aéroport de Blagnac. 

Au total, Airbus emploie en direct plus de 25 000 salariés sur l’aire urbaine. Mais si l’avionneur européen est la partie émergée de l’iceberg, dans son sillage c’est tout une filière qui vit des retombées du succès commercial du numéro un mondial de l’aéronautique civile. 

Neuf ans de production  pour Airbus

Selon l’Insee, 123 800 salariés travaillent dans la filière aéronautique et spatiale dans le grand Sud-Ouest et représentent 40 % des effectifs nationaux. 

L’aéronautique et le spatial emploie un salarié sur dix ! à elle seule, Midi-Pyrénées concentre plus de 80 000 emplois du secteur essentiellement autour de Toulouse mais également dans la Mecanic Valley (Lot, Aveyron), dans le pôle tarbais et dans une moindre mesure dans le Tarn. Satisfaction pour la région, les entreprises du secteur sont plutôt de bonne taille à l’heure où les pouvoirs publics cherchent à faire grandir les PME en ETI, (entreprise de taille intermédiaire) c’est-à-dire plus de 250 salariés. Les établissements de ce secteur emploient en effet 423 salariés en moyenne et 36 % emploient cent salariés ou plus. 

Outre les avionneurs comme Airbus, ATR ou Daher Socata à Tarbes, les grands équipementiers et donneurs d’ordre sont implantés en Midi-Pyrénées : Thales, Safran, Latécoère, Liebherr Aerospace, Ratier-Figeac, l’Américain UTC (ex Goodrich), Figeac Aero, etc. Si la France est frappée de désindustrialisation, l’Union des métiers de la métallurgie rappelle souvent que Midi-Pyrénées est la seule région où l’emploi industriel continue de se renforcer. Une bonne santé due au carnet de commandes d’Airbus qui affiche neuf ans de production. 

« Nous n’avons jamais eu une telle visibilité sur l’avenir ! » se réjouit un patron toulousain de l’aéronautique. Il fait référence aux 6 755 avions qui restent à livrer. Pour faire face à ces commandes, Airbus a enclenché un vaste plan de montée en cadence : de 42 A320 (avions de 150 places) produits par mois, Airbus passera à cinquante avions d’ici début 2017. La cadence de 60 avions par mois est même étudiée et Fabrice Brégier, PDGd’Airbus, a annoncé le mois dernier de nouveaux investissements à Toulouse pour y fixer l’activité d’aménagement cabine pour les A320. C’est encore 200 emplois supplémentaires. 

C’est aussi toute la filière numérique forte de 30 000 emplois (ingénierie, informatique…) qui est tirée par l’avionneur européen. 

Gil Bousquet (La Dépêche du Midi)

Le spatial, second étage de la fusée

A côté de l'aéronautique, prospère une autre filière plus discrète mais tout aussi stratégique : le spatial. Autour du Centre national d’études spatiales (Cnes) important donneur d’ordres (1 720 salariés) du secteur se sont agrégés deux leaders mondiaux : Airbus Defense and Space (3 000 employés) ainsi que Thales Alenia Space (2 300 salariés). 

Au total, 12 000 emplois en Midi-Pyrénées sont liés directement et uniquement au secteur spatial, sur les 16 000 de la France métropolitaine. 

Cela fait de l’agglomération toulousaine le numéro un français qui concentre aussi le quart des effectifs européens. Le spatial génère chaque année un chiffre d’affaires d’1,5 milliard d’euros dans la région. épaulés par une kyrielle de PME souvent très spécialisées, ces industriels s’appuient aussi sur un panel d’organismes de formation prestigieux comme l’ISAE, l’ENAC, l’INPT ou l’Université Paul-Sabatier.

Les Start-up seront les forces vives de demain

La fusion du Languedoc-Roussillon et de Midi-Pyrénées fera-t-elle naître une nouvelle « start-up région » du Sud de la France ? Avec deux métropoles (Montpellier et Toulouse) labellisées French Tech, la future grande région pourrait bien voir s'épanouir en France la prochaine « licorne » (société non cotée en Bourse valorisée à plus de 1 Md$). Si le monde numérique pense naturellement à Sigfox, géant des objets connectés basé près de Toulouse, plusieurs autres entreprises moins médiatisées pourraient y prétendre d’ici quelques mois ou années. La notion de start-up, qui fait référence à une dynamique entrepreneuriale, se prête mal aux statistiques. Mais le tissu des nouvelles technologies est très dense à l’est comme à l’ouest. 

Les Chambres de commerce et d’industrie dénombrent environ 2 500 entreprises pour 30 000 emplois en Midi-Pyrénées et 1 350 entreprises pour 15 000 emplois en Languedoc-Roussillon. Chaque métropole compte aussi ses géants de l’innovation : Dell, IBM, Ubisoft ou Schlumberger à Montpellier ; Airbus, Aérospatiale, Orange et Cap Gemini à Toulouse. « Il existe de vraies différences entre les deux écosystèmes », souligne Emmanuel Mouton, PDG de Synox Group, spécialisé dans les objets connectés, dont les activités sont réparties entre Toulouse et Montpellier. 

« Le numérique est traditionnellement organisé autour de l’industrie à Toulouse, qui attache beaucoup d’importance aux process et au contrôle de qualité », poursuit le vice-président du cluster du Languedoc-Roussillon, FrenchSouth Digital. « À l’inverse, Montpellier est beaucoup plus engagé dans le secteur tertiaire, les services et business models. La dynamique et l’innovation y sont plus importantes. »

« Capital d’échanger expériences et bonnes pratiques »

 « Mis bout à bout, les deux écosystèmes ne font tout de même pas la Silicon Valley française », tempère avec un sourire Jean-Dominique Seval, consultant à l’institut montpelliérain Idate, ajoutant que « toute la complémentarité est à construire entre les deux métropoles ». 

