Route du sud

La classique du sud-ouest


Créée en 1977, la Route du Sud-La Dépêche du Midi est devenue au fil des années une classique du cyclisme. Conçue comme un prologue, une antichambre du Tour de France, la course fête ses 40 ans cette année. De coureurs emblématiques en étapes mythiques, en passant par des diverses évolutions au fil des années, découvrez l'histoire de cette épreuve par laquelle sont passés les plus grands.

Textes : Patrick Louis

Réalisation : Marine Couturier, Guilhem De Grenier, Tom Vergez

Comment est née la Route du Sud ?

Esclassan, Poulidor et Hinault défrichent la route

En cette fin d'hiver 1977, Jacques Esclassan ne saute pas de joie à l'approche de la naissance du Tour du Tarn. Le sprinteur de l'équipe Peugeot a pourtant œuvré, avec les dirigeants du Vélo Sport Léo-Lagrange de Castres à la naissance de cette épreuve dans sa région, une région qui fait plutôt la part belle au cyclisme amateur et se contente du passage du Tour de France. Au départ, Francis Auriac, le « père » de la Route du Sud à la tête d'un groupe de passionnés, avait organisé un simple critérium, et puis, l'idée d'un Tour du département fait son chemin... Avec le concours des « Caisses d'Epargne de Castres et du Tarn », l'aventure est lancée.

Les dirigeants ont choisi une date assez tôt dans la saison, et se contentent pour débuter de la participation des formations françaises. La Peugeot de Jacques Esclassan et Bernard Thévenet, qui va déclarer forfait au dernier moment, semble la mieux armée, même si le vieux Poulidor (40 ans à l'époque... 80 aujourd'hui) à la tête des Miko-Mercier, et le jeune Bernard Hinault, grand espoir de Gitane (il va gagner dans les semaines suivantes Gand-Wevelgem puis Liège-Bastogne-Liège !) présentent des arguments très convenables.

Seznec, sosie de Jacques Brel

Les trois grosses écuries vont se partager le butin avec Esclassan et Jean-Louis Danguillaume vainqueurs d'étapes pour Peugeot, Roland Berland pour Gitane et Christian Seznec pour Mercier. Le mauvais temps va cependant inciter les organisateurs à éviter les Monts de Lacaune au grand dam de « Poupou » qui espérait faire chuter Esclassan. Le Tarnais s'impose dès la première étape entre Castres et Albi, les Gitane répondent le lendemain avec Roland Berland, puis Jean-Louis Danguillaume dépose un nouveau bouquet dans la corbeille des « lionceaux » et Christian Seznec, sosie de Jacques Brel (pour Mercier) referme le premier chapitre lors de la dernière étape. Une belle aventure vient de démarrer…

La frontière tarnaise explose

« Nous avons continué trois ans de plus sur les routes du Tarn racontait le regretté Francis Auriac, mais nous pensions déjà élargir notre terrain de jeu... » Après Jacques Esclassan, le Girondin Pierre-Raymond Villemiane (Renault), le Nantais Yvon Bertin (Renault) et le Béarnais Gilbert Duclos-Lassalle (Peugeot) s'imposent.

En 1980 lors de la dernière édition « départementale », on note la première victoire d'un étranger, le très élégant allemand Didi Thurau, qui devance à Castres l'inévitable Duclos-Lassalle et le Lourdais Hubert Arbes. Dès l'année suivante, la frontière tarno-aveyronnaise « explose », le Tour du Tarn et du Rouergue accueille des groupes étrangers, les Boule d'or de Freddy Maertens, les Teka de Marino Lejaretta (vainqueur à Castres) animent cette unique édition bi-départementale avant le passage au Tour Midi-Pyrénées dès le printemps 1982.

Un dernier mot qui devrait laisser rêveur Guy Bergeaud chargé du délicat dossier de l'hébergement sur la « Route du Sud-La Dépêche du Midi » d'aujourd'hui, lors de la toute première édition, les coureurs étaient ravis de loger dans les dortoirs flambants neufs du lycée de la Borde Basse à Castres ! Il n'était alors évidemment pas question d'étoiles...

