Des immeubles pas ordinaires à Poitiers

Textes : Marie-Catherine Bernard
Photos : Patrick Lavaud

Le paquebot " Les Trois Rivières "

Un paquebot avec sa passerelle, une haute cheminée, des coursives et des hublots. - (Photo NR, Patrick Lavaud)

Notre découverte d'immeubles locatifs publics originaux vous transporte dans ce premier article sur un immense bateau amarré aux Trois-Cités.

Il aura fallu un bon coup de peinture blanche sur la longue façade percée de hublots des Trois-Rivières, aux Trois-Cités, pour que l'architecture très particulière de la résidence refasse surface. La haute cheminée rouge et la passerelle accrochée depuis un an au bateau y participent aussi pour beaucoup. Le chantier de réhabilitation de la carcasse et de ses 100 logements a repris après une interruption de plusieurs mois, l'amiante s'étant révélée beaucoup plus présente que prévu.

Une combinaison de modules

L'ensemble immobilier est composé de deux bâtiments collectifs et de six bâtiments de logements individuels et superposés, implantés sur une parcelle en forme de L.
Les Trois-Rivières gérées désormais par le bailleur social Ekidom avaient bien besoin d'être rénovées. L'agence A & B architectes en charge du projet de rénovation rappelle dans son étude préalable : « L'ensemble date de la fin des années 1970 et appartient à un courant de conception baptisé Plan Architecture Nouvelle, raison pour laquelle la résidence porte aussi le nom de Pan des Sables. Elle fait appel à la construction industrialisée et elle est très représentative de l'architecture proliférante et combinatoire enseignée en architecture par Jacques Kalizs, créateur de l'école de Nanterre. Christian Simon, l'un des deux architectes concepteurs des Trois Rivières y enseignait également. »

Les constructions apparemment complexes sont en fait composées de modules identiques « dont l'assemblage a généré des logements organisés en simplex, en duplex et en triplex pour les logements les plus grands », tous pourvus de terrasses ou jardinets. Les extensions pyramidales, appelées « auvents » par les habitants, sont réalisées en ossature bois.

A l'arrière, une rue dessert les appartements donnant sur les coteaux. Des coursives parcourent les étages comme une invitation au voyage.

La résidence est située au 72 avenue Rhin-et-Danube, aux Trois-Cités.

Marie-Catherine Bernard

" Je me sens bien ici, mon chat aussi "

« Nous sommes arrivés parmi les premiers dans la résidence, se remémore Françoise Lerouge dans le trois pièces où elle vit depuis le 1er décembre 1979. Les logements étaient terminés mais il y avait des choses à reprendre. » Elle est tombée sous le charme du duplex, des poutres apparentes dans la « véranda » jouxtant la terrasse, de la salle de bain et sa baignoire, un confort qu'elle ne connaissait pas dans la maison de ses parents, près du passage à niveau, à Saint-Benoît. Seul reproche : le tout électrique.

« J'avais choisi de venir ici sur une proposition de M. Chamard qui m'avait dit qu'un nouvel immeuble serait accessible dans quelques mois et parce que mon frère habitait aux Trois-Cités », raconte l'ancienne ouvrière de la Saft aux Trois-Bourdons.
Mais, regrette-t-elle « le bâtiment a mal vieilli, il aurait fallu le refaire il y a 10 ans ; les façades colorées se sont ternies », et surtout, « l'ambiance a changé ». « Avant, les gens se côtoyaient beaucoup, ils s'entraidaient. Maintenant plusieurs appartements sont vides en raison des travaux. » Ses enfants aimeraient qu'elle déménage. Elle hésite car ici Françoise Lerouge, connue pour sa sociabilité, a des amis. « C'est difficile d'envisager de rompre les liens et on a les commerces, les bus à proximité. » Finalement, « je me sens bien ici, mon chat Lucky aussi ».

Vue sur le Belvédère Rivaud

L'Acropole construite en 1987 s’harmonise avec la ville historique. Mais l’ambition d’en faire un véritable quartier n’est pas vraiment atteinte.

La résidence Belvédère Rivaud gérée par le bailleur social Ekidom est enserrée dans un ensemble de constructions baptisées l'Acropole Rivaud. 241 appartements y ont été aménagés dont 151 en location. L'architecte Pierre-Yves Laval a conçu l'ensemble immobilier, construit en 1987, comme un véritable quartier.

Un forum animé mais des commerces absents

Côté boulevard de Tison, les bâtiments s'élèvent sur différents niveaux au-dessus des remparts qui rappellent l'enceinte médiévale et masquent le parking semi-enterré. Les locataires qui résident côté jardin ont une vue imprenable sur la vallée du Clain, une partie de la vieille ville et sur les Trois-Cités et les prémices de Poitiers-Sud. Côté rue du 125e Régiment d'Infanterie, la façade attire moins l'attention. Il faut cheminer jusqu'au forum pour s'étonner de l'aspect majestueux des colonnes qui supportent des logements et bordent au rez-de-chaussée divers locaux, la plupart vides.