Les start-up des deux régions se répartissent dans des domaines parfois spécifiques à chaque territoire, et parfois communs. Ainsi, Montpellier est régulièrement citée comme l’une des toutes premières villes françaises de l’industrie du jeu vidéo, avec soixante studios installés (dont Scimob, Swing Swing Submarine ou NaturalPad), mais est également bien placée sur les services en ligne (Teads pour la publicité vidéo, Bime Analytics pour l’analyse des données professionnelles) ou la e-santé (MedTech). De son côté, Toulouse est à la pointe dans les systèmes embarqués et la robotique. 

Parmi les domaines communs, citons les objets connectés (Matooma et Awox à Montpellier, Sigfox à Toulouse), le big data, et l’agriculture numérique. « Il est capital d’échanger expériences et bonnes pratiques entre les deux régions », précise Philippe Coste, directeur général de la French Tech Toulouse et cadre chez Epitech. Structures d’incubation Chacune des régions bénéficie de nombreuses structures d’incubation et d’accélération des start-up les plus jeunes. 

Dans le Languedoc-Roussillon, le Business Incubation Center (BIC) de Montpellier a été classé en 2014 quatrième meilleur incubateur mondial, et compte aussi des structures plus petites (ViaInnova à Lunel ou Polen en Lozère). De son côté, Toulouse héberge l’incubateur Midi-Pyrénées, ou des projets privés, tels BizLab, créé par Airbus en mars 2015, qui abrite cinq jeunes structures. Les start-up ne seront donc assurément pas les « parents pauvres » de la future grande région !

 Christophe Greuet (Midi-Libre)

En force sur l'e-agriculture

Pour Léo Pichon, ingénieur à SupAgro Montpellier et responsable du pôle AgroTIC qui tisse les liens entre recherche et start-up, il n’y a pas de doute : « Le regroupement entre Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées en fera l’une des premières régions de France dans le domaine de l’agriculture numérique. » Il estime entre « 30 et 50 » le nombre de structures dédiées dans les deux régions. Chaque territoire y retrouve ses spécificités. « À Toulouse, plusieurs structures, dont Airbus Defence & Space ou Geosys, travaillent dans l’analyse d’images-satellite pour préconiser la fertilisation en azote, ou la prédiction pour les institutions du volume des productions à grande échelle ». 

À l’inverse, « Montpellier se distingue dans l’analyse de données (big data) sur les cultures », via des relevés de capteurs (Fruition Sciences) ou de modélisation mathématique (iTK). Léo Pichon ajoute que le Languedoc-Roussillon se dotera en 2016 d’un vrai atout en e-agriculture, le "Mas Numérique". Ce domaine, situé à Villeneuve-lès-Maguelone, près de Montpellier, et dédié aux cultures de la vigne, de l’olive et du blé dur, bénéficiera d’un équipement numérique de pointe à destination des étudiants, des entrepreneurs dont il sera la vitrine, et des chambres professionnelles, qui s’en serviront comme outil de formation.

3/6. L'agriculture

Vendanges manuelles dans le vignoble de Saint-Mont dans le Gers./Photo DDM

Le premier vignoble
de France

Le 29 septembre dernier, à l'Assemblée nationale, cocorico ! le ministre de l’Agriculture rendait un hommage appuyé à notre viticulture régionale qui a su, selon lui, structurer sa filière. « Il y a 20 ans, où en étions-nous en Languedoc-Roussillon, avec une viticulture à la limite de la disparition ? Des efforts majeurs ont été faits par les viticulteurs. On voit bien que quand on fait un choix, quand on s’organise collectivement, on arrive à répondre au marché national et on exporte des produits à l’étranger.» Voilà pour le verre de vin à moitié plein, voire à ras bord à en croire le ministre. 

Des hectares rayés de la carte

La réalité est plus contrastée et d’aucuns pourraient voir le verre à moitié vide. La gouvernance régionale, vantée par le ministre, elle est encore imparfaite : les querelles de clochers n’ont toujours pas cessé, les quatre interprofessions peinent à mettre en place une stratégie efficace de promotion des exportations. Des dizaines d’hectares de vignes ont été rayées de la carte du Languedoc-Roussillon ces dernières décennies (voir infographie ci-contre). 


Le scénario noir d’une viticulture régionale concentrée sur 150000 hectares avait été avancé dans les années 2000, au plus fort d’une crise viticole qui voyait disparaître ceps de vigne et propriétés. « Nous avons perdu plus d’un tiers de notre production, mais on va vers un phénomène de stabilisation qui pourrait même encourager des jeunes à s’installer », assure Jérôme Despey, président de la chambre d’agriculture de l’Hérault et du conseil spécialisé des vins de FranceAgriMer

Le recul de la production a aussi ses bons côtés

Le contexte de la décennie écoulée a permis de marquer des points : de gros négociants ont émergé, comme Val d’Orbieu, Chais beaucairois, Castel, Jeanjean, Grand chais de France. Ils sont parvenus à truster le marché de la GMS (grandes et moyennes surfaces). « La grande distribution, c’est un moteur par rapport à l’érosion de volume », insiste Bruno Peyre, responsable du développement des ventes France pour Jeanjean. La région Languedoc-Roussillon produisait 20 millions d’hectos en 2000. Elle n’en fait plus que 13,5 millions aujourd’hui (+7 % par rapport à 2014, qui avait enregistré 12,7 millions d’hectos), même si elle reste la première région de France en surface de vignoble. En rajoutant les 2,5 millions d’hectos de Midi-Pyrénées (Cahors, Fronton, Marcillac, Gaillac... pour 37 000 hectares), la production de la future grande région avoisinera les 16 millions. 

Le recul de la production, synonyme d’arrachage et de déclin, a aussi ses bons côtés : « La diminution du potentiel de production vient aussi des efforts que nous avons faits pour arracher les cépages très productifs, et préférer un travail qualitatif», insiste Jérôme Despey. Et les carences d’approvisionnement ont fait partir les prix à la hausse, dans un contexte mondial de production stabilisée et de hausse de la consommation. Quand le volume manque, les négociants veulent s’assurer d’avoir un quota suffisant. Et du coup, les viticulteurs du Languedoc-Roussillon se retrouvent en position de force. Voilà pour le yo-yo : les négociants, qui avaient longtemps tenu les producteurs à leur merci, doivent désormais être un peu plus conciliants. Enfin, l’Organisation commune des marchés (OCM) viticole permet aux caves coopératives et aux vignerons indépendants de se restructurer, d’investir. La région Languedoc-Roussillon concentre près de 30 % des 280 M€ d’enveloppe annuelle de l’OCM. 

