À la découverte
de 8 musées du Bessin

consacrés au Débarquement et à la  Bataille de Normandie

De Vierville-sur-Mer à Courseulles-sur-Mer, en passant par Tilly-sur-Seulles, découvrez au fil de ce grand format certaines pièces issues des collections de huit musées du Bessin consacrés à la thématique du Débarquement et de la Bataille de Normandie.

Big Red One : 
une collection unique au monde à Colleville-sur-Mer

Une quarantaine d'objets ayant appartenu au capitaine Andrews sont exposés au Big red one Assault Muséum de Colleville-sur-Mer. ©Frédéric Bourgeois/La Renaissance le Bessin

La 1re Division d'infanterie américaine, créée en 1917 (l’insigne de la 1re Division a été créé en France lors de la Première Guerre mondiale à partir d’un bout d’étoffe allemande). Elle a, peut-être plus que toute autre, gravé son nom dans l’Histoire. Débarquée en Afrique du Nord en 1942, puis en Sicile en 1943, la Big Red One a débarqué la première sur Omaha Beach. La sanglante. Face à un ennemi parfaitement distribué sur les falaises de Colleville, Saint-Laurent et Vierville-sur-Mer, les troupes américaines font face à un déluge de feu et subissent de lourdes pertes. 

« La First a combattu jusqu’en Tchécoslovaquie en 1945. Elle a fait la jonction avec les Russes. C’est la division la plus aguerrie de la guerre. Même au procès de Nuremberg, des éléments de la 1re Division sont présents ». 

Collectionneur et passionné depuis l’âge de 9 ans Pierre-Louis Gosselin voue un culte pour la Big Red One. Il a ouvert le Big Red One Assault Muséum il y a 13 ans. Il y expose les objets collectés depuis l’âge de… 9 ans ! 

« Je suis originaire de Cherbourg. Avec l’école, on avait fait un échange scolaire avec les États-Unis. Trois semaines dans la région de Détroit. Ma correspondante m’a fait découvrir l’histoire de ses aînés qui ont combattu ». 

C’est le coup de foudre pour la 1st Division et ses 8 500 hommes répartis dans les 16e, 18e et 26e régiments. « En cinq années, je me suis complètement spécialisé ». 31 ans après, Pierre-Louis Gosselin a amassé 2 000 pièces de collection consacrée à la Big Red One. 

« Unique au monde » 

Le musée expose des armes, des documents et de l’équipement, comme le casque (percé d’une balle de sniper) ayant appartenu au premier soldat américain tué à l’entrée de Colleville-sur-Mer. « Un sous-officier qui a pris ses gallons depuis l’Afrique du Nord pour mourir à 100 m du musée. Je l’ai identifié après 20 ans de recherches ». Pierre-Louis Gosselin est un collectionneur. Il connaît chaque histoire derrière l’objet. Et il a parfois eu l’honneur de côtoyer leurs propriétaires. Ce n’est pas le cas pour le chapelain Andrews dont il a pu récupérer la totalité des effets dans les années 2000. 

« La collection est unique au monde : j’ai récupéré tous ses effets après plusieurs contacts avec des vétérans. Sa famille avait tout gardé, soit une quarantaine de pièces. Uniforme de sortie, uniforme de combat, une paire de jumelles allemande (une prise de guerre), ses chaussettes, son drapeau, son casque… » 

Des objets d’autant plus rares qu’une division de 8 500 hommes ne comptait que trois aumôniers catholiques, trois protestants et un rabbin. 

« Le capitaine Andrews a débarqué le 6 juin 1944 sur Omaha Beach, secteur Fox Green (au pied de la base Eolia Normandie de Colleville-sur-Mer, ndlr), vers 15 h. Il y avait un paquet de soldats au sol et il a eu un boulot monstre. Il a officié une journée et demie sur la plage et n'a rejoint son régiment que deux jours plus tard ».

La famille du chapelain ne connaissait pas son histoire en Normandie. « Il était aussi bien en première ligne pour récupérer les soldats tués en Jeep pour les amener dans les cimetières provisoires. Ou célébrer des messes au milieu de nulle part, sur le capot de sa voiture ». Le 13 juin 1944, Andrews libère Caumont-l’Éventé avec son bataillon. « Puis il a pris part à l’opération Cobra à Avranches et, blessé en Belgique, il est rapatrié aux USA avant la fin de la guerre. Les chapelains étaient sous les balles comme les autres mais n’étaient pas armés ». 

Animé par la passion

La passion a toujours animé le propriétaire du musée. « Adolescent, je séchais les cours au moment du 6 juin pour monter une exposition à la mairie de Colleville-sur-Mer. Elle était ouverte aux vétérans de la 1re Division ». 25 ans après, le souvenir de ces survivants du D-Day secoue Pierre-Louis Gosselin. 

« C’était des hommes au sacré tempérament. Des têtes brûlées. Ils ont toujours été en première ligne et étaient encadrés par des généraux de la même trempe. Comme le neveu de Roosevelt, enterré à Colleville. L’année dernière j’ai eu des vétérans. Cette année, zéro. Ils ont en moyenne 92 ou 94 ans. On ne sait pas combien d’ancien de la Big Red One sont encore en vie, certains n’ayant jamais fait partie d’associations. Mais je suis en contact avec les familles. On échange des photos. Je leur apporte une idée de la mission de leurs aînés en Normandie grâce aux journaux de marche et aux reports d’action ». 

« Les trois quarts du temps, j’ai la photo de leur aïeul dans mes archives » Quand les familles viennent ici, c’est un pèlerinage, « à tel point que beaucoup ne veulent pas dormir dans le secteur. Quand ils visitent mon musée, je vais vers eux. Les trois quarts du temps j’ai la photo de leur aïeul dans mes archives. Là, c’est riche en émotions ». 