La course des deux mers et les incursions en Espagne

En juin 1987, le chapitre « Tour Midi-Pyrénées » se referme sur un exploit de Régis Clère. Le paysan du plateau de Langres, ancien champion de France, épatant dans les Pyrénées et vainqueur solitaire au sommet de Luz-Ardiden s'impose devant Eric Boyer, Gilles Mas, Yvon Madiot et Pascal Simon. Cette année là, les organisateurs ont obtenu leur « déménagement » du mois de mars au mois de juin. Dès le millésime suivant, l'épreuve créée par le Vélo Sport Léo-Lagrange de Castres devient la « Route du Sud ».

Pour la première fois, après l'entrée en montagne en 1983, la course découvre le bord de mer avec un prologue à Leucate. Malgré l'inévitable Duclos-Lassalle, Laurent Fignon verrouille l’épreuve. Après cinq jours intenses, Ronan Pensec endosse le dernier maillot de leader à Mérignac aux portes de l'Atlantique. Francis Auriac le père du Tour du Tarn rêvait d'une « course des deux mers », à l'image de la Tirreno-Adriatico qui ouvre chaque année la saison italienne. Il va concrétiser cette envie dès 1989 avec un beau voyage entre Biarritz et Port-Leucate.

Dernières vagues à Arcachon

Par la suite, la Route du Sud se dispute de nouveau entre Leucate et Mérignac en 1990 (succès d'Yves Bonnamour), entre Mérignac et Castres en 1991 où Laurent Dufaux a mis à profit l'étape espagnole pour se défaire de l'Aveyronnais d'adoption et Blagnacais de cœur, Philippe Louviot. Enfin, en 1992, la course relie Arcachon et Castres. Lors de cette ultime visite « à la plage », Arturas Kasputis fait entrer la Lituanie sur la carte de la Route. Le coureur termine en tête après un festival de Marcel Wüst vainqueur de quatre des six étapes, un record. Le sprinteur allemand va jusqu'à ruiner les espoirs de Christian Chaubet, battu lors de la dernière étape, chez lui ou presque, à Castres.

Sur les routes du défunt Midi-Libre

Recentrée par la suite sur les Pyrénées, la Route délaisse le littoral. Elle s'en rapproche en 2007 avec le sprint maîtrisé de Jean-Patrick Nazon à Narbonne, puis lors de l’édition 2017 avec un grand départ de Villeveyrac, juste au-dessus de l'étang de Thau.

Il avait été question de départ à Agde mais aussi de Mont Saint-Clair, le rachat des journaux du Midi par le groupe « La Dépêche » pourrait à l'avenir changer les contours du circuit. La disparition du « Grand Prix du Midi-Libre » (il y a quinze ans déjà sur une victoire de... Lance Armstrong) a laissé un grand vide dans la région Languedoc-Roussillon, devenue Occitanie. La « Route du Sud-La Dépêche du Midi » pourrait y découvrir un nouveau terrain de jeu, même si elle semble plus que jamais attachée à ses Pyrénées.

De l'autre côté de la frontière... quand l'Espagne pousse un peu sa corne

En ce mois de juin 1991, Richard Virenque n'est pas encore le chouchou de la France sportive. Sous le maillot de RMO (L'emblématique Marc Braillon l'avait imposé au directeur sportif Bernard Vallet), le jeune Varois a déjà terminé deuxième du Trophée des Grimpeurs mais reste un apprenti dans le peloton. La cinquième étape de la Route du Sud emprunte les cols de Menté et du Portillon avant de s'achever en Espagne, à Vielha. L'Espagnol Carlos Galarreta et le Suisse Laurent Dufaux font « sauter » Philippe Louviot et se partagent le gâteau dans le Val d'Aran : à Galarreta l'étape, à Dufaux le maillot.

A Vielha, Richard Virenque termine juste derrière eux il sera septième au final à Castres... Retour du peloton sudiste aux sources de la Garonne en 2004 avec un bouquet coupé au sprint par l'Italien Christian Moreni puis un départ de Lès vers Saint-Gaudens où Francis Mourey, grand spécialiste du cyclo-cross, obtient son premier succès sur la route.