« Le projet urbain élaboré par l'architecte a cinq objectifs principaux », rappelaient dans un document daté de 1987 l'adjointe au maire à l'environnement, Denise Caisso et l'urbaniste de la Ville : « " Recréer des espaces urbains " : place centrale, passages couverts sous des arcades, patios. " S'enrichir de la mémoire urbaine " en respectant les implantations et les tracés initiaux. " Marquer le site en créant une véritable porte de ville ", " Regrouper les différentes fonctions de la vie ", " Rendre perceptibles les monuments publics ", par une implantation et une architecture spécifiques ».

Le forum (resté longtemps dépouillé de toute végétation) avait pour vocation d'être un lieu d'animation autour duquel prendraient place les commerces et les principaux équipements publics dont le gymnase. La dalle de béton est effectivement un terrain de jeux pour les enfants et les adolescents, par contre peu de commerces ont été au rendez-vous. Un cabinet d'architectes, un centre de loisirs, une école privée, une crèche s'y sont installés. La Ville de Poitiers y a implanté des services. Un pari architectural pas totalement atteint.


" Un quartier tranquille, cosmopolite "

François Popieul souhaite résider encore longtemps à Rivaud.

François Popieul a emménagé dans le Belvédère en 2014 après avoir résidé à Vouneuil-sous-Biard. Il explique son choix : « Je voulais être le plus près possible du centre-ville. Il y a peu de logements sociaux près du plateau ». Il ne s'est pas laissé impressionner par « les propos négatifs sur l'image de Rivaud ». « Cette image ne correspond pas du tout avec ce que je vis tous les jours », témoigne-t-il assis sur l'un des bancs caché derrière les jardinières au milieu du forum. Un forum où il y a toujours beaucoup d'animations car les enfants de l'école Sainte-Faustine viennent y jouer, ainsi que ceux du centre de loisirs La Rivoline et les bambins de la crèche. Après l'école, les jeunes habitants prennent la relève. « Ce quartier est tranquille, cosmopolite », poursuit-il. Il reconnaît « quelques petits désagréments, mais les difficultés sont les mêmes dans tous les grands ensembles ».
Il présente la vue panoramique qui s'offre de la corniche et celle époustouflante de son logement au troisième et dernier étage. L'appartement est classique sans aucune mesure avec les hautes colonnes qui entourent majestueusement le forum, les décrochés, coursives, escaliers en nombre. Si de loin quand il observe l'acropole, il en apprécie les murailles, il trouve que les éléments qui les surmontent « font fouillis ».
Il se plaît à Rivaud « où l'on peut se loger pour pas très cher », aime le centre-ville où se trouvent les magasins. Par contre il regrette que l'ascenseur s'arrête au premier étage et note que les locaux devant abriter des commerces en rez-de-chaussée sont vides de tout occupant. Il a l'intention d'y vivre encore longtemps.

La Résidence de La Souche en met plein les yeux

Le hall monumental bordé de hautes colonnes est le lieu d'accès aux cages d'escaliers. - (Photo NR, Patrick Lavaud)

Cent appartements sont répartis autour d'un immense hall surmonté d’une verrière et planté de palmiers. Un " monument " construit en 1984.

La résidence de la Souche se cache à l'angle de la rue qui porte le même nom (au numéro 4), une voie qui débouche sur l'avenue de la Libération. Le lieu n'est pas inconnu des Poitevins car le « monument » a été construit en 1984 à l'emplacement du dépôt de bus occupé de 1899 à 1980 par la Compagnie des transports de Poitiers. La Ville a racheté l'ensemble immobilier en 1982.

La présence de la résidence est signalée par un cube massif (un appartement de cinq pièces) arrimé à un portique et déposé sur un « cylindre », l'escalier en colimaçon. Derrière, trois groupes d'immeubles dont les façades classiques ont gardé leur couleur vieux rose. Les encadrements en béton qui les rythment ont mal vieilli. Des filets les entourent pour éviter la chute d'éléments.

Les locataires ont accès à un jardin

Il faut connaître le code pour avancer jusque dans le hall du bâtiment abritant cent logements. Il laisse le visiteur sans voix. Encadré de hautes colonnes, il est surmonté sur toute sa traversée d'un toit pentu en plexiglas sur lequel « crépite la pluie, et qui ne préserve ni des fortes chaleurs, ni du froid » (*), confie le gardien. Deux palmiers s'épanouissent à chaque extrémité. Entre les deux, un bassin couvert de nénuphars et les boîtes aux lettres regroupées par commodité.
Les appartements sont étagés autour de l'agora du rez-de-chaussée au troisième étage que l'on atteint également par des escaliers en colimaçon. On imagine les habitants s'interpellant de cuisine en cuisine. Un petit air du sud flotte sur les lieux. Le hall est avant tout un espace de passage pour accéder aux cages d'escaliers. Toutefois « à Noël, nous organisons un arbre de Noël avec des locataires et la fête des voisins quand le temps ne permet pas d'aller dans le jardin », confie Robert Bécaud.