Frédéric Bourgeois

■ Big red one Assault Muséum, Hameau le Bray, D 514, à Colleville-sur-Mer. Ouvert tous les jours de 10 h à 19 h jusqu’au 31 août. Du 15/02 au 31/05 et 1/09 au 30/11 : 10 h-12 h /14 h- 18 h, sauf le mardi. Tarifs. Adultes : 5€. Étudiants : 3,5€. Gratuit pour les vétérans, accompagnateurs, personnes handicapées. Tél. : 02 31 21 53 81 ou 06 72 89 36 18. Email : bigredoneassaultmuseum@ gmail.com

Décryptage de l'Enigma, une perle rare exposée 
à Vierville-sur-Mer

L'Enigma (ici le modèle M3 exposé au musée D-Day Omaha de Vierville-sur-Mer) permettait aux Allemands de coder leurs communications lors de la Seconde Guerre mondiale. ©Frédéric Bourgeois/La Renaissance le Bessin

Après une guerre de position en 1914-1918, la stratégie s'est orientée vers la guerre de mouvement. Tout comme les tactiques, les communications ont évolué avec les enseignements tirés de la Grande guerre. Si les pigeons voyageurs ont repris du service lors de la Seconde Guerre mondiale, l’utilisation des ondes radio a permis de délivrer des messages rapidement et à grande échelle. Sécuriser les transmissions Si l’argent est le nerf de la guerre, la sécurisation des communications et le renseignement sont fondamentaux pour appliquer avec succès les stratégies militaires. 

Côté allemand, les messages étaient codés à l’aide d’une machine au nom évocateur : Enigma. Un appareil électromécanique simple d’utilisation, mais redoutable d’efficacité, conçu dans les années 1920 et adopté à partir de 1933 par la Wehrmacht. Muni d’un clavier de 26 lettres, de plusieurs roues de codage, et d’un panneau de branchements permettant, en plus, de mélanger les lettres, l’Enigma offrait des milliards de combinaisons possibles. Un calvaire pour les décrypteurs alliés. Pourtant, Enigma possédait des failles. 

« Une équipe d’experts chargée de décoder les messages d’Enigma » 

« C’était très difficile à décoder. De plus, les Allemands changeaient la combinaison tous les soirs à minuit et chaque machine avait son propre code. Si les Alliés ne brisaient pas le code en moins de 24 h, le travail de toute la journée était fichu », illustre Cécilia Robert, employée du musée. « L’Enigma a été délivré aux Britanniques par des espions polonais et français. Une équipe d’experts en mathématiques, en physique, ainsi que des spécialistes des échecs, a été montée par Londres pour décrypter les messages d’Enigma. Dans cette équipe qui travaillait dans le plus grand secret, on trouvait le génie des mathématiques Alan Turing, le père de l’informatique. Il est l’inventeur d’une machine, le premier calculateur (ancêtre de l’ordinateur), Colossus, qui a décrypté Enigma ». 

C’est le fameux dispositif Ultra qui, dès le début de la guerre, a permis aux Alliés d’avoir un coup d’avance sur les opérations du Reich. « Les Alliés ne pouvaient pas ébruiter cela et devaient alors accepter, par exemple, la perte de certains convois. Mais ils estimaient que le décryptage de l’Enigma a sauvé 14 millions de vies et écourté la guerre de 2 à 4 ans ». 

Quatre Enigma visibles en France 

L’Enigma exposée au musée D-Day Omaha de Vierville-sur-Mer est l’un des 4 appareils visibles en France. « Les premiers modèles étaient développés pour la Kriegsmarine. Le musée du codage de Washington nous a permis d’identifer notre modèle, produit en 1935 ». Une rareté. 

« Il existe quatre exemplaires en France, dont un au Mémorial de Caen et un aux Invalides à Paris. Notre modèle M3 possède trois rotors, un système électromagnétique qui code l’alphabet. C’est très complexe mais Alan Turing est venu à bout de cette machine. Ses travaux ont été reconnus à titre postume. Il était homosexuel et ses travaux ont été passés sous silence. On l’a même forcé à la castration chimique. D’après la légende, il se serait suicidé en croquant une pomme au cyanure, ce qui aurait inspiré à Steeve Jobs le logo de la marque Apple ». 

Ce serait là un bel hommage à cet homme qui a posé les bases de l’ordinateur si ce n’était pas justement… une légende. Retrouvée dans un vide-grenier et proie des cambrioleurs L’Enigma, « c’est la pièce maîtresse du musée », assure Cécilia Robert. Un objet « trouvé par un ami de Michel Brissard sur une brocante. La vendeuse pensait qu’il s’agissait d’une machine à écrire qui ne fonctionnait plus ». Mais elle attire les convoitises. 

Volé en 2008

Dérobé en mars 2008, l’appareil a été retrouvé à Paris. A l’époque, le musée avait rapidement annoncé le vol sur les réseaux sociaux. De nombreux internautes s’étaient mobilisés. L’Enigma avait été retrouvé grâce à un appel d’un collectionneur. Cambriolé en septembre 2016, le musée avait alors déploré le vol d’armes… Depuis sa création en 1999, c’est la seconde fois que le musée est la proie de voleurs. « Le musée a été fondé par Michel Brissard. Un collectionneur passionné qui a amassé des milliers d’objets en 50 années de recherches (90 % de la collection est issue de recherches, 5 % de dons et 5 % d’achats). Un tiers seulement des collections est exposé dans les murs de cet ancien hôpital américain construit au lendemain du Débarquement et qui, plus tard, fût transformé en salle des fêtes par la municipalité avant de devenir l’actuel musée ». 

