La rentrée des glaces

Loin de son université millénaire, on trouve à Bologne une autre école plus originale : Carpigiani propose des cours de glace à l'italienne.

Elle se trouve loin du fourmillant centre-ville, entre zones industrielles et vastes champs de blés. Pourtant la Carpigiani University jouit d'une renommée mondiale, et pour cause : elle propose de former ses étudiants à l'art du « gelato », que l’on appelle en France « glace à l’italienne ».

Sa mission : "diffuser la culture du gelato à travers le monde". Chaque jour, des flopées d'apprentis venus des quatre coins du globe toquent à la porte.

Crédits photo : Léo Marron

Les sacs sont toujours remplis de classeurs et de crayons. Les tables sont toujours alignées en rangs d'oignons. Mais dans cette université, on parle chocolat, fraise ou pistache. En alternant les cours théoriques le matin et la mise en pratique l'après-midi, les apprentis disposent de trois semaines pour maîtriser la technique de création de glaces. Ils peuvent y rajouter une semaine de formation à la vente.

Alors, quel est le secret de cet art, qui attire le monde entier ? Curieusement, tout repose sur… des mathématiques. « A partir de la deuxième semaine, on fait beaucoup de calculs. Cela nous permet de savoir comment équilibrer nos compositions, explique Arnaud Laroche, tout droit venu de France. On peut ainsi comprendre comment arriver à un goût plus sucré, plus fruité, plus onctueux. Après, à nous de nous débrouiller avec les ingrédients qu’on voudra mettre dans nos créations ».

Les élèves s'entraînent par groupe de trois. Mixage, glaçage, nappage : ils répètent les gestes qui feront d'eux de vrais "geliateri" (glaciers).

Crédits photo : Léo Marron

Les sujets des cours font rêver : granités, sorbets, crèmes glacées, bâtonnets... Avec toujours le souci du détail. Le nappage, la texture, le visuel restent au cœur de la pratique. De là à en oublier le choix des ingrédients ? Pas vraiment. Une recette ne peut être totalement réussie sans ingrédients de qualité. Mais les ingrédients ne doivent pas éclipser l'équilibre des saveurs. Au final, le choix des produits est aussi important que leur combinaison.

Certains élèves de cette curieuse école sont en pleine reconversion, d'autres suivent un rêve d'enfance ou viennent pour se perfectionner. Les cours s'adaptent à tous ces parcours : l'artisan glacier avec une expérience déjà existante peut ne suivre que la semaine de cours avancé. Les artisans à budget plus réduit peuvent choisir d'étaler la formation sur un temps à leur convenance. 

Mario est italien. Il travaille pour une entreprise de consulting qui lui paie la formation. "Je connais ces machines. Mais aujourd'hui je les teste vraiment, c'est super".

Michelle vient des Etats-Unis. Elle manage des équipes de vendeurs dans l'industrie du fast-food. Comme Mario, son entreprise finance la formation. "En plus d'apprendre des compétences sérieuses, je suis en Europe et je peux visiter l'Italie". Une pierre, deux coups.

Compter 1100 euros pour le module débutant, 1200 euros pour les niveaux intermédiaires et confirmés. La diffusion de la culture italienne : un vrai business.

Crédits photo : Léo Marron

La demande va crescendo : les apprentis glaciers se bousculent des quatre coins du monde, en particulier d'Asie du Sud-Est et d'Amérique du Sud, alors même que l'université y a établi un campus. Pour plus de compréhension, les cours sont dispensés en italien, en espagnol, en anglais et en français.

Preuve du succès de la formule, l'entreprise a triplé son nombre d'inscriptions ces trois dernières années.

Crédits photo : Léo Marron


Les touristes n'ont pas été négligés, puisqu'un musée a été ouvert en parallèle, en 2013, pour revenir sur l'histoire du gelato. Un parcours "deviens glacier" a été lancé en septembre 2013. Il met en place un pack 5 jours sur le même modèle que les cours de l'université. Une initiative assez logique pour Carpigiani, leader des fabricants de sorbetières depuis 1946.

Théotime Roux et Léo Marron

Crédits photo : Léo Marron