En 2005, après un long numéro d’Alexandre Botcharov, le plus Pyrénéen des Russes, Patrice Halgand se hisse en tête au pied des pistes de la station de Baqueira-Beret « Nauth-Aran », fréquentée par la Vuelta. Sandy Casar ne perd pas les pédales au lendemain du contre la montre entre Montréjeau et Lannemezan enlevé par Didier Rous. Le Francilien succède à l'Australien Bradley McGee, contenant un fidèle de l'épreuve, et futur vainqueur, le Polonais Przemyslaw Niemiec. Deux ans plus tard, dernière visite derrière la frontière avec l'étape finale partie une nouvelle fois de Lès à destination de Saint-Gaudens, pour le plus grand bonheur du Nivernais Frédéric Finot.

Francis Auriac, le père de la Route

La mauvaise nouvelle est tombée à la veille de l'arrivée du Paris-Nice 2016. Francis Auriac ne verrait pas les 40 ans de « sa » course. Fondateur du Tour du Tarn, devenu en 1981 Tour du Tarn et du Rouergue, puis Tour Midi-Pyrénées, Route du Sud, puisRoute du Sud-La Dépêche du Midi, il disparaissait après de longs mois marqués par de lourds problèmes de santé, notamment cardiaques.

Il avait dirigé sa dernière épreuve en 2006, laissant le fauteuil directorial à André Masse mais continuait à accompagner l'épreuve de sa vie, comme à Auch en 2015. «Au début, il avait organisé un critérium pour Jacques Esclassan, se souvient François Amalric, un de ses lieutenants historiques. Et puis il y a eu l'idée du Tour du Tarn et c'est parti…»

Francis Auriac adorait le vélo mais il s'est d'abord tourné vers le rugby. « Mon père trouvait que le cyclisme pouvait perturber mes études alors je suis parti trois-quarts aile à Graulhet... » Marié à Jeanine, Francis était père de quatre enfants, Richard, Sylvie, Nathalie et Jean.

Après avoir eu des responsabilités à la Poste, il est devenu un «pro» de l'organisation, ami du patron du Tour de France Jean-Marie Leblanc, puis de son successeur Christian Prudhomme. C'est d'ailleurs Francis qui lui avait présenté Gilles Maignan, ce Tarnais d'adoption, pilote de la voiture rouge directoriale sur la Grande Boucle, devenu complice de l'ancien journaliste.

Pierre Caubin, désormais à la tête de la « Route du Sud-La Dépêche du Midi » très proche lui aussi, a décidé depuis que tous les maillots de leaders porteraient les initiales F.A en hommage au « père » de l'épreuve.

Ils ont marqué la Route du Sud de leur empreinte

Les sprinteurs

ESCLASSAN ET SES HÉRITIERS

Avec Jacques Esclassan comme vainqueur inaugural, la Route du Sud était née pour accueillir au fil des ans les meilleurs sprinteurs du monde. Malgré la très haute présence pyrénéenne sur le parcours, les artistes du dernier kilomètres ont tous ou presque rejoint sans se faire prier le rendez vous de mars (à l'origine), puis de juin.

Cinq d'entre eux ont levé les bras sur la Route et enlevé le maillot vert au cours de leur carrière. Jacques Esclassan bien sûr (1977), Erik Zabel (de 1996 à 2001), Robbie Mc Ewen (2002 et 2006), Alessandro Petacchi (2010) et Bernard Hinault (1979) parfois très inspiré par la discipline et victorieux au sprint à Colomiers en 1983.


Frédéric Moncassin, le merveilleux acrobate toulousain, a même gagné la première de ses trois victoires, à Castres, en 1989. A ce moment-là, il n'était pas encore professionnel !

Wüst : Monsieur Marcel

Ancien vainqueur du Paris-Roubaix amateur (comme Christian Chaubet et Frédéric Moncassin), Franck Boucanville ne peut pas aimer Marcel Wüst. Le sprinteur de Cologne l'a privé de... trois victoires d'étapes sur la Route du Sud. 

Gueule de jeune premier, sourire ravageur, cinq langues parlées et une pointe de vitesse exceptionnelle, le sprinteur de Cologne n'est pas souvent évoqué lorsque l'on évoque le panthéon des meilleurs finisseurs de l'histoire. Il s'est pourtant imposé sur les trois Grands Tours (une étape en France, une en Italie et... douze en Espagne !) et il pourrait rester pour longtemps encore le recordman des succès sur la Route du Sud. Sept au total, quatre sur la seule édition 1992, « Monsieur Marcel » a marqué l'épreuve par sa vélocité et son charme.