Frédéric Bourgeois

■ Musée D-Day Omaha, route de Grandcamp-Maisy, 14710 Vierville-sur-Mer. Ouvert tous les jours, de 10 h à 19 h en août, et de 10 h 30 à 18 h en septembre. Tarifs : 5,70 € adultes, réduit 4,70 €, 3,50 € pour les enfants (gratuit pour les moins de 8 ans), les vétérans et les anciens combattants. Tél. : 02 31 21 71 80.

Des objets uniques 
en Normandie exposés 
au musée Mémorial Omaha Beach

Plusieurs pièces exposées au musée Mémorial Omaha Beach de Saint-Laurent-sur-Mer sont uniques en Normandie. ©Arthur Pereira/La Renaissance le Bessin

Au début des années 1970, Daniel Trefeu est un jeune agriculteur implanté sur la commune de Formigny. C'est à cette même période qu’il commence à s’intéresser aux vestiges du Débarquement. Petit à petit sa collection composée de casques, chars ou d’armes, s’élargit à d’autres pièces uniques en leur genre. Petites ou grandes, les pièces ont chacune une histoire bien particulière. 

Les échelles de la Pointe du Hoc 

Au matin du 6 juin, trois compagnies de Rangers s’approchent des côtes de la Pointe du Hoc. Ses falaises abruptes et les nombreux bunkers allemands, en font une forteresse imprenable. Deux méthodes sont employées pour tenter de s’emparer de l’objectif. La plus utilisée, et la moins périlleuse, reste l’utilisation des anciennes échelles de pompiers de Londres en acier, hautes de 7 m. Elles permettaient aux soldats de s’élever jusqu’au sommet de la Pointe du Hoc. Ces échelles exposées au musée d’Omaha ont une histoire singulière que Daniel Trefeu aime partager avec les visiteurs. En effet, 10 ans après le début de sa collection, le menuisier de Cricqueville-en-Bessin lui a offert une véritable échelle de la Pointe du Hoc. Néanmoins, ces dernières, répandues lors du Débarquement, sont beaucoup moins rares que les grappins. 

Un grappin de ranger

À l’aube du D-Day, une cinquantaine de rangers de la 2e Division étaient équipés de grappins pour escalader la falaise de la Pointe du Hoc. Seulement 23 grappins seront lancés. Une dizaine seulement sont correctement accrochés et sont utilisés. Cette faible quantité de grappins utilisés en fait un objet rare et difficile à trouver. Pourtant, en 1982, deux ans après l’acquisition des échelles de rangers, Daniel Trefeu trouve chez M. Baylle, un véritable grappin de la Pointe du Hoc. Aujourd’hui, il reste l’unique exemplaire de ces grappins utilisés pendant le Débarquement. 

Une mine allemande retrouvée 60 ans après le jour J 

À la veille de célébrer les 60 ans du D-Day, l’ancien maire de Formigny, retrouve une mine anti-tank 35 acier Tellermine sur le bord de la départementale 194. En 2004, il trouve cette mine allemande dans le fossé, au bord de la route, près de Cricqueville-en-Bessin. Au lendemain de la guerre, le Bessin est ravagé par les combats. Des travaux sur la voirie sont nécessaires. Le village de Cricqueville n’est pas épargné. Lorsque le chantier de la nouvelle route débute, les agents de la voirie jette dans le fossé cette mine allemande. Hantise des chars américains pendant la guerre, ces mines étaient coulées directement dans le béton, sous la pression des blindés, elles explosaient et neutralisaient ainsi le véhicule. Ces mines de 60 centimètres de diamètre pouvaient détruire un blindé de 32 tonnes. 

Un canon offert par les États-Unis 

Au soir du 6 juin 1944, une partie du littoral normand est libérée par les troupes alliées. Après des heures de combats meurtriers, les soldats parviennent à prendre position sur les côtes françaises. Dès le lendemain, une organisation se met en place pour débarquer le matériel militaire : Jeep, canon ou chars… Une multitude d'engins sont acheminés. Le Long Tom 155 US fait partie de l’arsenal allié. Ce canon de campagne de 155 mm était utilisé par les Américains pendant la Seconde Guerre mondiale. Sa portée de 27 km permettait de détruire des objectifs importants sans mobiliser le moindre régiment.

« C’est une pièce à laquelle j’attache beaucoup d’importance », souligne le propriétaire du musée. L’histoire du canon est peu commune : c’est l’ambassade des États-Unis qui a fait don de cette pièce d’artillerie. À l’origine, Daniel Trefeu avait demandé un char pour l’exposer dans son musée. N’ayant aucun blindé disponible sur le sol européen, les USA ont décidé de lui offrir, le 5 juin 1994, un Long Tom 155 mm, resté dans la base américaine de Bomolder, en Allemagne.


Arthur Pereira 

■ Ouvert tous les jours de 9 h 30 à 19 h 30 entre juillet et août. Tarifs : adulte 6,90 € ; enfant (de 7 à 15 ans inclus) : 3,90 € ; étudiant avec carte (16 à 25 ans inclus) : 5,50 €.

Le Schwerer Ladungstäger B IV à la pointe de la technologie en 1944

Le B IV exposé à l'Overlord Museum de Colleville-sur-Mer est une pièce unique. C'est le dernier exemplaire en Normandie de ce modèle de véhicule téléguidé encore en état de marche. ©Arthur Pereira/La Renaissance le Bessin

Au milieu des années 1970, l'exploitant forestier et collectionneur, Michel Leloup, retrouve près du Mans le Schwerer Ladungstäger Borgward B IV. Actuellement entreposé au musée Overlod de son fils, Nicolas, à Colleville-sur-Mer, le véhicule attire l’oeil des plus curieux.

