La croisière au Havre, l'enjeu économique
de demain

En quelques années, les paquebots de croisière sont devenus des invités réguliers le long de la pointe de Floride, dans le port du Havre (Seine-Maritime). Ces géants des mers sont de plus en plus nombreux à faire escale dans la Cité océane, le temps d'une journée. En 2017, près de 400 000 passagers ont été comptabilisés.

Plus qu'un spectacle visuel apprécié de nombreux promeneurs, le marché de la croisière représente avant tout un atout économique, sur lequel la communauté de l'agglomération havraise (Codah) compte. Objectif : devenir le port d'embarquement de Paris et atteindre le million de croisiéristes passant par Le Havre, d'ici 2025.

Un marché en plein boom


Les chiffres parlent d'eux-mêmes. En 2018, 140 escales sont attendues, pour environ 420 000 passagers. Si le marché français de la croisière commence à se développer, le port du Havre est devenu, en quelques années, un port d'attache pour plusieurs compagnies maritimes. Un constat que relève le Grand port maritime du Havre (GPMH) :

En 2005, nous avions enregistré 50 escales de paquebots de croisière, pour 70 000 passagers, soit un ratio de
1 400 croisiéristes par navire, constate Charlotte Bellanger, chargée du développement du trafic de passagers au GPMH. En 2017, nous atteignions 128 escales, pour environ 400 000 passagers, soit une moyenne de 3 100 personnes par bateau.

Des escales plus nombreuses, avec des navires toujours plus imposants, en taille et en capacité d'accueil... Des éléments à prendre en compte, pour garantir un bon accueil à quai et donner l'envie aux compagnies de privilégier Le Havre pour ses escales sur la façade maritime ouest de la France. Les efforts réalisés semblent payer, comme le relève Jean-Baptiste Gastinne, vice-président de la Codah, en charge du tourisme :

Une étude a démontré qu'environ 600 000 passagers passent par les ports de la façade maritime entre Bayonne et Dunkerque. Le Havre accueille les deux tiers de ce marché et 50% des bateaux.

Un résultat qui récompense, pour l'élu, "un long travail mené depuis 10-15 ans pour positionner la ville comme "Gateway to Paris".
Mais, désormais, il n'est plus question de n'être qu'un simple port d'escale. L'objectif est de devenir "le port d'embarquement de Paris", en développant les têtes de ligne (départs de croisières avec embarquement depuis le port du Havre).

Le Havre
« port d'embarquement
de Paris »

Sept triples escales de paquebots de croisière sont prévues en 2018 dans le port du Havre. (©Haropa-Port du Havre)

En juin 2017, le baptême du MSC Meraviglia, fleuron de la compagnie MSC Croisières, dans le port du Havre, avait permis à la ville de démontrer sa capacité à accueillir des géants des mers, mais aussi à coordonner l'embarquement de plusieurs milliers de passagers. Une ambition que la Codah et le GPMH veulent mettre en avant auprès des compagnie de croisières pour attirer les croisiéristes.

40 embarquements en 2018

Avec le projet "Le Havre Normandy cruise vision 2025", lancé en 2018, l'objectif est de démontrer que le territoire travaille pour développer ses capacités d'accueil. Un défi de taille, qui commence à porter ses fruits, avec l'augmentation du nombre de têtes de ligne partant du Havre.

Nous constatons une croissance très forte, avec 40 embarquements pour des départs de croisières, en 2018, ajoute Jean-Baptiste Gastinne. Alors que nous présentions auparavant Le Havre comme port de Paris, pour des escales, nous nous adressons aujourd'hui à la clientèle française, pour positionner Le Havre comme port d'embarquement, à deux heures de Paris.

22 départs de croisières sont proposés par la compagnie MSC Croisières, une douzaine d'embarquements avec Princess Cruises et quelques-uns par Costa Croisières. 250 à 400 passagers embarqueront, en moyenne, par paquebot, durant l'année, "et deux embarquements concerneront 800 à 900 passagers".

À noter également, après le succès de la transatlantique imaginée par Cunard Line à bord du Queen Mary 2, en 2017, pour les 500 ans du Havre, une nouvelle croisière reliant Le Havre à New York est programmée du 27 septembre au 4 octobre 2019.

Des retombées économiques conséquentes


Des études ont permis d'évaluer le montant des retombées économiques de la croisière à hauteur de 31 millions d'euros, dont 24 millions pour toute la Normandie (excursions, débarquement au Havre, etc). Les sept millions d'euros restants sont plutôt injectés en région Île-de-France pour les excursions à Paris.

En 2018, de nouvelles études auprès des passagers débarquant au Havre seront réalisées pour déterminer le panier moyen de chacun.

