Verdun, années infernales

Lettres d'un soldat au front
 (février-septembre 1916)

Suivez Anatole Castex sur twitter pour écouter sa correspondance,
 cent ans jour pour jour


Un projet pédagogique mené par la 1ES1 du lycée Sonia Delaunay de Villepreux (Yvelines)
  
Il se déroule du mois de février
 au mois de juin 2016

Images aériennes du fort de Douaumont en 1915 puis en novembre 1916

6 juin 1916

"Je ne t'écris pas longtemps car j'espère arriver presque aussi tôt que ma lettre..."

31 mai 1916

"Aujourd'hui, avons eu la visite du général russe qui commande le corps qui est en France..."

22 mai 1916

"Je suis sur le point de partir, car je pense que je vais obtenir cette permission..."

19 mai 1916

"Depuis hier au soir, je savais cette triste nouvelle..."

Près de Reims, les lettres d'Anatole Castex sont davantage empreintes de religiosité.

Pendant la bataille de Verdun, la religion avait une place importante pour certains soldats. Malgré l'horreur de la guerre certains soldats gardaient la foi. Grâce à elle, certains pensaient même être victorieux : "La sainte vierge nous donnera la victoire", dit un soldat.

Les soldats s'étaient faits à l'idée de mourir et s'imaginaient donc une vie éternelle. C'était la guerre sous la forme la plus terrible et ils se sentaient transportés plus prés de Dieu, confie un autre soldat. 

Pour les croyants, les messes et les aumoniers leur donnaient de la force dans les moments difficiles : "J'ai été à la messe, le coeur en a été réparé", dit un soldat. Néanmoins, les prêtres regrettaient toujours l'indifférence de certains soldats athées : "Les fidèles étaient assis par terre autour du prêtre tandis que les non-croyants un peu plus loin, jouaient aux cartes ou mangeaient dans leurs gamelles", nous dit Paul Jankowski dans son ouvrage.

Les pasteurs et les prêtres avaient remarqué que certains soldats redécouvraient la religion, associant leur foi en Dieu avec le dévouement à la patrie. Paul Jankowski écrit : "La cause de la nation se confondait avec celle de son Dieu et cette alliance apaisait les remords".

Tandis que du coté allemand, on refusait de croire que Dieu était du coté des Français. "Il n'est pas possible que Dieu soit avec eux", dit un soldat Allemand.

Yann et Mogane, d'après Paul Jankowski, Verdun, 2013, p. 322-326.

14 mai 1916

"Oui c'est moi qui t'ai envoyé les cartes de Reims..."

12 mai 1916

"Sommes toujours à Reims. Les boches bombardent bien, un peu mais pas trop fort..."

27 avril 1916

"Aujourd'hui j'ai reçu le cadeau offert par les sous-officiers caporaux et soldats de mon ancienne compagnie. […]"

25 avril 1916

"Depuis hier, nous exécutons des travaux un peu en arrière de Reims […]"

23 avril 1916

"Je suis allé, après dîner, à Reims […]"

19 avril 1916

"Je t'annonce qu'à partir d'aujourd'hui je prends le commandement d'une compagnie de mitrailleuses du régiment […]"

15 avril 1916

"Cécile part demain matin. Nous autres aussi je pense [...]"

13 avril 1916

"Déjà tu dois avoir vu Joseph qui t'auras donné de mes nouvelles [...]"

Anatole Castex a obtenu une croix de guerre, avec une palme de bronze qui signifie qu'il a une citation à l'ordre de l'armée.

La croix de guerre est une décoration militaire attribuée pour récompenser l'octroi d'une citation par le commandement militaire pour conduite exceptionnelle au cours de la Première Guerre mondiale. Cette décoration, montre que les généraux voulaient récompenser le courage des soldats durant la guerre. 

Avant, il y avait la Légion d'honneur et la Médaille militaire qui étaient exceptionnellement décernées au cours de la Première Guerre mondiale. Mais comme, il fallait décorer beaucoup de soldats on créa la croix de guerre. Elle pouvait d'ailleurs être remise sur les champs de bataille. 

À la fin de l'année 1914, le général Boëlle, commandant alors du IVe Corps d'armée, tenta de convaincre l'administration de la nécessité de la création d'une telle décoration. Au début, le ministre de la guerre n'était pas d'accord avec cette idée. Boëlle réussit à convaincre un député de Paris (Driant) de décorer un soldat après un exploit particulier. Après plusieurs discussions au sein des deux chambres, la loi est votée le 2 avril 1915 et promulguée le 8 du même mois.