Une pièce unique en Normandie 

Chars, LCVP, avions, Jeep et canons composent la collection de Michel Leloup et de son fils Nicolas, propriétaire du musée. Néanmoins, le B IV est une pièce unique. C’est le dernier exemplaire en Normandie de ce modèle de véhicule téléguidé encore en état de marche. Son originalité et sa spécificité en font un engin unique pour l’époque. Véhicule téléguidé L’engin appartient à la troisième génération de véhicules téléguidés, précédé du Goliath filoguidé ou du Springer de NSU, le B IV se démarque de ces derniers par sa fonction de téléguidage à longue distance. Arrivé au cours de l’année 1944 en France, le véhicule allemand est envoyé dans la compagnie 316 de la Panzer Lehr Division allemande, au sud de la Normandie. 

Tapit dans le bocage

Cette unité allemande appelée aussi, « La compagnie des chars téléguidés » était positionnée dans le bocage normand et s’est notamment illustrée lors de la célèbre Bataille des haies, pendant l’été 1944. Poseur de charges Fabriqué en novembre 1943 par le constructeur automobile allemand, Borgward, le B IV apparaît comme une innovation de pointe pour le secteur militaire au milieu du XXe siècle. C’est un engin de 5 tonnes unique en son genre, puisqu’il est le seul véhicule pouvant être télécommandé sur plus de 2 km en 1944. Une spécificité présentant deux atouts majeurs pour la Wehrmacht. Ce dernier est d’abord utilisé par l’armée allemande comme poseur de bombe, évitant d’un autre côté les possibles pertes humaines. Les 450 kg de charges explosives pouvaient être déposés avec précaution sur la cible. 

Une arme redoutable

Le B IV était une arme redoutable. Un mécanisme atypique pour l’époque Ce véhicule à essence apparaît pour l’époque comme une réelle innovation dans le secteur militaire, mais aussi dans celui de l’automobile. Le téléguidage du véhicule en est la preuve majeure. Sa maniabilité et sa vitesse de pointe, fixée à 38 km/h environ, confirment son originalité. Concernant la fonctionnalité de poseur de bombe, le véhicule disposait d’un boîtier électronique qui recevait un ordre de commande du système hydraulique. 

Arthur Pereira 

■ Ouvert tous les jours de 9 h à 19 h 30 en juillet-août. Tarifs : Tarif Plein : 7,80 € (Adulte à partir de 18 ans), Tarif Réduit : 5,70 € (Sur présentation d’un justificatif). Enfants de 10 à 17 ans - Étudiants - Personnes Handicapées - Militaires - Chômeur, Tarif Préférentiel : 6,80 €. Gratuit pour les enfants de moins de 10 ans (en individuel) et anciens combattants.

L'énigmatique scaphandre d’Arromanches 
renferme certains secrets

Vue du casque et de la pèlerine qui repose sur la poitrine du scaphandrier. ©Frédéric Bourgeois/La Renaissance le Bessin

Inauguré en 1954 par René Coty, le Musée du Débarquement d'Arromanches-les-Bains est le premier du genre. Aujourd’hui, il existe de nombreux sites et expositions consacrés à la thématique du Débarquement et, plus largement, à la Seconde Guerre mondiale. Il quittera peut-être sa vitrine après le 75e anniversaire, en 2019, et la pose de la première pierre du futur musée. En attendant, le scaphandre reste imperturbable. Figé dans sa prison de verre, il impressionne les visiteurs. 

« Tout le monde s’imagine à l’intérieur » 

« Il ne laisse personne indifférent, surtout les enfants. Personne ne passe à côté de cette pièce insolite sans la regarder. Tout le monde s’imagine à l’intérieur et se dit que ça ne devait pas être facile. La pièce soulève des questions », indique Guillaume Dormy, chargé des collections. Cet équipement d’exploration sous-marine donne le frisson. Celui des profondeurs. Comme on envoie des hommes dans l’espace, l’exploration du fond des mers dans les années 1940 appartient au domaine du défi. Alimentés en oxygène par un narguilé qui relie le casque à la surface, ces hommes, lestés de masses et de semelles de plomb, ne tenaient qu’à un fil : la ligne de vie. « Une corde ! Elle permettait de descendre et de remonter le scaphandrier ». 

Conçu par un ingénieur allemand

Les scaphandriers sont utilisés depuis la fin du XVIIIe siècle mais ils ont beaucoup servi durant la Seconde Guerre mondiale. « Le scaphandre du musée a été conçu par un ingénieur allemand, naturalisé britannique : Siebe Gorman. Il fonde l’entreprise Siebe Gorman & Company Ltd qui existe encore aujourd’hui et est spécialisée dans la conception de matériel pour la plongée commerciale ». 

Mystérieuse origine 

Le scaphandre d’Arromanches conserve une part de mystère. « De ce que l’on sait, le scaphandre est au musée depuis les années 1960. Le musée a ouvert ses portes en 1954 et, à cette époque, on ne consignait pas l’origine des dons. On exposait alors sans vitrine. D’ailleurs cette pièce a été vandalisée dans les années 1960. Un individu serait entré avec un couteau pour le déchirer. Puis les visiteurs emportaient un petit bout du scaphandrier d’Arromanches ». Dommage pour cette pièce qui pourrait être unique en Normandie, sinon en France. 

« On en trouve peut être en Angleterre mais, à ma connaissance, dans les musées de notre thématique, c’est une pièce que nous sommes les seuls à posséder en France ». 

Missions subaquatiques 

Le scaphandre exposé à Arromanches appartenait à la Royal Navy. Il est là pour témoigner des tâches réalisées par les scaphandriers. « Ils intervenaient après la construction du port artificiel pour intervenir par exemple sur les systèmes d’ancrage des routes flottantes. Un système bien pensé, avec des ancres papillons qui, une fois posées, ne bougeaient plus. Mais il fallait faire de la maintenance. Ou si un bateau de patrouille du port se prenait l’hélice dans un filet pare-torpille, il fallait le libérer au moyen de scaphandriers. On ne sait pas combien ont travaillé sur le port, sans doute une vingtaine en Normandie. Le port de Cherbourg employait également des scaphandriers ». 