Arnaud Boucomont (Midi Libre)

Bio: heurs et malheurs

Le marché du vin bio est à la croisée des chemins dans la région, qui est passée d'un peu plus de 6 000 hectares en bio ou en cours de conversion en 2007 à près de 21 000 cinq ans plus tard... 240 % d’augmentation ! Une véritable marche forcée vers le bio dont la conséquence fut l’envolée des stocks, et, du coup, le début d’une érosion des prix. C’est là que le bât blesse pour de nombreux vignerons qui avaient pu optimiser leur production. Car le vin bio revient plus cher. « On estime que les coûts de production du bio sont supérieurs de 30 % à ceux de la viticulture conventionnelle mais franchement, je ne pouvais pas augmenter mes prix dans ces proportions », insiste Karine Mirouze, du château de Beauregard, à Bizanet, dans les Corbières. 

« Nous sommes la première région en bio, explique Jérôme Despey, pour FranceAgriMer, mais les contraintes dans ce domaine sont assez fortes et cela dépend beaucoup des aléas climatiques. » Pour ces vendanges 2015, une partie du vignoble a été victime de la maladie du Black Rot, proche du Mildiou. Aucun produit bio n’est efficace pour contrer cette maladie-là et certaines propriétés ont été « victimes d’attaques assez importantes, avec parfois des pertes totales », rajoute Jérôme Despey.

L'agroalimentaire, c’est le n° 1 de l’emploi

Treize départements sur 73000 km2 : au 1er janvier 2016, Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon fusionnés deviendront la deuxième région de France quant à la taille... et quant à l'agriculture, avec 3,5 millions d’hectares de superficie agricole utilisée et 140000 emplois permanents. 

Premier en bio et vins

De fait, le secteur agroalimentaire y occupera donc aussi une part prépondérante, en troisième place au niveau national partie intégrante de ce paysage sur lequel on recensera alors 78300 exploitations, la première production «bio» nationale, le premier vignoble mondial en superficie pour les vins d’origine, ainsi que des grandes cultures de blé et de maïs, au premier plan également. 

Au-dessus de la moyenne nationale

En chiffres ?L’Association régionale des industries alimentaires de Midi-Pyrénées (ARIA) résume ainsi ce futur poids-lourds : 1500 entreprises (800 en Languedoc-Roussillon (LR), 700 en Midi-Pyrénées (MP)) qui pèseront 36000 emplois (20000 en LR, 16000 enMP) pour un chiffre d’affaires de 14,5milliards d’euros (8,5 milliards en LR, 6en MP). Données qui ne prennent en compte «que» l’industrie. Car, au-delà, en ajoutant les commerces de gros aux professionnels qui transforment et conservent les produits de l’agriculture et de la mer... on atteindra les 7000 établissements pour près de 45000 emplois, selon les prospectives de la Direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (DRAAF) de Languedoc-Roussillon ; grande région qui sera alors au-dessus de la moyenne nationale avec 4% d’actifs dans la filière agricole contre 2% sur le reste du territoire. 

Un secteur économique qui sera d’autant plus important, qu’il ne reposera pas sur ses seuls géants tels que Nestlé Waters dans le Gard, Andros dans le Lot, pour les fruits, ou Euralis Gastronomie dans les Hautes-Pyrénées, leader du gras... mais sur un réseau d’acteurs diversifiés et complémentaires, d’établissements nombreux, mais de petite taille, les PME et TPE de moins de 20 salariés étant majoritaires à 80%. Montagne, mer, régions céréalières ou maraîchères... La force de cette filière restera ainsi d’être implantée sur l’ensemble du territoire et de proposer une très large gamme de produits. 

Bonne notoriété

Elevage, lait, grandes cultures prépondérants en Midi-Pyrénées ; viticulture, fruits et légumes ou poisson en Languedoc-Roussillon : ses produits transformés continueront aussi à avoir pour atout, sur le marché, d’être le reflet d’un patrimoine culinaire reconnu et bénéficiant d’une bonne notoriété, côté «authenticité», avec ses huîtres, ses anchois, son cassoulet, ses salaisons, ses fromages ou ses vins... dans un contexte de demande croissante et rapide de plats cuisinés et de produits élaborés estampillés «terroir». 

Une image et une dynamique positives qui se retrouve à travers un autre chiffre : en 2014, l’agroalimentaire a créé des emplois, + 2,5% et conserve donc un gros potentiel de développement, a fortiori s’il sait répondre aux attentes sociétales de respect de la qualité et de l’environnement. 

Pierre Challier (La Dépêche du Midi)

Qualité

En Midi-Pyrénées, l'IRQUALIM est un outil de référence qui est depuis 1992 au service de la qualité agroalimentaire de sa région. Avec un souci de préservation du patrimoine et d’aménagement du territoire, i l accompagne les démarches de qualité telles que la structuration des filières, la promotion de leurs produits et leur signalétique et la sensibilisation des consommateurs locaux. La qualité : ce qui est aussi au cœur de la SISQA, la Semaine internationale sur la qualité alimentaire, devenue en fait le Salon de la qualité alimentaire se tenant en décembre, à Toulouse.

C’est le plus grand marché du genre et la vitrine des 200 produits de qualité de Midi-Pyrénées, dont les 120 produits sous signes d’Identification de la Qualité et de l’Origine (SIQO). En Languedoc-Roussillon ?La marque Sud de France représente désormais les produits et la destination, rassemblant ses produits viticoles, agroalimentaires et de bien-être obtenus grâce aux richesses naturelles du terroir. Deux démarches qui bientôt trouveront sans doute des synergies dans le nouveau cadre régional.