Cette croix de guerre est décernée aux militaires de l'armée de terre et de mer français ou étrangers qui ont combattu contre l'Allemagne et ses alliés. Les villes martyres, les villages entièrement détruits ou les cités ayant résisté héroïquement se voient également attribuer la Croix de guerre, qui figurera à la place d'honneur dans leurs armoiries.

Le choix des insignes sur les croix sont réalisés par la commission ministérielle :
- une palme de bronze : armée
- une étoile de vermeil: corps d’armée
- une étoile d’argent : division
- une étoile de bronze: brigade ou régiment

La croix de guerre a cessé d'être décernée le 28 octobre 1921

Joseph et Gabriel, d'après wikipedia et le musée de la légion d'honneur.

8 avril 1916

Une première lettre de l'épouse d'Anatole Castex à sa belle-soeur puis d'Anatole Castex à sa soeur. Il est promu capitaine.

3 avril 1916

"J'ai passé hier la journée presque entière avec Cécile [...]"

1er avril 1916

"Tu m'excuseras si je ne suis pas aussi régulier pour t'écrire car Cécile étant là, j'ai encore moins de temps […]"

26 mars 1916

"Je ferai ce que tu me dis au sujet d'Allemand. Pauvres gens, je comprends leur peine ! […]"

25 mars 1916 à sa sœur

"Demain matin, nous quittons le cantonnement où nous sommes […]"

24 mars 1916 à son épouse

"Comme nous pensons rester quelque temps, je m'empresse de te dire de venir, si du moins tu te sens capable de faire le voyage […]"

Anatole Castex est désormais cantonné près de Reims. La cathédrale prise pour cible par les tirs allemands est présente dans de nombreuses lettres. 

23 mars 1916

"Sommes arrivés aujourd'hui dans notre nouveau cantonnement situé entre Epernay et Château-Thierry […]"

20 mars 1916

"Contrairement à ce que je t'ai dit hier, nous ne partons que demain, et vers Château-Thierry […]"

19 mars 1916

"Suis toujours au même endroit mais partons ce soir par le train sans savoir où nous allons […]"

17 mars 1916

"Nous sommes au repos et donc bien loin de la bataille. Le 14 mars, nous avons été relevés et emportés à l'arrière en auto […]"

Anatole Castex fait état des moments critiques rencontrés début mars par les troupes françaises.

Les 7 et 8 mars la division Bouillon est attaquée par surprise par les troupes allemandes. Malgré des conduites brillantes, les soldats fraichement débarqués en renfort, sont "livrés en pâture" mais finissent par repousser les troupes ennemies avec l'aide d'anciens. Les Allemands parviennent malgré tout à trouver une faille dans la défense du 109ème bataillon et arrivent à l'occuper, un positionnement dangereux pour les Français qui les pousse à armer toutes les personnes possibles qu'ils soient téléphonistes pionniers ou autres. 

C'est finalement la "compagnie des lions" menée par Gleizes qui va se sacrifier pour repousser les Allemands. Le 8 mars, le village de Vaux subit 13 tentatives d'attaques et des pertes considérables menant à des compagnies de seulement dix hommes. Les batailles font rage dans de nombreux secteurs mais les unités tiennent bon, quittes à se battre même avec les blessés. 

Les Allemands sont repoussés et les batailles se poursuivent dans le sud durant les journées du 9 et du 10 mars. Les lourdes pertes obligent Pétain à renouveler les hommes des bataillons. La situation s'aggrave et force de nombreuses divisions à se retirer. Pour la première fois, Pétain fait des relèves accélérées. Les derniers forts en possession des Français sont désormais défendus le mieux possible par des soldats à pied. Les pertes ne s'arrêtent pas et s'accumulent encore. Des fortifications de fortunes durant les batailles permettent, par surprise, de se défendre vaillamment. Pétain imite les Allemands et bombarde à vue les troupes allemandes ce qui permit une bonne contre-attaque malgré les pertes. 

Les hommes s'entre-aident et acceptent de plus en plus le sacrifice pour défendre leurs positions. Les soldats sont cependant atteint dans leur moral menant certains à la folie. Les combats continuent dans les tranchés, partout.