Il est ensuite devenu consultant pour le groupe de télévision allemande ARD. Gilbert Duclos-Lassalle le suit avec cinq bouquets, Castaing et Coquard avec quatre. Mais le Nantais qui n'est qu'au début de sa carrière, deux fois vainqueur à chacune de ses deux premières participations, peut rêver de rejoindre Wüst et même de le dépasser.

CES COUREURS QUI ONT FAIT L'HISTOIRE DE LA ROUTE DU SUD

Avec les trois victoires de Nairo Quintana (2012-2016) et Alberto Contador (2015) sur les cinq dernières éditions, le palmarès de la « Route du Sud-La Dépêche du Midi » a pris du poids. Avant le succès de l'Espagnol au terme d'une mémorable bagarre avec Quintana et le jeune espoir français d'AG2R la Mondiale Pierre Latour dans le Port de Balès, un seul vainqueur du Tour de France avait réussi, depuis la création de l'épreuve, à ramener aussi le maillot corail de leader : Stephen Roche en 1985.

Les spécialistes de juillet ont souvent été acteurs sans pouvoir, ou vouloir, terminer en tête du général. On retrouve ainsi Bernard Hinault dauphin de Jacques Esclassan dès 1977 sur le Tour du Tarn, Laurent Fignon deuxième derrière Roche en 1985 (mais aussi vainqueur de deux prologues, à Cahors cette même année puis à Leucate en 1988) ou encore l'Américain Greg LeMond (3e de l'unique Tour du Tarn et du Rouergue en 1981 derrière Jean-René Bernaudeau et Marc Madiot).

Les années Voeckler

Il faut évidemment citer Thomas Voeckler, très attaché au rendez-vous sudiste, deux fois premier (en 2006 et 2013) et triple vainqueur d'étape (Loudenvielle 2004, Castres 2006 et Bagnères-de-Luchon 2013) « Ti-Blanc » a régulièrement choisi le décor de Midi-Pyrénées à l'approche du championnat de France et du Tour, ce qui ne lui a pas trop mal réussi.

Laurent Jalabert « l'autre Tarnais » du livre d'or inauguré par Esclassan, figure aussi parmi les « grands ». Il s'est imposé comme prévu en 1996, mais avec cinq secondes seulement d'avance sur l'Italien Giuseppe Guerini vainqueur au Plateau de Beille. Le Mazamétain battu par son « ami » Moncassin à Saint-Gaudens puis par Guerini dans la station ariégeoise n'a pu s'imposer en cours de route, il ne compte d'ailleurs aucun succès sur « ses » routes. Il faut préciser qu'en dehors de son début de carrière chez Toshiba, il n'a eu l'occasion de revenir qu'une seule fois, la bonne, en 1996 sous les couleurs de la Once.

Un campionissimo brille aussi sur la liste : Francesco Moser. Lui a choisi au printemps 1982 le rendez-vous pyrénéen (sans cols à l'époque) pour préparer son Paris-Roubaix. Sa victoire dans le prologue de Castres lui a assuré le succès final, son gregario Giovanni Mantovani s'imposant sur les deux dernières journées à Tarbes et Toulouse.

Duclos Lassalle, le seul à avoir gagné la course sous ses trois appellations principales

Autre spécialiste de l'Enfer du Nord très à l'aise en Occitanie, Gilbert Duclos-Lassalle. Le Béarnais restera à jamais le seul coureur vainqueur sous les trois appellations principales, Tour du Tarn, Tour Midi-Pyrénées, et Route du Sud. Tout jeune, en 1980, son mini prologue explosif dans les rues de Castres (1'31''9 sur 1,2 kilomètre) et ses trois deuxièmes places consécutives en suivant (derrière Villemiane à Albi, Hinault encore à Albi et Thurau à Castres) lui ont permis de rester leader de bout en bout. Quatre ans plus tard, le prologue est plus long (2,6 km) mais toujours à Castres. « Gibus » va plus vite que Bernaudeau et Michaud, il limite la casse dans le col de Menté puis à Saint-Gaudens face à Mottet, qu'il devance au final de sept secondes.