4/6. La culture

Musée Soulages à Rodez

Était-ce prémonitoire ? L'été 2012, le musée Fabre de Montpellier et le musée des Augustins à Toulouse s’étaient associés pour présenter en deux volets « Corps et Ombres » : Caravage et le caravagisme européen, une exposition au retentissement national. Les collaborations restent rares cependant entre Languedoc- Roussillon et Midi-Pyrénées. Et la fusion des Frac (fonds régionaux d’art contemporain) n’est pas à l’ordre du jour. 

Plus de 3 millions de visiteurs

Les deux régions comptent 133 établissements labellisés « musées de France ». Midi-Pyrénées (74 musées) est un peu mieux doté que le Languedoc-Roussillon (59 musées), mais avec une fréquentation légèrement inférieure : 1,5 million de visiteurs en 2013 contre 1,6 million pour sa voisine, selon les chiffres du ministère de la Culture. Le Languedoc-Roussillon réalisait plus d’entrées grâce à un bon maillage territorial. Mais l’équipement muséal de Toulouse est supérieur à celui de Montpellier. 

Le palmarès 2014, établi par le Journal des Arts, illustre cette suprématie. À Montpellier, seul le musée Fabre (en 20e position) figure parmi les 70 musées classés des villes de plus de 200 000 habitants – contre huit établissements toulousains : le musée d’Art moderne et contemporain Les Abattoirs est le mieux placé (11e) selon les multiples critères de ce palmarès où l’on trouve aussi le Museum d’histoire naturelle (très fréquenté : 294 000 entrées), le musée Saint-Raymond (antiquités), Les Augustins (beaux-arts), Paul-Dupuy (arts décoratifs), Fondation Bemberg, musée Georges-Labit (arts asiatiques), et le MATOU (musée de l’affiche). 


Pour compenser ce déficit, la ville de Montpellier mise sur l’ouverture, en 2019, d’un Centre d’art contemporain. 

Soulages dope Rodez

Hors des capitales, les deux régions affichent également un réel dynamisme. L’art contemporain bénéficie en Languedoc-Roussillon d’une politique volontariste menée par le Conseil régional, tutelle principale des musées de Céret (Pyrénées-Orientales), de Sérignan (Hérault) et du centre régional d’art contemporain de Sète (Hérault). L’art actuel possède aussi une place forte à Nîmes (Gard), avec le Carré d’art

En Midi-Pyrénées, Rodez (Aveyron) est entré dans la « cour des grands » en ouvrant un musée Soulages en mai 2014. Plus de 300 000 visiteurs ont depuis été enregistrés. Entièrement réhabilité, le musée Toulouse Lautrec à Albi (Tarn) est une étape privilégiée des amateurs de peinture. Tout comme les musées Ingres à Montauban (Tarn-et-Garonne), Goya à Castres (Tarn), Henri-Martin à Cahors (Lot). 

En Languedoc-Roussillon, Sète (Hérault) concentre plusieurs institutions aux expositions temporaires réputées dont le musée Paul-Valéry et le Musée international des arts modestes (Miam). Alès (Gard) compte également deux musées actifs : Pierre-André Benoît et du Colombier. Les musées Fleury de Lodève (Hérault) et Hyacinthe Rigaud à Perpignan (Pyrénées-Orientales), deux étapes importantes dans la géographie muséale, font actuellement l’objet de restructurations. 

Si Midi-Pyrénées est bien positionné pour les musées dédiés à la préhistoire (Mas d’Azil, Pech Merle), le Languedoc-Roussillon mise sur les antiquités romaines : deux grands musées archéologiques sont actuellement en chantier à Narbonne (Aude) et à Nîmes (Gard). Enfin, Manuel Valls devrait inaugurer, le 16 octobre, une institution inédite : le Mémorial de Rivesaltes (Pyrénées-Orientales), espace dédié à l’Histoire de l’internement en France. 

Jean-Marie Gavalda (Midi Libre)

A Sète, dans une friche... 

Depuis quelques années, la Ville de Sète est devenue l'un des principaux phares culturels du Languedoc. En particulier grâce à la programmation hivernale de sa Scène nationale (théâtre) et à ses nombreux festivals (Fiest’A Sète, Jazz à Sète, Worldwide, Voix vives en Méditerranée...) qui attirent chaque été des milliers de touristes dans la cité de Brassens. Un engouement pour l’art que la municipalité souhaite développer avec la création d’un immense centre culturel à l’entrée est de la ville. Porté par le maire François Commeinhes, l’Agglo de Sète et un riche mécène, ce projet d’environ 50 M€ sera installé «d’ici deux ou trois ans» en lieu et place d’une immense friche industrielle qui sera réhabilitée par une signature architecturale. « Nous avons eu plus de 120 candidatures parmi lesquelles de grands noms comme Rudy Ricciotti », se félicite le sénateur-maire qui dévoilera bientôt les trois finalistes. Outre de vastes salles d’exposition, le futur pôle regroupera l’actuel Musée international des arts modestes (MIAM) et le Conservatoire de musique de la Ville. Un lieu destiné essentiellement à l’art contemporain.

Une région de création qui aime le théâtre

Il y a plusieurs manières d'apprécier le théâtre à Toulouse : au TNT (Théâtre national de Toulouse), entre grands classiques et talents prometteurs; au théâtre Garonne, infatigable tête chercheuse défendant les nouvelles formes et les propositions renversantes, y compris en matière de danse; à Odyssud-Blagnac, la plus grande salle de la région et l’une des plus fréquentée de France, avec des spectacles ou du nouveau cirque ayant fait leurs preuves ailleurs; ou encore à la Comédie de Toulouse, fief des Chevaliers du Fiel et autres invités drolatiques. Mais Toulouse, ce sont aussi des «lieux» mythiques comme le théâtre Sorano ou la Cave-Poésie... 

En Midi-Pyrénées on compte aussi trois scènes nationales, à Tarbes, Foix et Albi, dont la programmation fait la part belle au spectacle vivant… et innovant. Enfin, au rayon festivals de théâtre, la région se défend bien avec Figeac, Bonaguil, Limoux ou, encore Gavarnie et la cité de Carcassonne

Un rôle d’incubateur

Pour le « Masculin féminin » qu’il met en scène, le codirecteur du TNT, Laurent Pelly, a fait appel aux sept jeunes comédiens de l’Atelier, une structure de formation hébergée par le Théâtre. Joli vivier pour un métier qui ne manque pas de talents locaux! « Par définition, un acteur doit être le plus souple, le plus mobile possible, explique Laurent Pelly. Ils sont nombreux à atteindre un très haut niveau dans la région. Notre Atelier participe au mouvement, qui permet aux jeunes de s’installer, et de monter éventuellement leur propre compagnie ». 