Les journées du 7 au 10 mars furent parmi celles comptant le plus de pertes.

Chelsea, d'après Pierre Miquel, Mourir à Verdun, p. 123-129.

16 mars 1916

"T'ai envoyé une carte du village où des autos qui étaient venues nous chercher près de la ligne de feu nous avaient déposés […]"

15 mars 1916

"Vais très bien. En ce moment, bien loin de la bataille […]"

12 mars 1916

"Je pensais avoir le temps de t'écrire longuement, mais on nous a fait déplacer dans la matinée […]"

Nous pouvons nous demander comment ces hommes ont pu tenir dans des conditions aussi dures comme en témoigne Anatole Castex dans sa correspondance.

Tout d'abord, les principales motivations pour se battre sur le front étaient la haine de l'ennemi ou bien l'amour de ses proches. En effet d'une part, on se battait pour quelqu'un, comme sa famille ou ses amis et d'autre part, on se battait contre quelqu'un, puisqu'à cette période, les Etats utilisaient la propagande pour déshumaniser l'adversaire.

Ensuite, beaucoup de soldat étaient "guidés par le point d'honneur individuel", comme le rappelle l'historien Marc Bloch dans un de ses rares écrits consacrés à la Première Guerre mondiale. Ce "point d'honneur individuel" ou amour propre, faisant partie du consentement des soldats, pouvait s'exprimer de plusieurs manières. Premièrement, il pouvait arriver que le consentement se manifeste par une compétition entre les régiments. Les soldats les plus "performants" sur le champs de bataille étaient récompensés, par des médailles par exemple, ce qui incitait donc les combattants à se surpasser entre eux. D'autre part, certains soldats recherchaient l'estime et l'admiration de leurs proches en allant se battre au front.

On peut ajouter que le dévouement envers les camarades était en partie l'assemblage de petits attachements, reposant sur des liens personnels, des rancoeurs partagées contre la guerre ou des intérêts communs. En effet, beaucoup de soldats tissaient des liens entre eux, comme par exemple en partageant des expériences très fortes ou la perte d'un de leur camarade, plus douloureuse que celle d'un inconnnu.

Enfin, certains étaient portés par leur foi. En effet, certains soldats expliquaient leur survie par la protection de Dieu, après un bombardement par exemple.

Léo, d'après Paul Jankowski, Verdun, p. 314-322.

10 mars 1916

"Après un combat terrible, suis sans une égratignure. […]"

Du fait des spécificités de l'engagement des forces à Verdun, tant sur le plan humain que matériel, les soldats sont confrontés à une expérience de violence particulière. Cette bataille fait appel à des effectifs importants sur un front relativement large où attaques et contre-attaques se succèdent. La violence des combats amène à la qualification de violence de masse, en grande partie causée par les progrès techniques.

L'utilisation de nouvelles armes plus perfectionnées telles que les "grenades", "mitrailleuses" et "obus" laissent sur les positions attaquées "quelques survivants dans le vacarme, les fumées, les odeurs et les cris". Les obus sont au centre des bombardements destructeurs car en janvier 1916 les Allemands en apportent plus de deux millions et ceux-ci causent des "trous de 1 ou 2 mètres", "entourent, écrasent et dispersent les groupes". 

Les mitrailleuses "armes redoutables" au "bruit diabolique" en raison de leur cadence de tirs ainsi que les grenades hurlant dans toutes les directions sans cesse, sont des armes plus efficaces pour se défendre des attaques d'infanterie.

Face à ces nouvelles armes, les destructions matérielles furent considérables avec "des dépôts de munitions explosés, la terre déchiquetée" dans un "brouillard enflammé". Les pertes humaines ne furent pas moindres et les corps sans vie "disséminées et immobiles" s'entassaient dans la boue pendant que d'autres, "le ventre ouvert, retombent inertes, sans cris".

En plus des violences physiques, les soldats subissent des traumatismes psychologiques. Dans Verdun 1916, on relate le soldat témoigne n'avoir plus conscience d'être un homme mais seulement un fantôme. 

Verdun reste le symbole de "l'horreur sanglante", où régnaient la mort, la faim, la soif, la peur ainsi que la violence.

Margot, d'après Antoine Prost et Gerd Krumeich, Verdun 1916, p. 142-145.