Au nez et à la barbe de l’ennemi 

Des scaphandriers ont également effectué des missions d’exploration sous-marine avant la construction du port. « Largués en mer, ils devaient sonder le fond pour connaître sa nature. Arromanches a été choisi comme lieu d’implantation du port artificiel pour son fond rocheux et sablonneux ». Le tout sous le nez des troupes d’occupation. Ces informations étaient capitales avant l’installation du port artificiel. Ses fameux caissons phoenix installés le 8 juin 1944, deux jours après l’invasion, devant Arromanches et Saint- Laurent-sur-Mer ne sont que des blocs de béton vides, capables de flotter, remorqués depuis l’Angleterre où ils ont été fabriqués dans le secret, puis coulés par l’ouverture de vannes. Seul le port d’Arromanches (qui fonctionne dès le 14 juin) a résisté à la tempête du 19 juin et a pu être remis en service. Son histoire et son fonctionnement sont le fil rouge du musée d’Arromanches, implanté juste devant les vestiges encore visibles aujourd’hui. 

« Certaines histoires sont insolites » 

« Certaines histoires d’exploration sont insolites. Dans la nuit du Nouvel an 1943, le major Scott-Bowden, des Royal Engineers, et le sergent Ogden-Smith sont venus sur la plage de Ver-sur-Mer pour prélever du sable sur la plage. Ils entendaient les Allemands célébrer la nouvelle année (ndlr : lire aussi dans le chapitre de ce grand format consacré à Ver-sur-Mer) ».

Frédéric Bourgeois

■ Musée du Débarquement, place du 6 Juin, à Arromanches. Ouvert tous les jours de juillet et août, de 9 h à 19 h. Tél. : +33 (0) 2 31 22 34 31. E-mail : info@ musee-arromanches.fr

À Courseulles-sur-Mer,
le Centre Juno Beach transmet l'histoire
des Canadiens

« Nous étions les seuls à tourner le dos à l'ennemi » Photographe de guerre de la marine canadienne de 1940 à 1945, Guy Goulet a couvert les batailles navales de l'Atlantique nord et de Méditerranée avant de débarquer en Normandie (à Bernières-sur-Mer) avec le régiment de la Chaudière. ©Frédéric Bourgeois/La Renaissance le Bessin

Mardi 6 juin 1944, à 7 h 30 (une heure après l'heure H fixée par les Américains, en fonction des marées), les Canadiens - tous volontaires pour combattre en Europe - débarquent sur Juno Beach, entre Graye-sur-Mer et Saint-Aubin-sur-Mer. 

Entre les récifs, la houle et les positions fortifiées allemandes, ces hommes, formés à partir de 1941 en Angleterre, tentent de débarquer sur une plage parsemée de défenses, déjà à demi recouvertes par la mer. Une plage balayée par de forts courants et par les tirs ennemis. 

Appuyés par la 2e Brigade blindée, les hommes de la 3e Division d’infanterie qui ont pu débarquer livrent des combats acharnés. Dans un Courseulles fortement fortifié par les troupes d’occupation, la 7e Brigade d’infanterie doit lutter pour gagner chaque mètre. Un millier d’hommes est perdu sur Juno Beach le jour J. Dont 359 tués. 

Travail de mémoire

« Un Canadien engagé sur dix a perdu la vie en Europe », indique Nathalie Worthington, directrice du Centre Juno Beach depuis son ouverture, il y a 14 ans. Le Centre, géré par le Canada et érigé devant Juno est unique au monde. Il a ouvert ses portes en 2003 et doit son existence à la volonté de vétérans canadiens - avec, en chef de file, le vétéran Garth Webb (1918-2012) - de bâtir un lieu de mémoire où leurs descendants pourront s’approprier l’Histoire. 

L’objet comme « outil de médiation » 

Le Centre Juno Beach s’inspire du concept de centre d’interprétation nord américain, tout comme le Mémorial de Caen. « On a la chance en Normandie d’avoir des musées de tous les styles. Mais le Centre Juno Beach n’est donc pas un musée de collection au sens strict du terme. L’ADN du Centre Juno Beach, c’est la transmission de mémoire. Les vétérans qui ont créé le Centre l’ont fait pour leurs petits-enfants. Parce qu’à l’époque, lorsqu’ils venaient en Europe, il n’y avait rien à leur montrer au sujet des Canadiens, en dehors des cimetières. Le Centre est un lieu où on peut raconter les choses », poursuit Nathalie Worthington. 

« Nos collections sont des moyens et pas des fins : lorsque l’on présente un objet, il vient nourrir l’histoire que l’on raconte. Les objets sont des outils de médiation. Notre mission consiste à faire connaître celle des soldats canadiens par des actions pédagogiques et commémoratives ». 

Ce message, c’est celui de la mémoire. Les témoins du Débarquement et de la Bataille de Normandie disparaissent. Les nouvelles générations ne sont donc pas dans le souvenir mais dans l’appropriation de l’Histoire. « Quand on est jeune, on comprend beaucoup mieux si on personnifie les objets qui se rapportent à un discours plus général ». 

« Les objets porteurs d’une humanité » 

Au Centre Juno Beach, il y a donc beaucoup de pédagogie. Les objets emblématiques, comme le fusil Lee Enfield, côtoient les correspondances et autres objets du quotidien. « Les objets porteurs d’une humanité ». Le bracelet offert par un libérateur canadien à une jeune courseullaise le 6 juin 1944, et utilisé pour une exposition temporaire, en est l’exemple parfait. Il ne pèse pas lourd face aux 32 tonnes du Sherman exposé quai des Alliés. Mais ce bracelet qu’Éliane Vanbrenseghem a conservé précieusement durant 62 ans en dit long sur ce qu’ont pu ressentir les Normands au moment du Débarquement. 