Son troisième titre, il le décroche à Leucate, en 1989, sous le maillot Z-Peugeot, malgré son compagnon d'écurie Eric Boyer et le Colombien Montoya. Deuxième à Saint-Girons, Duclos ne lève pas les bras de la semaine mais empoche le général. Bien plus tard, il gagnera une cinquième étape à Lavaur, en 1994.

La famille Roche

Francis Auriac aimait le répéter, la Route du Sud, c'est une famille. Chez les Roche, on a pris la formule à la lettre. En 1985 lors d'une inoubliable semaine au cours de laquelle les coureurs ont été invités pour la première fois à une arrivée au sommet, à Guzet-Neige, Stephen domine ses anciens équipiers de chez Peugeot, Pascal Simon l'éblouissant vainqueur du printemps précédent, et Robert Millar qui avait gagné là-haut sept mois plus tôt sur le Tour de France.

L'Irlandais ne sera plus inquiété jusqu'à Rodez. Ce neuvième épisode avait connu un départ exceptionnel à Cahors sur un boulevard Gambetta noir de monde. Le prologue avait souri à Laurent Fignon qui avait parcouru la distance en une seconde de moins que les spécialistes Miguel Indurain et Thierry Marie.

En 2008, la première étape va provoquer une des plus grosses colères de l'organisateur, Francis Auriac, pourtant réputé pour s'énerver au micro et au volant de sa voiture directoriale. Ce jour-là, entre Lusignan-Petit dans le Lot-et-Garonne et Boulogne-sur-Gesse en Comminges, un groupe de dix-sept hommes se forme à l'avant. Toutes les équipes ou presque sont représentées et derrière, personne ne veut rouler. À l'arrivée, Simon Gerrans gagne avec près de...trente-sept minutes d'avance sur la tête du peloton ! Parmi les dix-sept, la silhouette frêle et encore méconnue de Dan Martin, jeune espoir irlandais de la Garmin. Martin joue placé dans le contre la montre de Cauterets-Cambasque, il assure dans la montée de Superbagnères et s'impose tranquillement. Signe particulier, il est le neveu de... Stephen Roche.

La belle histoire n'est pas finie. Le 20 juin, la Route du Sud-La Dépêche du Midi, écourtée et disputée sur trois jours après la défection d'une municipalité, s'élance de Lectoure dans le Gers. Sous le soleil, Nicolas Roche (fils de Stephen et cousin de Dan Martin) surveille les Movistar en force autour d'Alejandro Valverde. Il finit au pied du podium sur l'arrivée inédite de Payolle. Le lendemain, il devance Michael Rogers, l'Australien, qui porte comme lui les couleurs de Tinkoff-Saxo, et Valverde en personne. Le plus dur est fait, il inscrit à son tour la Route du Sud sur sa carte de visite. A l'arrivée quand on lui demande s'il avait programmé cette « réunion de famille », il nous a simplement dit qu'il n'était pas au courant pour Stephen et Dan !

TOUR DE FRANCE ET ROUTE DU SUD : ILS ONT GAGNÉ SUR LES DEUX COURSES

Remporter la Route du Sud et le Tour de France n'est pas chose aisée. Depuis la création de l'épreuve en 1977, seuls deux coureurs ont inscrit les deux courses à leur palmarès : Stephen Roche et Alberto Contador. En revanche, ils sont beaucoup plus nombreux à avoir remporté au moins une étape sur chacune des deux courses.

Qu'ils soient sprinteurs, rouleurs ou grimpeurs, ils sont une vingtaine à avoir au moins une fois levé les bras sur une ligne d'arrivée de la Route du Sud et du Tour de France. Nous en avons sélectionné sept, dont Robbie McEwen qui a réussi ce doublé la même année.

La montagne : sous le signe des Pyrénées

Le baptême du Menté

Le 31 mars 1983 marque la première incursion du Tour Midi-Pyrénées dans la montagne. La vraie. Ce jour là, il n'est plus question des côtes habituelles des contreforts pyrénéens mais d'un vrai col, le Menté, célèbre depuis le Tour de France 1971. Cette année là, sous un orage d'apocalypse, Luis Ocaña, maillot jaune, avait abandonné après une chute dans la descente vers Saint-Béat.

