Comme les autres

Handicapés : le quotidien en République Démocratique du Congo

Dans le monde entier, les personnes vivant avec un handicap accèdent plus difficilement à l'éducation et à la santé, ont moins d’opportunités économiques et courent de plus grands risques de tomber sous le seuil de la pauvreté. Cette situation est encore plus dramatique à l’Est de la République Démocratique du Congo, affectée par des décennies de conflit armé. Le CICR répond aux besoins spécifiques des personnes handicapées à travers son programme de réadaptation physique qui apporte un soutien aux centres orthopédiques Heri Kwetu à Bukavu et Shirika La Umoja à Goma, mais également au Centre de Rééducation pour Handicapés Physiques à Kinshasa. Les victimes du conflit armé et de violences, ainsi que d’autres personnes vivant avec un handicap, bénéficient ainsi d'un accès aux activités de réadaptation physique et aux divers appareils assurant la mobilité, tels que les orthèses, les prothèses ou les chaises roulantes. La mobilité est un pas essentiel pour préserver la dignité et contribuer à l’inclusion sociale des personnes vivant avec un handicap. Alyona Synenko, déléguée du CICR et photographe, est allée à la rencontre de ces personnes comme les autres.

Samson, 22 ans, étudiant en économie, 
a perdu une jambe il y a deux ans.

Alyona Synenko/CICR
On sous-estime les personnes handicapées :
il faut les laisser s'exprimer !

Quand je suis sorti de l'hôpital, certains de mes amis ont commencé à m’éviter. Mais, petit à petit, j’ai fait d’autres connaissances : je fréquente beaucoup les gens pour pouvoir m’intégrer. Je continue mes études. Parfois je n’ai pas d’argent pour payer le transport, donc je dois marcher jusqu’à l’université. Avec ma prothèse, la route me prend presque deux heures et demie. Lorsque je serai ministre de l’économie, je ferai construire un centre de formation pour les handicapés. On sous-estime les personnes handicapées : il faut les laisser s’exprimer !

Pascasie, 42 ans, mère de famille, 
a perdu une jambe il y a deux ans.

Alyona Synenko/CICR
Je suis fière de marcher avec ma prothèse.
Je suis comme les autres.

Il était difficile d'apprendre à marcher avec la prothèse. Malgré la douleur, je m’efforçais à réaliser mes premiers pas. Maintenant je marche bien, je monte et je descends des collines et des escaliers. Je vais seule au marché, je fais mes courses et je m’occupe de mes enfants. Je suis fière de marcher avec ma prothèse. Je suis comme les autres.

Robert, l'époux de Pascasie

Quand mes parents ont appris ce qui était arrivé à Pascasie, ils ne pensaient plus la revoir. Chez nous, on raisonne comme ça : « Si nous, qui avons tous nos membres, avons du mal à trouver du travail pour survivre, qu'est-ce qu’on peut attendre des personnes handicapées ? » On les croit incapables de tout. Ils étaient dès lors très étonnés de voir Pascasie s’occuper des enfants comme avant ! Moi-même, je ne croyais pas qu’elle pourrait retravailler un jour. Sans elle et avec quatre enfants, je n’aurais pas pu m’en sortir ! J’aurais été si malheureux !

Esther, 31 ans, couturière,
a perdu une jambe il y a 8 ans.

Alyona Synenko/CICR
On pense que les personnes handicapées n'ont pas
de valeur, qu'elles n’ont pas le droit de vivre
comme les autres.

Après mon amputation, j'ai perdu toutes mes clientes : elles me croyaient incapable de travailler aussi bien qu’avant. Mon époux m’a abandonnée. J’avais souvent l’impression que les gens ne voulaient pas m’approcher, qu’ils étaient scandalisés de me voir marcher avec une prothèse. Ici, on pense que les personnes handicapées n’ont pas de valeur, qu’elles n’ont pas le droit de vivre comme les autres.

Mais je ne fais pas attention à cela. Même lorsque je n’avais plus de clientes, je continuais à travailler. Je faisais des habits pour ma mère : « Qui les a faites pour toi ? » lui demandaient souvent des femmes. Elle les envoyait alors chez moi. C’est ainsi qu’après deux ans, j’ai de nouveau eu assez de clientes pour ne plus être obligée de demander de l’argent à mes parents.

Bukavu, avec toutes ses collines, n’est pas une ville facile à habiter pour une personne handicapée ! Le centre orthopédique et l’église sont les deux endroits que je fréquente.

Imane, 28 ans, charpentier,
a perdu une jambe il y a 3 ans.

Alyona Synenko/CICR
J'ai dû apprendre un nouveau métier
et recommencer ma vie à zéro.

J'étais charpentier avant. Quand j’ai perdu ma jambe, ma femme est partie. Mes frères, qui avaient leurs propres problèmes, ne pouvaient pas s’occuper de moi. Je suis donc resté seul. J’ai dû apprendre un nouveau métier et recommencer ma vie à zéro. J’ai commencé à faire de la couture. Pour l’instant, j’ai peu de clients et j’arrive difficilement à payer les loyers de ma maisonnette et de mon atelier. Au début, il était difficile d’apprendre à marcher avec une prothèse, mais maintenant les gens ne remarquent même pas que je n’ai qu’une seule vraie jambe.

Autre contexte, même problématique : l'Afghanistan. 

Il y a près de 25 ans, Alberto Cairo créait le Centre orthopédique du CICR à Kaboul. Cette institution allait se démultiplier à travers tout le pays. Grâce à l'initiative, l'engagement et l’opiniâtreté d'Alberto Cairo, l'Afghanistan compte aujourd'hui 7 établissements CICR qui suivent chaque année 80 000 handicapés.

Voici son témoignage émouvant et nécessaire sur son expérience et le handicap.

Le grand photographe américain James Nachtwey a réalisé, il y a quelques années, un magnifique travail sur le handicap en Afghanistan. 

Annexes

Découvrez un sujet photographique sur la chirurgie de guerre en RDC

L'actualité humanitaire sur le blog de la délégation française du CICR : L'humanitaire dans tous ses états