8 mars 1916

"Toujours la bataille et nous sommes en plein dans la mêlée. Nous avons beaucoup de pertes, […]"

6 mars 1916

"Sommes toujours dans la même situation, un peu en arrière en réserve, quelques peu marmités, mais sans trop de mal, […]"

Anatole Castex se montre confiant dans les ressources de l'artillerie française. En effet, pendant longtemps la France se satisfait de son canon 75 mm, efficace et mobile.

Elle n'était pourtant pas la meilleure arme pour une guerre de position très longue avec des préparations d'artillerie telles qu'on a pu en voir à Verdun justement.

L'artillerie lourde était plus présente du coté allemand que du coté français, avec 1730 pièces pour l'Allemagne contre 548 en France.

Juliette, Jade, Emma, d'après Paul Jankowski, Verdun, p. 153-163.

5 mars 1916

"Temps plutôt froid et pluvieux. […]"

Cette lettre nous fait comprendre que les conditions de vie au front, dans les tranchées surtout à cette période de l'année étaient plus que difficiles. 

Comme l'écrit l'historien Jacques Meyer, le froid et la boue qui s'additionnaient, dans ce département de la Meuse du nord-est de la France, pendant ce "terrible hiver 16-17" menait à une épidémie de "pieds gelés". Le livre nous indique également que, la pluie perdurait jusqu'au printemps car il s'agit d'une zone dont le climat est océanique dégradé qui se caractérise par un été chaud et orageux et un hiver long et rude. 

Jacques Meyer précise avec cette citation : "La boue, qui succéda à la pluie tombant jusqu'au printemps, et même au-delà, eut des conséquences plus tragiques encore." Le témoignage d'un soldat dans ces tranchées explique les conditions ardues dans lesquels les hommes vivaient. Il pleuvait sans cesse et l'eau s'accumulait dans les trous, la boue se formait et aspirait comme des sables mouvants les hommes qui n'osaient plus bouger, de peur de voir empirer leur situation. L'attente est très longue et cela s'accentue avec le mauvais temps qui handicape les soldats.

Cependant, on a pu observer une nette différence climatique avec la bataille notamment de la Marne, déroulée en 1914, pendant l'été où il faisait très chaud et lourd. Selon Météo France, à cette époque cela pouvait atteindre les 30 °C mais il y a des eu des périodes où le vent ainsi que la pluie étaient présents.

A Verdun, les soldats ont donc expérimenté une situation de vie très dure du fait des conditions météo. Toutefois, le froid et la pluie n'étaient pas les seules conditions que les hommes devaient supporter. En été notamment, avec la chaleur et la sécheresse, ils vivaient dans la poussière car la terre n'était pas recouverte et dans les tranchées, la saleté stagnait. Il n'y avait pas d'ombres pour s'abriter du soleil qui pouvait cogner. À ces conditions plus que difficiles s'ajoutait la peur, le manque d'hygiène, le temps qui paraissait interminable... Eté comme hiver les conditions de vie de ces hommes de guerre étaient misérables.

Cécile, d'après Jacques Meyer, Les soldats de la Grande Guerre, p. 304-305 et www.meteofrance.fr.

3 mars 1916

"Ce soir, nous allons être relevés par l'autre brigade. Nous étions un peu en arrière, quoique en alerte et toujours prêts à repartir au premier signal […]"

1er mars 1916

"Je te remercie, petite sœur de tes bonnes paroles qui m'aident encore mieux à avoir plus de courage. [...]"

A partir de la bataille de Verdun, les capacités de l'artillerie sont encore plus importantes avec "toujours plus de portées, toujours plus de calibre, toujours plus de rapidité et de tir, toujours plus de canons mis en oeuvre, toujours plus de munitions à dépenser, telle est la leçon de Verdun." (Général français Herr, cité par Paul Jankowski dans Verdun, p. 160)

La première guerre mondiale est une guerre industrielle, de matériel. Il s'agit de provoquer plus de pertes à l'ennemi qu'on en subit soit-même en luttant avec du matériel contre du matériel.

Avant la guerre, l'Allemagne est en supériorité industrielle par rapport à la France ce qui explique son choix de développer des armements puissants et nombreux. L'Allemagne produit 5 fois plus d'armes en 1916 qu'en 1915 grâce aux usines. Elles produisent environ 3000 obusiers en 1916. 