« Le 5 juin au soir, vers minuit, nous avons entendu de gros bruits sourds du côté de la mer. Nous sommes sortis de la maison, il y avait de grandes lueurs sur la mer, dans le ciel », témoigne Éliane Vanbrenseghem sur le site Internet du Centre Juno Beach. Elle avait 12 ans le 6 juin 1944. 

« Le 6 juin 1944 au matin nous sommes sortis dans la rue et près de la maison, j'ai vu un visage tout crayonné de noir, la tête coiffée d’un casque couvert d’un filet [...] Mon père a dit : C’est le débarquement ! »

« Le 6 juin 1944 au matin nous sommes sortis dans la rue et près de la maison, j’ai vu un visage tout crayonné de noir, la tête coiffée d’un casque couvert d’un filet, puis un autre visage, crayonné tout pareil, puis trois, puis d’autres encore. Mon père a dit : « C’est le débarquement ! » et une voix a répondu en français : « Mais oui, Monsieur c’est le débarquement ! ». Quelle joie d’entendre cette voix ! J’ai cueilli des roses que j’ai données aux soldats. L’un d’eux sur un char m’a tendu les bras. Je l’ai embrassé, j’ai vu son bracelet d’identité, je le voulais, il hésitait, je lui ai dit « Oui, oui, souvenir, souvenir ! ». Il me l’a donné avec des bonbons et du chocolat… » 

Au dos du bracelet, un nom. Celui du capitaine M. W. Chepesiuk. « En raison de la singularité du nom de famille (d’origine ukrainienne), une recherche sur internet a permis d’identifier au Canada l’annonce de décès d’un chirurgien portant ce nom et des informations sur sa famille », explique Nathalie Worthington. 

Des descendants en pèlerinage à Courseulles

« Contactée, cette famille a indiqué que le nom sur le bracelet d’identification n’était pas celui du défunt chirurgien, mais de son frère, le Capitaine Maurice W. Chepesiuk, décédé depuis plusieurs années. Il a alors été possible de contacter sa fille et de l’informer que le bracelet offert par son père le 6 juin 1944 à une petite fille de Courseulles-sur-Mer était en bonne place au Centre Juno Beach. En 2007, des neveux et petits-neveux ont pu faire le voyage depuis le Canada, visiter le musée, voir le bracelet et aussi rencontrer Éliane ». 

Avec le temps, ces rencontres ne seront plus possibles. Mais les Canadiens qui effectueront le voyage auront la certitude de trouver à Courseulles un moyen de se connecter avec l’histoire de leurs aînés. 

Frédéric Bourgeois

■ Centre Juno Beach, voie des Français Libres, 14470 Courseulles-sur-Mer. Téléphone : 02 31 37 32 17. Courriel : contact@junobeach.org. Ouvert de 9 h 30 à 19 h jusqu’en septembre. Puis de 10 h à 17 h jusqu’au 24 décembre. Centre Juno Beach 7,00 €. Exposition temporaire seule : 3,00 €. Parc Juno seulement (dès 6 ans) : 5,50 €. Centre Juno. Beach + Parc Juno : 11,00 €. Gratuit pour les anciens combattants et veuves de guerre 1939-1945, les invalides de guerre et les enfants de moins de 8 ans accompagnés.

Tilly-sur-Seulles 
au cœur de l'enfer

Les restes de la statue du Christ sont exposés dans la chapelle de Notre Dame du Val, au cœur du village, pris et repris 23 fois en un mois en 1944. ©Stéphane Jacquet/Association Tilly 1944

Sur le Front britannique de la bataille de Normandie, à partir du 9 juin 1944, un nom de village va reléguer dans l’ombre tous les autres, notamment celui de Caen, l’un des objectifs stratégiques du jour J. Un nom que l’Histoire retiendra bientôt comme l’un des épisodes les plus tragiques de toute la bataille de Normandie : Tilly-sur-Seulles. Prendre Tilly pour libérer Caen Tilly-sur-Seulles, Lingèvres, Cristot, Boislondes autant de noms qui symbolisent l’âpreté des combats qui, entre Caen et Bayeux, marquèrent les trois premières semaines suivants le Débarquement. Tilly-sur-Seulles, bien que ne constituant pas un objectif pour les troupes alliées, va devenir la charnière de la bataille de Caen et sera l’un des premiers villages de Normandie détruits par les combats. 

Le village pris et repris 23 fois en un mois,
détruit à 70 % 

Pris et repris 23 fois par les belligérants pendant près d’un mois, le village sera sinistré à près de 70 % et perdra près du dixième de sa population. Des centaines de soldats meurent pour percer ou défendre le Front de Tilly. Les bataillons britanniques perdent, ainsi, en moyenne 200 hommes par jour durant cette période. Depuis 73 ans, les canons se sont tus dans le village de Tilly sur Seulles et les communes environnantes. Mais, le souvenir de cette tragédie reste vivant dans la Région. Plus d’un ancien soldat est revenu en pèlerinage à Tilly où civils et combattants ont vécu l’une des batailles les plus sanglantes de la bataille de Normandie. 