Celle de Solange Oswald et Joël Fesel – le groupe Merci – a été créée il y a 20 ans à Toulouse et connaît aujourd'hui un rayonnement national. Avec moins de 200000 € de subventions par an, la structure emploie à demeure sept acteurs, entretient une salle, assure des créations régulières et des stages de formation. Une démarche qui attire un public d’une fidélité absolue. « On fabrique et on diffuse, explique Solange Oswald, mais nous tenons aussi à notre rôle d’incubateur, d’expérimentateur. Il n’y a rien de pire qu’un art de répétition où ne comptent que le savoir-faire et l’expérience ». 

Adepte des « petites formes » pour des « petites jauges », la troupe, dont le « tube » principal s’appelle « La Mastication des morts » (des morts racontent 100 ans de la vie d’un village), ne cesse d’inventer de nouvelles manières de voir un spectacle. « Notre vocation d’artistes est d’éveiller la curiosité, précise Solange Oswald. Au lieu d’inviter le public dans des lieux confortables, on les mène dans les endroits inattendus où il fait froid, où on est mal assis. 

Ce n’est pas une coquetterie; cela procure d’autres sensations, dans une très grande proximité ». Le groupe Merci, c’est « un peu de provocation, des textes qui disent le malaise de la modernité» et qui poussent le spectateur à « changer de disque dur ». De ville en villages A la tête, avec Marion Vian, de Pronomade(s), labellisé Centre national des arts de la rue, Philippe Saunier-Borrell défend la même idée du théâtre. « On travaille sur ce que beaucoup d’élus ont abandonné ailleurs : le rôle émancipateur essentiel de la culture ». 

Discours particulièrement courageux pour une association, subventionnée à hauteur de 1,3 million d’euros, qui œuvre dans le Comminges, aux pieds des Pyrénées. C’est tout le combat de Pronomade(s) : « Lutter contre la France à deux vitesses alors que le sentiment d’abandon est aujourd’hui aussi fort à la campagne que dans les banlieues ». Rien d’étriqué, d’ultralocal dans cette mission. Au contraire, Philippe Saunier-Borrell voit grand. Il y a quelques jours, il participait à une réunion aux côtés de ceux qui, d’Alès à Capdenac, en passant par Montpellier, partagent une même conception. Tous ravis d’ouvrir leurs fenêtres sur la grande région. « Ce sera plus compliqué en matière de vigilance, de connaissance, d’attention à l’égard des artistes, reconnaît Philippe Saunier-Borrell. Mais cela nous permettra de les accompagner plus loin ». De villes en villages… 

Jean-Marc Le Scouarnec (La Dépêche du Midi)

Le poids du Capitole

Toulouse, et au-delà la région Midi-Pyrénées, bénéficient d'un brillant ambassadeur, l’Orchestre national du Capitole. Michel Plasson l’a relancé en 1968 et en est resté le chef pendant plus de 30 ans. Son successeur, Tugan Sokhiev, bénéficie d’une aura similaire. Reste que ce magnifique paquebot estampillé Toulouse et réunissant 125 musiciens a un coût : 14 millions d’euros par an. 

C’est Toulouse Métropole et la Ville de Toulouse qui financent l’essentiel (74 %), aidés par l’Etat et la Région. La Région Midi-Pyrénées consacre plus de 3 millions d’euros chaque année au théâtre, au cirque et aux arts associés. 

Cette aide concerne les structures, et notamment le Centre dramatique national (TNT), les trois scènes nationales (Albi, Foix et Tarbes) ou encore le théâtre Garonne, labellisé « scène européenne ». 14 festivals subventionnés (sur 120) concernent le théâtre et assimilés. 11 compagnies sont conventionnées et des aides à la création sont également proposées.

5/6. La santé

Le 9 juillet 2015, l'hôpital toulousain de Rangueil fait l’actualité, avec pour la première fois au monde, une greffe du rein réalisée par voie vaginale, avec l’assistance d’un robot. La patiente est... une Perpignanaise de 44 ans, Béatrice Perez. 

Mais cette fois, ce n’était pas le Languedoc-Roussillon qui était à l’honneur. Pourtant, Montpellier, plus vieille faculté de médecine du monde occidental en activité, continue régulièrement à faire la Une de l’actualité, bien après l’époque médiévale des Arnaud de Villeneuve et Gui de Chauliac, Rabelais, Chaptal, jusqu’à Jeanbrau, qui "inventa" la transfusion sanguine sur le front de la guerre de 14-18. 

« Il y a ici le creuset qui permet une certaine inventivité »Jacques Bringer, doyen de la faculté de médecine de Montpellier

Les héros du XXIe siècle, médecins, professeurs, chercheurs au CHU, s’appellent Coubes, Renard, Lemaître, Hamamah, Duffau, Sultan, Jorgensen... Il y a vingt ans, le premier a révolutionné la lutte contre la dystonie en libérant les malades enfermés dans un corps parcouru de douloureuses contractions musculaires grâce à des électrodes fichées dans le cerveau. Le deuxième prend la suite d’une tradition d’excellence dans la lutte contre le diabète, et intègre les premiers patients américains à ses recherches sur le pancréas artificiel. Le biologiste Samir Hamamah repousse sans cesse les limites de l’infertilité. Le neurochirurgien Hugues Duffau forme ses collègues du monde entier à une technique qui lui a valu l’équivalent du Nobel en neurochirurgie, la médaille Herbert Olivecrona, pour l’opération à “cerveau éveillé” qui lui permet d’enlever une tumeur. 