Cette production en masse de matériel prolonge la durée du conflit.

Juliette, Emma, Jade, d'après Paul Jankowski, Verdun, p. 153-163.

29 février 1916

"Excuse-moi de ne t'envoyer qu'une carte, mais je n'ai pas le temps car ça barde dur [...]"

A Verdun, les soldats français étaient fatigués, ils souffraient surtout de la soif et de la faim accumulées au manque de sommeil et aux bombardements incessants.

Jacques MEYER, dans Les soldats de la Grande Guerre, décrit un passage où les soldats arrivaient au point de boire leur urine afin de retrouver une sensation de désaltération. Les hommes avaient même du mal à se forcer à manger le peu de nourriture qu'ils avaient de peur d'avoir encore plus soif.

Beaucoup de témoignages décrivaient aussi une hygiène désastreuse. En effet, il était courant que les soldats soient pris de vomissements ou de diarrhées. 

Une autre condition difficile était la privation de sommeil due surtout au stress et à l'anxiété des soldats pendants les nuits. La nuit, chacun devait garder son poste afin de prévenir un assaut ou un bombardement ennemi, créant ainsi des insomnies. 

Les hommes, en plus de souffrir de la fatigue physique, n'avaient pas le moral. Certains soldats se rabattaient sur la religion afin de croire en quelque chose et de ne pas tomber dans la folie.

Amélie et William.

L'avancée allemande des premiers jours

Carte issue de A. Prost e G. Krumeich,
Verdun 1916, p. 35

26 février 1916

"Toujours la lutte qui se poursuit : les Allemands ont envoyé sur nous une grêle d'obus. Leur avance a été enrayée et aujourd'hui il y a eu un peu de calme. […]"

25 février 1916

"Excuse-moi si je suis un peu bref, mais je n'ai pas une minute. Ça barde dur chez nous et voilà quatre nuits que je ne dors plus. […]"

L'historien Pierre Miquel raconte l'atrocité des combats et la souffrance subie par les soldats pendant la guerre aux premières heures de la bataille.

Le caporal Brassard (56e bataillon de chasseurs à pied) raconte : "Sur 5 poilus, deux sont enterrés vivants dans leurs abris, deux sont plus ou moins blessés et le cinquième attend..."

En plus de la mort plausible à chaque éclat d'obus, le bruit de ces bombardements était assourdissant pour les soldats : "On entend à peine le cri des blessés, tant le vacarme de l'artillerie est encore dominant".

Les soldats ressentaient une certaine solitude et un sentiment d'abandon car les lignes étaient coupées et aucun avion allié n'était en vue. Pierre Miquel résume : "Plus les heures passaient, plus ils se sentaient seuls, pas un avion dans le ciel, pas la moindre "saucisse", pas le plus petit éclat de 75. A croire qu'on les laissait mourir à dessein".

De nombreux soldats français ont péri sous les obus allemands.

Yann et Mogan, d'après Pierre Miquel, Verdun, p. 39-51.

23 février 1916

"Nous voici toujours au même endroit. Je ne sais jusqu'à quand, en tout cas on a commencé par nous faire faire des exercices […]"

Le 21 février 1916 fut le début de l'une des batailles les plus sanglantes et les plus violentes de la Première Guerre Mondiale.

Par un temps très froid, entre 7h15 et 16h, plus de 1 million d'obus sont lancés entre Brabant, le bois et le village d'Haumont, le bois des Caures et La Wavrille. Dès le début, des missions de repérages sont effectuées par des guetteurs.

Beaucoup d'informations contradictoires parviennent au quartier général (QG) de Joffre. Tout au long de cette journée, de nombreux convois d'artilleries arrivent par un chemin de fer à voie étroite afin de ravitailler les soldats.

Sur Verdun, 1200 canons allemands sont utilisés. Les lignes peu fortifiées des Français et l'artillerie française ne sont pas en mesure de répliquer face aux feux allemands ni de protéger leurs fantassins accablés eux-mêmes par les tirs. Aucune information sur l'état des premières lignes ne sont communiquées.

Les conditions se détériorent et la neige commence à tomber. Les Français se terrent dans de larges trous auprès de nombreux blessés et mourants. Neuf heures durant, les soldats français attendent, se faisant asphyxier par la fumée.