Un musée inauguré en 1979 

Pour entretenir le souvenir, il était nécessaire d’y laisser un témoignage. Quoi de plus approprié qu’un Musée ? C’est ainsi que quelques années après la guerre, quelques habitants de la ville dont Paul Jéhenne, s’attelèrent au projet et l’endroit choisi fut la Chapelle de Notre Dame du Val. Située au cœur du village, cette chapelle du XIIe siècle a connu bien des vicissitudes au cours de sa longue histoire. Dès 1375, elle est en pleine activité. Les offices religieux y sont célébrés. Dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, le marquis d’Orceau, propriétaire du château de Tilly, fait ériger la chapelle en église paroissiale et la rebaptise du nom d’église « Saint-François ». Vers la fin du XIXe siècle, l’édifice est désaffecté. Les offices sont alors célébrés dans l’église « Saint-Pierre ». La Chapelle sert alors de grenier, de cave, d’étable, d’abattoir et de dépôt de marchandises pour un restaurateur. En 1944, la Chapelle est en grande partie détruite suite aux bombardements. Ce n’est plus qu’une ruine. Le bâtiment restera inutilisable jusqu’en 1965 quand la Commune décide de sa restauration par les Bâtiments de France et le soutien financier du Comité du Débarquement. De 1968 à 1979, elle sert de salle d’expositions. Depuis son inauguration, le 6 juin 1979, grâce au soutien de Raymond Triboulet, Président du Comité du débarquement et d’Albert Grandais, qui a réalisé les cartes et participé à la Muséographie initiale, Tilly-sur-Seulles dispose d’un musée qui témoigne de la rare violence des combats de la bataille de Tilly. « Tilly meurtri mais Tilly reconstruit… » 

Monument historique, hommage aux victimes civiles 

Aujourd’hui, la Chapelle est un monument historique classé qui appartient à la Commune, et le Musée est un Musée de France. Depuis 2008, Stéphane Jacquet en est le responsable. Avec l’aide des membres de l’association Tilly 1944, une nouvelle muséographie est en place depuis 2008. Chaque année, elle est renouvelée et est accompagnée d’une exposition temporaire. Le musée retrace les violents combats qui se sont déroulés en juin et juillet 1944 à Tilly-sur-Seulles et dans les communes environnantes telles qu’Audrieu, Cristot, Chouain, Hottot-les-Bagues, Fontenay-le-Pesnel, Lingèvres, Verrières, Villers-Bocage ainsi que les souffrances subies par les populations civiles. 

« Une impression d’authenticité rarement éprouvée ailleurs » 

« L’ensemble de la collection est issu du champ de bataille, ce qui en fait l’une des grandes particularités du Musée », explique Stéphane Jacquet. 

« Des documents inédits, dont de nombreux témoignages, photographies, mannequins et objets illustrent les événements tragiques de l’été 1944 sur le front de Tilly et confèrent à l’ensemble une authenticité, à la fois de valeur historique et de mémorial de piété. La qualité des collections, jugent les experts, laisse une impression d’authenticité rarement éprouvée ailleurs. Ce musée est au cœur de l’Histoire, puisque, dans un monument historique et sur le site de la bataille, il s’adresse aussi bien à ceux qui désirent enrichir leurs connaissances sur le Front de Tilly avant, pendant et après la bataille, qu’à ceux qui souhaitent se recueillir en mémoire des victimes civiles dont la liste figure sous la forme d’un mémorial ». 

La statue de Jeanne d’Arc touchée en plein cœur 

La statue de Jeanne d’Arc touchée en plein cœur par un éclat d’obus illustre les souffrances subies par la population. La statue a été inaugurée le 3 octobre 1909 sur la place du marché. C’est la seule statue de Jeanne d’Arc inaugurée l’année de sa béatification par le Pape. En juin 1944, la statue de fonte est très endommagée par des éclats d’obus qui la transpercent au niveau du cœur. La « Jeanne d’Arc au cœur percé » se trouve aujourd’hui devant le Musée.

Symbole de la souffrance des Tillois pendant l’été 1944 

La statue du corps du Christ à l’intérieur du Musée a été retrouvée en 1971 au cours du terrassement pour la réalisation du parking qui se trouve en face de l’église Saint-Pierre. En 1944, celle-ci était fixée à la croix du Calvaire et avait été décrochée lors de la bataille afin de la préserver, puis déposée dans la ferme Bidet qui abritait une salle paroissiale. Cette ferme fut détruite lors des combats puis rasée. La statue y fut ensevelie. Les restes de la statue sont depuis exposés dans la Chapelle. Elle est également le symbole de la souffrance des Tillois pendant l’été 1944. 

■ Musée de la Bataille de Tilly-sur-Seulles, Chapelle Notre Dame du Val. Ouvert du 1er mai au 2 octobre, tous les Week-ends et jours fériés de 10 h à 12 h et 14 h à 18 h. Et toute l’année sur rendez-vous auprès du responsable pour les groupes d’au moins 10 personnes (Tél. : 06 07 59 46 02). Ouvert du 30 avril au 2 octobre, tous les week-ends et jours fériés de 10 h à 12 h et de 14 h à 18 h. Renseignements au 06 07 59 46 02. Courriel : association@tilly1944.com Site internet : www.tilly1944.com

Ver-sur-Mer, principale tête de pont britannique

Le canon automoteur M7 Sexton (ici, celui exposé Avenue du 6 juin, à Ver-sur-Mer) a été largement utilisé comme artillerie de campagne durant le Débarquement et la Bataille de Normandie. ©Frédéric Bourgeois/La Renaissance le Bessin 

Mardi 6 juin 1944, 7 h 15. Les premiers soldats britanniques débarquent sur Gold Beach, cette plage bordée par les communes de Port-en-Bessin et Ver-sur-Mer et attribuée à la 50e division d’infanterie britannique. Si les forces alliées peinent à faire taire un canon de 88 mm à l’est de Ver, aidés par des chars spécialisés (79e division blindée du général Hobart), globalement, les Britanniques progressent bien. 25 000 hommes A Ver-sur-Mer, les bombardements aériens de la nuit du 5 au 6 juin et navals à l’aube ont bien entamé le moral de l’ennemi. Mais les Britanniques font quand même face à de farouches affrontements. Au Hamel (Asnelles), à l’est, et à La Rivière, à l’ouest. 25 000 soldats ont débarqué le 6 juin sur le secteur de Gold. 400 ont été tués, blessés ou portés disparus. Un bilan bien moins lourd qu’à Omaha Beach où tout s’est conjugué pour que l’assaut soir un carnage (4 000 hommes perdus). 