L’endocrinologue pédiatrique Charles Sultan est “la” référence médicale internationale sur l’impact des polluants environnementaux sur le développement des bébés in utero. Quant à Lemaître et Jorgensen, ils écrivent l’histoire de demain : rajeunir une cellule centenaire, et régénérer les cartilages abîmés par des cellules souches. 

Séparément d’abord, à l’institut de génomique fonctionnelle pour Jean-Marc Lemaître, directeur de recherche Inserm, au CHU de Montpellier pour Christian Jorgensen, également directeur de recherche Inserm. Ensemble désormais, au sein de l’institut de médecine régénératrice et de biothérapies (IRBM), inauguré le 27 avril dernier. 

Made in Languedoc 

« Il y a ici le creuset qui permet une certaine inventivité, de l’innovation, du dynamisme », affirme Jacques Bringer, doyen de la faculté de médecine de Montpellier. Il prend justement appui sur la recherche sur la régénération du cartilage : «C’est un projet dont la valeur et le succès s’appuient sur l’association des recherches en thérapie cellulaire, et des travaux sur la réhabilitation à partir de la plateforme Euromov, spécialisée dans le mouvement. Ailleurs, on trouve des compétences identiques. Mais leur association est unique », détaille le doyen, qui précise d’ailleurs que « Toulouse vient de demander de rejoindre le projet ». 

Enfin, il y a en Languedoc-Roussillon « des cohortes » de patients prêts à entrer dans les essais cliniques, comme ceux menés sur le cartilage régénéré. A se prêter à une intervention jamais tentée, comme Béatrice Perez. La touche “made in Languedoc” est même associée à une des plus grandes aventures médicales actuelles : la coque du cœur artificiel Carmat est fabriquée aux portes de Montpellier, à Mauguio, par une PME spécialisée dans les prothèses de hanches et de genoux, Dedienne Santé

Sophie Guiraud (Midi Libre)

Le modèle Nahum

Il a fait ses études à Lyon et au Royaume-Uni, mais c'est à Montpellier que Bertin Nahum, 45 ans, « a fait le choix » de développer Medtech, qui innove depuis 2002 avec ses robots d’assistance à la chirurgie micro-invasive, Rosa. Medtech, 60 salariés, a placé une cinquantaine de machines dans les blocs opératoires du monde entier, 2 400 patients ont été opérés, « pas à Montpellier ni à Toulouse », confie Bertin Nahum, faute de « relations entre donneurs d’ordre publics et PME ». En 2012, Bertin Nahum a été sacré 4e entrepreneur le plus révolutionnaire du monde par la revue canadienne Discovery Series après Steve Jobs, Mark Zuckerberg et James Cameron. Pas moins. Pourquoi a-t-il choisi Montpellier ? 

«Il y avait un écosystème favorable avec des incubateurs d’entreprises, une politique de soutien forte des collectivités locales, une facilité à trouver des talents », y compris s’ils viennent d’ailleurs : « Les gens adhèrent à un projet de vie ici ». 

Montpellier est riche d’autres pépites : Sensorion (acouphènes, surdité), Ciloa (vaccins)... Elles se fondent dans le riche tissu industriel régional de la santé, 685 entreprises, 10 000 salariés, 9,7 Mds€ de chiffre d’affaires, évalue la Direccte. Pour 230 sociétés, 9 500 salariés en Midi-Pyrénées.

On y vient pour un vilain bouton sur la peau, pour des ganglions sous les seins, pour les tumeurs de la gorge ou de la vessie…En tout, 70000 consultations par an, 2 500 patients traités en radiothérapie chaque année, 300lits et la prise en charge par 1 400 professionnels. Et, à deux pas de cet Institut universitaire du cancer, les laboratoires de recherche des groupes Pierre Fabre et Sanofi Aventis.

Il ne faut pas oublier sur le même site, l'Institut des sciences et des industries du Vivant (ITAV Pierre-Potier), qui regroupe les énergies de chercheurs venus du CNRS, de l’université Paul-Sabatier ou de l’Insa, ainsi qu’une pépinière d’entreprises, avec une quinzaine de start-up. L’idée, c’est de voir des chercheurs pratiquement au chevet des malades.Une réalisation unique en France. 

Un lieu d’espoir

Elle avait été lancée fin 2001 par Philippe Douste Blazy, qui était alors maire de Toulouse. C’était après la catastrophe d’AZF, qui avait rayé de la carte cette usine chimique et ravagé un tiers des habitations de la Ville rose… « L’idée était double, explique Philippe Douste-Blazy. D’une part, on ne pouvait pas se contenter à Toulouse d’une mono-industrie ; même si nous sommes leader en matière d’aéronautique, il fallait se diversifier.L’idée était de s’ouvrir aux biotechnologies, aux thérapies du vivant et de faire éclore ici un vivier d’entreprises. La deuxième idée était de rebondir après l’explosion d’AZF qui avait provoqué une ambiance terrible : je ne voulais pas que le site retombe entre les mains des promoteurs, mais devienne un lieu de vie et d’espoir.Non seulement un endroit où l’on accueille les malades et leurs familles, mais aussi les chercheurs du monde entier, dont les recherches puissent bénéficier directement au malade. Le projet est lancé, et j’espère bien que d’ici 30 ans, on aura tordu le cou au crabe ! » 

Un an après son inauguration, le campus a déjà pris une envergure respectable, notamment en immunologie.« Un essor que l’on doit en grande partie à Christophe Cazaux, récemment disparu », tient à préciser Philippe Douste Blazy. L’Oncopole accueille des chercheurs venus du monde entier, à qui on a offert la possibilité de chercher et de s’investir dans le projet.Et ça marche plutôt bien ! Philippe Douste-Blazy est aujourd’hui le président de la Fondation Toulouse Cancer Santé, bras armé financier de l’Oncopole, et celle-ci met beaucoup d’espoir dans le développement de la proton-thérapie, une nouvelle piste qui permet, entre autres, de traiter les tumeurs cérébrales des jeunes enfants. 