Leader depuis le prologue de Castres, Gilbert Duclos-Lassalle semble menacé par cette difficulté, plantée avant l'arrivée à Saint-Gaudens, mais il va tenir le coup jusqu'au sommet enneigé, malgré les efforts de Charly Mottet « encouragé » par Bernard Hinault et Jérôme Simon. Troisième de l'étape enlevée par le jeune Drômois, Duclos sauve son maillot. Le lendemain, à Colomiers, Hinault ruine au sprint les espoirs du Toulousain Dominique Sanders. Le Béarnais s'impose pour la deuxième fois après sa victoire dans le Tour du Tarn 1980.

Les Pyrénées deviennent incontournables

Après le baptême du Menté, plus rien ne sera comme avant. Au fil des ans, le Tour Midi-Pyrénées puis la Route du Sud-La Dépêche du Midi vont se jouer pratiquement chaque année sur les sommets. Pascal Simon dès 1984 (à Capvern par delà le Portet d'Aspet et le Menté encore) puis Stephen Roche en 1985 lors de la toute première arrivée en altitude à Guzet-Neige, profitent des difficultés pour dessiner leurs succès.

Latrape, Aspin, Peyresourde, Portillon, Luz Ardiden (avec un incroyable récital du Haut-Marnais Régis Clère en 1987 pour la première édition déplacée au mois de juin), Cauterets, le Plateau de Beille (sept arrivées souvent décisives entre 1995 et 2001, avec notamment la victoire d'Armstrong en 1999, quelques semaines avant son premier succès dans le Tour), Ax 3 Domaines, le Port de Balès, le Pla de Beret, les Monts d'Olmes, Suberbagnères, Peyragudes, Arras-en-Lavedan, Payolle, Val-Louron, Couraduque... Désormais, il faut savoir grimper pour espérer gagner. 

Depuis 1993, seules quatre éditions n'ont pas connu de final en montée, 2004, 2009, 2013 et 2015. Mais pour les trois dernières, la ligne était tracée à Luchon, juste après le Balès...

Les sudistes, éclaireurs du Tour

Régulièrement, la Route du Sud-La Dépêche du Midi défriche la route du Tour de France. Jean-Marie Leblanc puis Christian Prudhomme, les patrons du Tour, sont très liés avec Francis Auriac. Ils ont souvent profité de l'épreuve pour des tests grandeur nature en vue du Tour. Cauterets (1988), le Plateau de Beille (1995), Peyragudes (2000), le Port de Balès (2003), le Pla de Beret (2005), Payolle (2014) ont tous été repris par la Grande Boucle. Couraduque attend son...Tour.

5 étapes de montagne emblématiques

En 40 ans et près de 200 étapes, la Route du Sud a offert aux amateurs de cyclisme quelques belles tranches d'histoire. Des premiers jours du Tour du Tarn à Contador et Quintana, les plus grands sont venus y affronter les Pyrénées. Retour sur cinq journées mémorables.

La place de la Route dans les médias

Noir et blanc

Des années durant, le cyclisme à la télévision se résumait aux retransmissions du Tour de France (direct de l'étape sur les 50 derniers kilomètres et résumé en début de soirée), de Paris-Roubaix, des championnats de France et du monde. Pour les autres épreuves, il fallait accepter de patienter en surveillant sur la « 3 » pour l'arrivée des maillots à damier de Peugeot ou les tuniques rayées de Renault. Se battre pour revoir l'arrivée du jour, les échappés ou la prise de pouvoir d'un nouveau leader. Quelques minutes de direct sur l'édition Midi-Pyrénées, la voix de Roger Surjus sur les podiums du début, les derniers mètres d'un sprint...

A ses débuts, le Tour Midi-Pyrénées (pour le Tour du Tarn, il fallait se contenter d'un résumé squelettique mais très apprécié à l'époque) n'était pas escorté par la forêt de caméras qui permet aujourd'hui de suivre la course dans le monde entier.

Eurosport à l'assaut de la planète

Après les années « Polaire Production » orchestrées par André Martres, ancien de
France 3, ami de l'épreuve et futur patron du Tour Méditerranéen, l'arrivée d'Eurosport a tout changé. La chaîne, qui diffuse sur Eurosport 2 chaque étape en direct, a élargi de façon spectaculaire la couverture de l'épreuve.