Deux musées en un 

Le débarquement sur Gold Beach

Une partie du musée décrypte les opérations du Débarquement sur Gold Beach, et spécialement les moyens mis en oeuvre par l’Intelligence Service britannique chargé de la préparation du débarquement des troupes alliées sur les plages normandes. Le musée présente largement l’assaut victorieux, dans le secteur « Gold Beach-King », de la 69e brigade de la 50e division (Northumbrian) britannique et rend hommage aux soldats qui ont débarqué à Ver-sur-Mer et pris Bayeux, première ville de France continentale libérée. Il a été fondé il y a 21 ans par Michel Rivoire, Pierre Callange (tous deux décédés) et Jean-Pierre Dupont qui en était le conservateur. Il s’est éteint le 30 juillet dernier à l’âge de 83 ans. 

La première liaison aéropostale entre les USA et la France

Le musée comprend un second espace consacré à la première liaison aéropostale entre les Etats-Unis et la France. Le 29 juin 1927, les aviateurs américains Byrd, Acosta, Balchen et Noville décollent de Roosevelt Field (New-York) pour à bord du Fokker baptisé « America » et réussirent à traverser l’Atlantique Nord. Le brouillard intense qui enveloppe Paris les contraint à changer de cap et à amerrir au large de Ver-sur-Mer. Le musée est d’ailleurs installé dans la maison où ils ont passé la nuit le 1er juillet 1927. 

Stanley Hollis, héros du jour J 

Avec ses camarades de la compagnie D des Green Howards, le chef de section Stan Hollis doit prendre la batterie du Mont-Fleury, située au nord-est de Ver-sur-Mer. Le jour J, deux des quatres casemates ont été construites par les défenseurs. La batterie qui domine la côte comprend quatre pièces soviétiques de 122 mm provenant du front de l’est. A l’aube du 6 juin 1944, l’armada alliée ouvre le feu sur le mur de l’Atlantique. Au Mont-Fleury, un seul canon ennemi est alors en place. L’HMS Orion tire pendant près de deux heures. le croiseur atteint la casemate à douze reprises sans causer de dommages majeurs. Pour l’anecdote, la maison de la grand-mère de Jean-Pierre Dupont, surnomée par les Britanniques « la maison à lunette de water » en raison de son allée de gravier blanc circulaire était un point de repère pour la marine afin d’ajuster les fortifications allemandes. Stanley Hollis et ses hommes débarquent et progressent vers la batterie quand la compagnie s’aperçoit qu’ils ont contourné les casemates. Une mitrailleuse allemande ouvre alors le feu. Après une course de 30 mètres à découvert, tout en tirant des rafales de son pistolet-mitrailleur Sten, Hollis parvient sur le toit du blockhaus et jette une grenade dans l’embrasure, tuant deux soldats allemands et obenant la rédition des survivants. Les autres servants (25 soldats) de la batterie se rendent à leur tour en voyant Hollis s’approcher du deuxième point fortifié. Plus tard, dans le village de Crépon, le sergent-major Hollis fait encore preuve de bravoure en sauvant deux soldats pris sous le feu de l’ennemi. Ces actions lui valent la seule Victoria Cross (la plus prestigieuse décoration militaire britannique) décernée le 6 juin 1944. 

Les visiteurs de la Saint-Sylvestre 

Le 31 décembre 1943, le commandement allié, qui suspecte la présence de vasières (infranchissables par les blindés) dans le secteur de Ver-sur-Mer, envoie un commando d’hommes-grenouilles chargé d’effectuer des prélèvements de sol. Après avoir traversé la Manche dans un sous-marin de poche, le major Scott-Bowden et le sergent Ogden-Smith, des Royal Engineers, nagent jusqu’à la côte et effectuent leurs prélèvements tout en entendant les Allemands célébrer la nouvelle année. 

Le M7 Sexton préparait la messe… 

Le canon automoteur M7 Sexton (sacristain) a été largement utilisé comme artillerie de campagne. Il tirait déjà depuis les chalands de transport avant de prendre position à terre où il appuyait l’infanterie. Ce modèle, de fabrication canadienne (à ne pas confondre avec le M7 Priest - le prêtre - des Américains), était armé d’un obusier de 87,5 mm et servi par un équipage de six hommes. Ce blindé spécialisé (artillerie), produit à 2 150 exemplaires, est plutôt rare aujourd’hui (à titre de comparaison, 50 000 chars de combat Sherman, toutes versions confondues ont été produits). Un exemplaire est exposé Avenue du 6 juin. Il a été offert au musée par le fils du Major Robert Kiln, officier dans le 86th (Hertfordshire Yeomanry) Field Regiment Royal Artillery qui a débarqué ici. En juillet 2012, un engin Porpoise a été ajouté au site. Cet appareil, retrouvé dans une prairie de la commune, ressemble à un traîneau et servait au transport de munitions. Ce blindé, toujours impeccable, est repeint chaque année par des volontaires britanniques.

Frédéric Bourgeois

■ Musée America Gold Beach, 2, place Amiral Byrd. Ouverts tous les jours, de 10 h 30 à 17 h 30. Fermé le mardi du 1er septembre au 31 octobre. Adulte : 4,5 €. Enfant : 2 € (- 17 ans). Tarif étudiant : 2,5 €. Gratuité - 5 ans et vétérans. Teél. : 02 31 22 58 58. Mail : centre.saint.exupery@wanadoo.fr