Dans la peau
de Thomas Pesquet

Plongez dans le quotidien
de l'astronaute français à bord
de la Station spatiale internationale

Cela fait près de dix ans qu'aucun astronaute français n'avait rejoint la Station spatiale internationale. Depuis le 17 novembre 2016, il y a enfin un successeur à Léopold Eyharts : Thomas Pesquet, 38 ans, diplômé de l’école SupAéro de Toulouse. Une mission de six mois l'y attend, au cours de laquelle il participera à près de 200 expériences scientifiques.

Après 48 heures de vol à bord du vaisseau russe Soyouz, le Français accompagné des cosmonautes Peggy Whitson (USA) et Oleg Novitski (Russie) est arrivé à bon port dans la nuit du 19 au 20 novembre.

Un rythme calé sur le rythme terrestre

Évoluer en impesanteur étant déjà assez déroutant pour l'organisme humain, aussi bien physiquement que psychologiquement, tout est prévu pour permettre aux astronautes de conserver quelques repères terrestres.

"Un rythme régulier est imposé dans l'espace, avec des périodes de sommeil, de travail et de repos qui s'alternent. Il s'agit de préserver les organismes", raconte l'astronaute français Léopold Eyharts, parti pour l'ISS en 2008.

Thomas Pesquet, lui, n'aura pas mis longtemps à s'adapter. "Je dors comme un bébé, a-t-il confié lors de sa première conférence de presse le 23 novembre. On dort en flottant, retenu à la paroi par des sacs de couchage. C'est assez naturel finalement..."

Les astronautes font aussi beaucoup de sport (2h30 par jour), sur des appareils spécifiques, afin d'entretenir leur condition physique. Sans quoi l'impesanteur aurait tôt fait d'atrophier leurs muscles, qui servent moins que sur Terre. Ils subissent de plus des examens physiologiques réguliers (état psychologique, bilans sanguins).

Pendant les moments calmes, Thomas Pesquet et ses acolytes lisent, jouent, observent le paysage par les hublots de la station ou encore écoutent de la musique. Le Français s'est d'ailleurs lancé comme défi de partager chaque jour sur Twitter les titres qu'il écoute...

De la science... mais aussi de la maintenance

"Le lever se fait à 6h et le coucher vers 21h30, raconte Léopold Eyharts. La journée de travail s'étend, elle, de 7h30 à 19h, avec une heure de pause déjeuner."

L'emploi du temps à bord de la station spatiale est bien rempli. Les astronautes sont bien sûr impliqués quotidiennement dans le travail de recherche scientifique (lire plus bas le chapitre sur les missions de Thomas), mais ils ont aussi à charge de maintenir cette "maison" en orbite en bon état de fonctionnement. Chaque samedi matin est par ailleurs consacré au ménage à bord de la station.

"Il faut juste un peu de temps pour apprivoiser le travail en impesanteur : par exemple, il ne faut pas lâcher ses outils une seconde... sinon on les retrouve totalement ailleurs", décrit Thomas Pesquet.

L'une des premières tâches du Français et de sa collègue d'équipage Peggy Whitson a ainsi été de réparer... les toilettes de la station !

Commencée en 1998 et achevée en 2011, la station spatiale internationale a déjà bien vécu, et doit sans cesse être maintenue en condition pour servir encore à de futures missions. "Son utilisation sera ainsi être prolongée jusqu'en 2024, voire 2028", précise Léopold Eyharts.

Ses missions à bord de l'ISS

(Photo :  Twitter de Thomas Pesquet)

Pendant les six mois qu’il va passer à bord de ce grand laboratoire en chute libre dans l’espace, le Français participera à de nombreuses expériences internationales, inscrites au programme scientifique de l’ISS, en compagnie des cinq autres astronautes de la station.

Des expériences pilotées depuis Toulouse

Mais sept expériences spécifiques lui ont aussi été attribuées, regroupées sous le nom de mission Proxima. C'est en effet le privilège d’un pays, lorsqu’il envoie un astronaute dans l’espace, de lui attribuer des expériences propres.

Celles-ci ont été mises au point par le Centre National d’Études Spatial (Cnes) et l’Institut de Médecine et Physiologie Spatiales (Medes), filiale santé du Cnes.