L'arrivée d'Eurosport a été parfaitement servie ces dernières années par les formidables démonstrations de Nairo Quintana et Alberto Contador. Des monuments de la Grande Boucle comme le Tourmalet, le Port de Balès, Peyresourde ou Azet rendent visibles les Pyrénées, de Barousse en Bigorre, dans des dizaines de pays à quelques jours du départ du Tour de France.

L'idée de Francis Auriac, le changement de date, prend à présent toute sa signification puisque la Route du Sud – La Dépêche du Midi reste aujourd'hui l'ultime course à étapes avant les championnats nationaux et la Grande Boucle.

La Dépêche du Midi dans le peloton 

Même si de nombreux supports l'oublient systématiquement, la Route du Sud est devenue la « Route du Sud-La Dépêche du Midi ». C'est bien son nom sur les tablettes de l'Union Cycliste Internationale. Avec l'appui de Bernard Maffre puis d'Eric Laffont, Francis Auriac, son successeur André Masse et enfin Pierre Caubin qui dirige aujourd'hui l'épreuve, la course occitane bénéficie du support du grand quotidien régional. Un support très officiel et bien visible aujourd'hui mais une présence fidèle et précieuse depuis la naissance du Tour du Tarn en 1977.

La course bénéficie ainsi d'une couverture médiatique importante dans les colonnes du journal. En 2016, pour la quarantième édition de l'épreuve, on comptait au minimum une double-page du quotidien consacrée à la course et à l'analyse de l'étape de la veille. Et ce alors que l'actualité sportive était trustée par l'Euro 2016 qui battait son plein dans l'Hexagone et à Toulouse.

Édition 2017 : le quarantième anniversaire

La 41e édition de la Route du Sud-La Dépêche du Midi va se disputer sur 672,9 kilomètres découpés en quatre étapes. Contrairement à 2016, pas de contre-la-montre, mais une étape accidentée d'entrée et la traditionnelle journée du samedi dans les Pyrénées qui devrait dessiner la hiérarchie finale.

Etape 1 : un départ inédit

Sur le papier on pourrait penser que ce parcours devrait être favorable aux sprinteurs, mais ils risquent d'être surpris par le final plutôt tourmenté. Partis de Villeveyrac lors d'un départ inédit, les coureurs vont se frotter aux contreforts de la Montagne Noire. 3000 m de dénivelé, pas un mètre de plat à l'approche de Saint-Pons et peut-être, déjà, une première sélection...

Etape 2 : les sprinteurs invités

Cette fois, si leurs équipiers restent attentifs, les finisseurs devraient se retrouver pour se disputer le deuxième bouquet 2017. Pour Stéphane Poulhiès le régional de l'étape, Bryan Coquard et leurs camarades spécialistes de la dernière ligne droite, une vraie occasion de briller.

Etape 3 : le Tourmalet mais pas seulement

Voilà la traditionnelle étape de montagne, celle qui doit décider du vainqueur comme chaque année ou presque. Les rescapés vont se frotter au Tourmalet. Après la descente du géant, à Luz Saint-Sauveur, les coureurs prendront la direction de Pierrefitte-Nestalas pour emprunter la montée de Viscos qui les conduira à un kilomètre du sommet de Luz-Ardiden. Là ils redescendront vers Luz-Saint- Sauveur, une difficulté que les cyclistes n'ont encore jamais empruntée en descente, pour rejoindre Gavarnie, Gedre et une deuxième ascension inédite, vers la station de ski des Espécières. Un voyage passionnant en terre inconnue.

Etape 4 : la fête Gasconne

Après le circuit d'Albi en 2016, c'est celui de Nogaro accueille les bolides à pédales. Depuis plusieurs éditions, le public gersois a marqué son attachement à l'épreuve sudiste, ils devraient être très nombreux à l'appel de ce dimanche de clôture. A noter que les coureurs effectueront un passage à Caupenne-d'Armagnac en hommage à Luis Ocaña, le brave Castillan vainqueur du Tour de France 1973.

Les favoris 2017

Qui succédera à Nairo Quintana ? Depuis la ligne de départ située au-dessus de l'étang de Thau, ils pourraient être une dizaine à prétendre au sacre. Quintana lui-même, tout d'abord, mais aussi les Français Thibaut Pinot et Pierre Rolland, qui sortent comme lui du Tour d'Italie.