« Il faut faire le choix. Toulouse s’impose, parce que non seulement ici, on travaille sur la biologie, mais nous sommes aussi en pointe sur la bio-informatique et les nano-thérapies, trois éléments qui nous rendent très attractifs pour les chercheurs. » 

En matière de proton, Toulouse est également en pointe en ce qui concerne ses applications en matière de défense, et là aussi, c’est ici que les chercheurs se trouvent. Sur les lieux de la vieille usine d’engrais, c’est la matière grise que l’on fait fertiliser. 

Dominique Delpiroux (La Dépêche du Midi)

Il y a 30 ans, les premiers "stents"

Toulouse n'a pas eu besoin d’attendre l’Oncopole pour démontrer son excellence en matière médicale. Ainsi, la chirurgie cardiovasculaire est depuis toujours en pointe dans la Ville rose.Ce sont les Toulousains Christian Rousseau et Jacques Puel qui ont été les premiers au monde, en 1986, à poser des « stents », ces dispositifs destinés à déboucher les artères, technique devenue depuis très courante.

A Rangueil, où le bâtiment H1 est presque entièrement réservé au cœur, on réalise à peu près une greffe cardiaque par semaine.La cardiologie est aussi la spécialité de la clinique Pasteur.

A titre anecdotique, c’est à Toulouse que le MEDES réalise ses expériences de médecine spatiale, notamment les « bedrest » et c’est toujours à Toulouse que le Pr Louis Lareng a inventé le SAMU, « l’hôpital au pied de l’arbre », concept qui a été imité dans le monde entier.



6/6. L'université & la jeunesse

Toulouse 1er, Montpellier 3e. Evidemment, il ne s'agit pas du classement de la Ligue 1... «En 2015, Toulouse fait la course en tête pour la deuxième année consécutive dans le palmarès des villes où il fait bon étudier.Et l’écart se creuse encore avec Grenoble 2e et Montpellier, (3e) », explique Virginie Bertereau, responsable de l’étude annuelle de référence publiée par le magazine l’Etudiant

Intéressant car il ne s’agit pas là seulement d’étalonner la performance universitaire qui place Toulouse à une enviable 3e place en terme d’offre et de qualité de formation, derrière Paris et Lyon (lire cadre ci-contre). L’enquête évalue aussi la qualité de la vie des étudiants et des jeunes au sens large : 36 critères répartis en neuf thèmes (études, logements transports, culture, sorties, etc...), largement de quoi crédibiliser une radioscopie qui place la future grande région Midi-Pyrénées-Languedoc-Roussillon largement en tête de l’attractivité territoriale pour les jeunes. 

Une offre de formation variée et de qualité mais aussi la métropole du bien vivre étudiant

Explications sur les points forts qui justifient le classement côté Toulouse. La métropole prend deux fois la première place sur le thème de l’emploi et des transports. « Sur l’emploi, on évalue le dynamisme de la métropole sur dix ans.Mais également si la métropole, capable de bien former les étudiants, sait les garder sur place ensuite en leur offrant un emploi correspondant à la formation », relève Virginie Bertereau. 

Toulouse sait apparemment mieux valoriser sur place la plus value humaine et technique de ses étudiants, mais elle sait aussi les transporter : « Il y a une politique de transport à Toulouse qu’on ne trouve nulle part pas ailleurs.Les étudiants peuvent circuler pour 100 euros par an, soit trois fois moins cher qu’à paris ! » 

Troisième rang donc pour l’offre et la qualité de formation « avec un solde migratoire étudiant très positif sur dix ans » commente le magazine, la population étudiante a augmenté de 8,3 % en 10 ans ».Sans compter le rayonnement des dix pôles universitaires en région. 

La métropole se retrouve ensuite deux fois 4e. D’abord sur le thème du rayonnement international, avec nombre d’établissements et de grandes écoles « visibles ».14 % des étudiants toulousains sont étrangers. Même place sur le thème de l’environnement qui compile des critères aussi variés que l’ensoleillement, la qualité de l’air (ce qui peut surprendre, sourit Virginie Bertereau, compte tenu de son image de ville encombrée, par la circulation) ou encore les dispositifs de location de vélo. 

Enfin, dernier point fort identifié par l’enquête de l’Etudiant, la culture, les équipements accessibles aux jeunes (devancée toutefois par Paris, Lyon, Bordeaux et Aix-Marseille). Mais le meilleur élève de la classe, selon l’Etudiant, peut encore faire des efforts. 

Notamment (mais oui !) dans le domaine... des sorties, thème sur lequel Toulouse stagne à la 23e place comme l’an dernier, ce qui ne manquera pas d’étonner tous ceux qui étudient essentiellement dans les bars à tapas et les établissements de nuit. 

Plus sérieusement, le sujet sensible du logement, qualifié de « gros point faible » par l’Etudiant,. Toulouse arrive péniblement à la 27e place : « En cause, la cherté des loyers mais également le manque de chambres universitaires.On compte seulement 9 chambres pour 100 étudiants », explique Virginie Bretereau. Un grand chantier - à tous les sens du terme- à venir pour conforter la première place de « la ville où il fait bon étudier ». 

Daniel Hourquebie (La Dépêche du Midi)

A la recherche de l'excellence

« L’université fédérale cultive l’excellence autant dans le domaine de la formation que dans celui de la recherche », se réjouit Marie-France Barthet, sa présidente, qui cite l’attractivité de l’ensemble, les établissements toulousains bien sûr mais également les 10 pôles universitaires en région (Albi, Tarbes...), qui rassemblent au total plus de 110 000 étudiants : « Et le rectorat nous en annonce 15 000 de plus dans les deux ans qui viennent », complète la Présidente. 

Ces nouveaux venus pourront notamment bénéficier d’un nouvel atout dans leur orientation : « Nous avons des formations dans tous les secteurs avec des leaders dans l’ingénierie, les grandes écoles et les trois grandes universités, explique Marie-France Barthet.C’est un atout, mais il fallait absolument établir une cartographie de ces formations.Cet outil précieux a été mis en ligne cet été ». 

Quant à la recherche, elle mobilise 9 300 personnes dans toutes les disciplines avec de nombreux pôles d’excellence et des figures « visibles », comme Jean Tirole, prix Nobel d’économie ou encore... Mercator Océan, produit de la filière d’excellence toulousaine, choisi pour observer les océans de la planète...