Elles seront toutes pilotées à Toulouse, depuis le Cadmos (Centre d'aide au développement des activités en micropesanteur et des opérations spatiales), directement connecté à l’ISS : c’est de là que les scientifiques enverront leurs consignes à Thomas Pesquet pour les exécuter.

Surfaces intelligentes, réalité augmentée et application santé

L'astronaute devra notamment se pencher sur six expériences concrètes, qui visent à améliorer les conditions de vie et de travail sur la station.

"Il est possible que ces expériences amènent même Thomas à faire une sortie hors de la station", commente Marc Pircher, le directeur du Cnes de Toulouse.

Il testera par exemple un nouvel outil de diagnostic de la qualité de l’eau, Aquapad, ou encore EveryWear, une application sur tablette qui permet un suivi santé nouvelle génération des astronautes.

Il sera aussi chargé de vérifier le bon fonctionnement d'un nouvel échographe, Écho, qui peut être télé-opéré en temps réel par un médecin depuis la Terre. Un outil qui permettrait de bénéficier de l’expertise de spécialistes médicaux à bord de l’ISS tout en réduisant la formation médicale des astronautes.



L’expérience Matiss testera en micropesanteur de nouvelles surfaces intelligentes capables d’empêcher la prolifération de bactéries.

Le casque de réalité augmentée Perspectives aidera à comprendre les bouleversements du cerveau dus aux pertes de repères spatio-temporels à bord de l’ISS. Enfin, Fluidics se penchera sur la dynamiques des fluides dans l’espace.

Autant d’expériences semblant relever de la science fiction et qui, pourtant, trouveront, si elles sont validées, de nombreuses applications également sur Terre.

Tous dans l'ISS
grâce à Thomas Pesquet

Thomas Pesquet avec le logo de sa mission Proxima. (Photo : ESA–Stéphane Corvaja)

En plus de ses six missions scientifiques, la mission Proxima en comptera bien une septième. Tout au long de son séjour dans l'espace, Thomas Pesquet sera en effet les yeux et les oreilles de nombreux élèves et étudiants restés sur Terre.

Une 7e mission pédagogique auprès des jeunes

Exo-ISS se voudra ainsi être un moyen de sensibilisation des jeunes à l'espace, et plus largement aux carrières scientifiques, en leur permettant de se glisser dans la peau de scientifiques, le tout en lien avec leurs programmes scolaires.

Trois expériences ont été retenues dans ce cadre, qui seront réalisées en doublon : au sol par les jeunes et à bord de l’ISS par l’astronaute français. Les résultats obtenus de part et d’autre pourront ainsi être comparés.

Pour l'expérience Ceres, il s’agira pour Pesquet de faire pousser des graines (lentilles, moutarde, radis) à bord de la station spatiale internationale et d’analyser leur croissance en micropesanteur.

Le projet CrISStal aura, lui, pour but de démontrer le rôle de la gravité dans la croissance des cristaux. Enfin, CatalISS cherchera à prouver l’influence de la gravité sur les réactions de catalyse.

Ce programme pédagogique sera par ailleurs complètement immersif grâce à une caméra 360° embarquée à bord de l’ISS et qui permettra de suivre les différentes procédures scientifiques.

Un engouement autour de Thomas Pesquet

L'interactivité avec le public plus généralement, voici un autre challenge que s'est lancé l'astronaute français. Depuis plusieurs mois déjà, il s'active sur les réseaux sociaux pour partager sa passion et son aventure spatiale avec le monde entier.

Et ça marche ! Ses tweets, photos et vidéos durant ces derniers mois d'entraînement ont été partagés des milliers de fois. Au point qu'un hashtag #AllezThomas a été lancé pour le soutenir avant son décollage.

Plusieurs personnalités, dont le chanteur Bénabar, le chef étoilé Thierry Marx ou les sportifs Teddy Riner et Tony Parker, se sont même rassemblées pour lui concocter une vidéo d'encouragement que l'astronaute a pu visionner avant de monter à bord de la fusée Soyouz.

Astronaute hyper-connecté, on ne doute pas que Thomas Pesquet continuera, au cours des prochains mois, de se faire les yeux de tous les Français, Européens, et même êtres humains, à bord de la Station spatiale internationale... Afin que chacun puisse vivre l'ISS (presque) comme s'il y était !