Malgré la préparation des deux côtés, l'effet de cette bataille est désastreux sur le terrain.

Lara et Elisa.

Sources : Henri Castex, Verdun, Années infernales, Lettres d'un soldat au front, Editions Imago, Paris, 1996, p. 21 ; Pierre Miquel, Mourir à Verdun, Paris, Tallandier, 1980, p. 33-47.

20 février 1916, un jour avant l'attaque allemande.

"Nous voici depuis hier au soir à côté des Boches, tout près à quatre-vingts mètres à certains endroits. [...]

Avant la bataille

1er janvier 1916 " […] Voici donc la nouvelle année qui nous apportera sans doute la paix et le retour vers le cher coin de notre pays. […] Il me semble que mes vœux seront réalisés... Le vrai bonheur viendra aussi. Quelquefois il échappe, puis se fait attendre, mais il doit revenir et tu l'auras bien mérité... Je t'envoie mes bons baisers, ceux de 1916."
Extrait de la carte de Cassini (XVIIIe siècle), région de Verdun
Géogportail : http://www.geoportail.gouv.fr/accueil

Février 1916

Anatole Castex raconte son quotidien et son expérience combattante à Verdun.

Il raconte son trajet à sa famille aux alentours de Verdun et il explique qu'il logeait dans les villages désertés. L'officier est réservé sur ses sentiments. Il n'exprime ni la peur, comme on pourrait s'y attendre, ni le manque de sa famille. Il est très descriptif et très narratif. Anatole Castex se contente de décrire les événements.

Au cours de son périple on peut constater qu'il change de camps pour partir à Verdun. Le soldat décrit cette ville de façon très militaire et stratégique. Durance cette période, les lettres d'Anatole Castex sont monotones. Elles ne sont que le reflet de son quotidien peu exaltant. Il nous communique son ennui et son désir d'attaquer et de se venger des Allemands. L'officier s'attarde sur le peu de choses qu'il peut raconter comme le temps, l'ennui ou encore la description des lieux.

Il transmet ainsi l'attente et la constante inconnue du lendemain qui semble insupportable.

Clémence, Lina.

Janvier 1916

La première lettre de l'année 1916, est adressée à son épouse. Anatole Castex lui souhaite ses vœux de bonheur. L'atmosphère de la guerre commence à lui peser de plus en plus. 

Pendant 30 jours, il est envoyé dans différents endroits pas très éloignés du front, pour faire des exercices d'entrainement. Cette idée ne l'enchante pas totalement. Il a peur de s'ennuyer et donc de ne pas être utile pendant cette période. Mais au fil du temps, il apprécie davantage, à tel point que quand il n'y avait pas d'entrainement, cela l'embêtait. Le soir avec ses camarades, ils jouaient aux cartes ou il écrivait des lettres à sa famille. 

Un jour, il y a eu une visite officielle, du Président. L'avant dernier soir du mois, un petit concert a été organisé avec de nombreux musiciens pour redonner le moral aux troupes. 

Toutes ces activités ne lui font pas oublier la réalité, il souhaiterait retourner sur le champ de bataille le plus rapidement possible. Il a la forte conviction qu'ils vont gagner.

Vanessa.

http://e-monumen.net/patrimoine-monumental
/monument-aux-morts-de-14-18-mirande/

# Source

Henri Castex, Verdun, Années infernales, Lettres d'un soldat au front, Editions Imago, Paris, 1996.

Extraits reproduits avec l'aimable autorisation des Editions IMAGO, © Editions Imago, 1996.

# Bibliographie

Paul Jankowski, Verdun, Paris, Gallimard, 2013.

Jacques Meyer, Les soldats de la Grande Guerre, Hachette, 1966.

Pierre Miquel, Mourir à Verdun, Paris, Tallandier, 1980.

Antoine Prost et Gerd Krumeich, Verdun 1916, Paris, Tallandier, 2015.

# Références et crédits

> Images du bandeau d'accueil : www.strangemilitary.com

> Extrait de la carte de Cassini, région de Verdun sur le site Géoportail : http://www.geoportail.gouv.fr/accueil

> Photographie de Verdun avant le déclenchement des hostilités : 
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6204883z

> Carte postale ancienne du monument aux morts de Mirande :
http://e-monumen.net/patrimoine-monumental/monument-aux-morts-de-14-18-mirande/