Les croisiéristes viennent principalement en ville pour des visites et du shopping, notamment autour de la gastronomie française. En 2016, le panier moyen était de 96 euros, contre 87,30 euros en 2011. Cela représente 5 millions d'euros de chiffres d'affaires pour les acteurs économiques de la ville.

Pour l'ensemble des passagers d'un navire, il est estimé que la moitié d'entre eux part en excursion hors de la ville. Sur l'autre moitié restant au Havre, entre 93 et 95% des croisiéristes descendraient du navire pour se promener dans la Cité océane.

Des quais d'embarquement à aménager

De véritables géants des mers font escale régulièrement le long de la pointe de Floride, comme ici le MSC Meraviglia. (©Valentine Godquin/Normandie-actu)

De gros travaux sont menés ces dernières années, le long de la pointe de Floride, par le GPMH, pour l'accueil des navires, et par la Codah, pour tout ce qui concerne les terminaux d'accueil.

En 2017, le quai Pierre-Callet "qui montrait des signes d'instabilité", a connu une phase de chantier de plusieurs mois. Il s'agissait alors de la première rénovation du site, depuis sa construction après-guerre.
D'autres travaux sont prévus quai Roger-Meunier et sur le site industriel de Sotrasol, aux abords de l'avenue Lucien-Corbeaux, l'entreprise prévoyant de quitter les lieux dans les années à venir. 10,5 millions d'euros sont engagés sur ces chantiers par le GPMH, avec le soutien de la région Normandie et de l'État.

Des terminaux refaits à neuf

En parallèle, la Codah souhaite renforcer ses moyens d'accueil sur place et permettre l'utilisation régulière des trois postes à quai disponibles sur le site, en aménageant, aux abords, des terminaux de croisière répondant aux attentes des compagnies.

Nous souhaitons avoir trois terminaux d'accueil et que l'un des trois soit entièrement dédié aux embarquements. On pourra y réaliser toutes les formalités d'embarquement, de douane, l'enregistrement des bagages..., ajoute Jean-Baptiste Gastinne.

Ces trois terminaux devraient être réalisés entre 2020 et 2025. Le hangar 12 a d'ores et déjà été rénové et aménagé en 2017, pour un montant de 300 000 euros. Des travaux financés par la Codah. Les hangars 1 et 12 seront ainsi entièrement dédiés à la croisière. Le hangar 13, quant à lui, sera en partie aménagé pour l'accueil des passagers.

Un autre marché porteur : les croisières fluviales

Entre 100 et 120 escales de paquebots de croisière fluviale font escale au Havre, en 2018. (©Valentine Godquin/Normandie-actu)

Au Havre, une autre forme de croisière est en plein essor, promettant pour l'année 2018 entre 100 et 120 escales : la croisière fluviale.
Amarrés le long du bassin de l'Eure, au pied de l'École nationale de la marine marchande (ENSM), ces paquebots de croisière fluviale sont de plus en plus nombreux à passer par la Cité océane, après un voyage le long de la Seine. Une formule qui suscite un fort engouement auprès des touristes étrangers.

Après une année 2017 en dents de scie, à la suite d'un incident et de travaux de rénovation sur le pont du Hode, dans l'agglomération havraise, l'activité a repris son cours au début du printemps 2018.

Une clientèle plus âgée

Accueillant 100 à 150 passagers à leur bord, ces paquebots de croisière fluviale bénéficient d'un site d'accueil privilégié, situé à dix minutes à pied de la gare ferroviaire.

Le quai de Marseille a été aménagé pour bien les accueillir, avec des accès piétons facilités, ainsi que des espaces pour le stationnement des autocars emmenant les passagers en excursion. Des aménagements paysagers ont également été réalisés pour embellir le cadre, énumère Jean-Baptiste Gastinne.

Environ 15 000 passagers passent à l'année par Le Havre, la particularité de ces circuits étant de proposer aux croisiéristes de passer plusieurs jours en escale, sur une même ville. Des vacances plus calmes, sur une durée moyenne plus longue que les croisières maritimes, mais aussi plus coûteuses.

Le public est différent. Ce sont des passagers qui ont plus de temps et plus de pouvoir d'achat. Il y a notamment beaucoup d'Américains, de Suisses, qui viennent à Paris pour ensuite faire une croisière le long de la Seine.

Pour attirer plus de compagnies, un "choix stratégique" a également été fait, en n'imposant pas de droits de port aux paquebots arrivant à quai. Un moyen supplémentaire d'imposer Le Havre comme un port d'escale incontournable.

À noter, la deuxième édition du Salon de la croisière se tiendra au Havre, le vendredi 8 juin 2018 : il permettra aux visiteurs d'aller à la rencontre d'une petite quinzaine de compagnies de croisière. Tout ce qu'il faut pour rêver à ses prochaines vacances !