Un doux parfum de café s'échappe d’une tasse encore pleine. Marlène, absorbée par ses feuillets, n’y a pas encore trempé les lèvres. Il est bientôt 15 heures. L’étudiante en licence d’histoire de l’art à l’université Paul-Valéry de Montpellier ne s’est pas levée ce matin. Alors attablée en terrasse dans une brasserie, elle recopie les notes de Louise, une de ses camarades qui, elle, a assisté aux cours. « Je suis assidue en principe. J’ai fait une exception à la règle. Hier, j’étais à une soirée et je me suis couchée très tard… ou très tôt… ». Elle sourit. Les opportunités de sorties, et la tentation en découlant, sont grandes à Montpellier où la jeune femme, venue de Quimper, a choisi de suivre ses études. 

Diversité des branches

« Il y a toujours de quoi faire. Et puis, c’est incroyable, nous sommes en octobre et on peut encore siroter un verre à l’extérieur. Pareil au printemps quand on révise. On peut projeter des sessions à la mer. » Rien à voir avec sa Bretagne natale. 

« Côté climat, on est moins gâtés ». Montpellier, Marlène en rêvait. Elle aurait très bien pu rester près des siens. « Mon père a été compréhensif quand j’ai exprimé le souhait de venir ici. Il y a fait médecine. Il en a gardé un excellent souvenir. » Pour Marine, qui passe cette année le concours d’hôtesse de l’air, et a déjà en poche un BTS tourisme, Montpellier est LA ville où il fait bon vivre. Et pourtant, elle en a vu du pays ! « J’y suis toujours revenue. J’ai fait Madrid, Lille, Marseille, Shanghai… L’ambiance d’ici, on ne la trouve nulle part ailleurs. » 

Le capital sympathie des gens retient son attention. Ainsi que la diversité des branches ouvertes aux études, « sans compter que les quatre coins de la métropole sont bien desservis. Il y a des parcs un peu partout, des événements qui nous permettent de nous retrouver lorsque l’on a besoin d’un conseil, de lier des contacts. Tout est mis en place pour nous éviter de galérer ». 

Léo a atterri à Montpellier alors qu’il s’apprêtait à entrer en maternelle. Puis, après sa quatrième, il a suivi ses parents mutés en région parisienne. « Ma mère y enseigne encore. Quand j’ai obtenu mon bac, je me suis inscrit à la fac à Montpellier. Pas à Paris. Ça coulait de source. » Ses parents n’y ont vu aucun inconvénient. D’autant qu’ils ont acquis une résidence à Juvignac, non loin de la capitale héraultaise, où ils comptent passer leur retraite. « Étudier à Montpellier ? C’était une évidence », explique Ophélie, étudiante en école de commerce. « J’habite à Calvisson, dans le Gard. La région a mis en place, pour 72 €, une carte regroupant tram-bus-TER. Je peux rester chez mes parents sans frais de logement supplémentaires. » 

Méditerranéenne, rayonnante 

Toulouse ou Montpellier ? Le cœur de Florent n’a pas hésité longtemps. Ce Carcassonnais de 23 ans, doctorant et chargé d’enseignements en droit, a préféré mettre le cap sur la 8e commune de France plutôt que sur la Ville rose, pourtant plus proche géographiquement. « Les facs sont plus intimistes, les infrastructures récentes. On sent une émulation. » 

La capitale de Midi-Pyrénées est, selon lui, « terrienne, rurale, centrée sur elle-même ». Celle du Languedoc-Roussillon « méditerranéenne, rayonnante ». Un état d’esprit dans lequel il se reconnaît pleinement. « Montpellier, qui brasse des étudiants d’origines diverses, a moins d"identité" que Toulouse. Or, c’est ce qui fait aussi sa richesse. » Toutefois, l’étudiant en droit a conscience qu’il faudra certainement en partir, parce que « Montpellier est moins attractive que Toulouse en termes d’emplois ». Ce ne sera pas sans regret. 

Patricia Guipponi (Midi Libre)

Carte d'identité

Montpellier a été élue troisième dans le peloton des villes où il fait bon étudier par le magazine L’Étudiant. La métropole se situe juste derrière Toulouse, qui caracole à la première place. À noter que Montpellier est considérée comme la deuxième ville la plus dynamique en terme d’emploi sur dix ans. En revanche, elle ne brille pas dans le domaine des loyers jugés élevés (36e). On recense un peu plus de 103 451 étudiants inscrits dans les établissements supérieurs de l’académie de Montpellier. Les pôles urbains principaux qui les accueillent sont Montpellier (où se concentrent la majorité des établissements et des étudiants), Nîmes, Perpignan, Béziers et Narbonne. Les étudiants se répartissent comme suit : 14 140 éléments en classe post-baccalauréat ; 72 999 en enseignement supérieur universitaire et 16 312 en enseignement supérieur non universitaire. L’académie de Montpellier dispose sur son territoire de 4 universités, 1 école supérieure du professorat et de l’éducation, 4 écoles d’ingénieurs non universitaires, 29 écoles de formation sanitaire et sociale, 9 écoles de commerce, 10 écoles d’architecture, artistiques et culturelles, 36 autres écoles d’enseignement supérieur, 1 enseignement de théologie.

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Long format réalisé par La Dépêche du Midi et Midi Libre

Rédacteurs en chef : Jean-Claude Souléry (La Dépêche) et Philippe Palat (Midi Libre) | Textes : Pierre Challier, Gil Bousquet, Jean-Marc Le Scouarnec, Dominique Delpiroux, Daniel Hourquebie (La Dépêche du Midi) ; Olivier Schlama, Christophe Greuet, Arnaud Boucomont, Jean-Marie Gavalda, Sophie Guiraud (Midi Libre) | Photos : Xavier de Fenoyl, Andy Barrejot, Nedir Debbiche (La Dépêche du Midi) ; Christophe Fortin, M. Esdourrubailh (Midi Libre) | Mise en forme : Philippe Rioux (La Dépêche du Midi). - Octobre 2015.