La résidence de La Souche a été dessinée par l'architecte Yves Jean Laval. Son projet « s'inscrit dans une continuité à la fois urbaine et historique (rappel de l'église Saint-Hilaire et de l'ordonnancement du parc de Blossac) ». Il lui a valu d'être lauréat du Palmarès national de l'habitat en 1988.

Marie-Catherine Bernard

(*) Les plaques doivent être changées par le bailleur social Ekidom.


Sous le charme d'un lieu exotique

Dany réside à La Souche depuis 28 ans. Elle figure donc parmi les plus anciens locataires de la résidence. « J'ai des amis qui habitaient ici. J'ai repris leur duplex au troisième étage avec vue sur les jardins. Ce lieu avec son ambiance exotique m'a beaucoup plu quand je l'ai découvert. Les palmiers ont grandi pendant que nous, on vieillissait », sourit-elle. Elle apprécie également son architecture avec les colonnes et d'autres éléments qui lui donnent l'aspect d'un temple. Elle et son mari ont envisagé de déménager pour s'installer dans une maison. Mais le temps passant, ils y ont renoncé. « Une maison aurait nécessité beaucoup d'entretien extérieur. Et nous avons un jardin au bord du Clain à 7 minutes d'ici à pied. Nous voyageons aussi plusieurs semaines par an. En notre absence, nous n'avons jamais eu de problème », commente-t-elle. Le couple ne renoncerait pas davantage à la proximité du centre-ville.
Dany regrette toutefois que la résidence se dégrade, les palis en béton armé se délitent. « Un bloc a failli tomber sur Robert [NDLR : le gardien]. C'est moi qui l'ai sauvé en l'interpellant juste avant sa chute », se remémore-t-elle avec effroi. Si elle aime le crépitement de la pluie sur la verrière, elle constate qu'elle est en mauvais état. Cette dégradation aurait un effet repoussoir. « Des appartements sont vides, la population change », observe-t-elle.

La résidence de Beaulieu en nids d'abeilles

La résidence « Maisons et jardins » à Beaulieu sous son aspect méditerranéen. - (Photo NR, Patrick Lavaud)

Les habitants de Beaulieu l'ont surnommée " Les Boulons " en ignorant souvent qu’elle s’appelle “ Maisons et jardins ”. Sa construction date de 1978.

La résidence nommée par les habitants de Beaulieu « Les Boulons » attire l'attention en raison de son architecture. Trois groupes d'immeubles sont répartis autour de placettes le long de l'avenue de Iaroslav (1). Les appartements de forme hexagonale sont construits en grappes. La résidence a été construite en 1978 dans le cadre de la « Zone d'aménagement concerté » qui a transformé le hameau « Beaulieu » près de la ferme de Geniec en « ville nouvelle ».

L'aménagement avait été confié par le District de Poitiers à l'office public HLM de la Ville de Poitiers. Sur les 35 équipes d'architectes répondant au concours lancé par le bailleur social, 6 avaient été retenues (2).

Les jardinières ont été supprimées

Leurs projets ont pris corps en s'intégrant dans ce principe d'aménagement : les voies de circulation créent « un dessin souple fait de courbes au milieu desquelles seront construits des îlots d'immeubles et d'équipements reliés par des espaces de verdure reliant la ville à la campagne toute proche ».
Dans un article publié en 1976, Yves Thiollet ancien journaliste à La Nouvelle République écrit : « Une autre opération issue du concours " Innovation " organisée par l'Équipement, devrait débuter dans 5 ou 6 mois et portera sur 150 logements en petits collectifs. Baptisée " Maisons et jardins ", elle privilégiera les terrasses individuelles pratiquement insérées dans les logements en " nids d'abeilles " ».
La résidence s'appelle effectivement « Maisons et jardins » et a été dessinée par le Cabinet d'Urbanisme et d'architectures B. Schoeller et Associés, basé à Paris. Pierrette Réau présidente du Centre d'animation de Beaulieu lui préfère cette appellation à celles des « Boulons » « qui en détourne l'image ». « Les terrasses étaient à l'origine toutes équipées de jardinières que les locataires fleurissaient mais des problèmes d'infiltrations d'eau ont amené le bailleur social [NDLR : actuellement Ekidom] à les enlever », témoigne-t-elle. Les terrasses (désormais ceinturées de garde-corps transparents) subsistent donnant à l'ensemble un air méditerranéen.

(1) La localisation : 2/4/6 allée de Cercigny, 2 allée de Villenon, 6 place de Rochemaux. (2) Source : « Le quartier a 40 ans » dans Au coin de la rue N° 12.



témoignage

De la terrasse, on voit " des lapins, des écureuils et des oiseaux "

Francine, native du Nord de la France, est arrivée à Poitiers en 1964 et réside depuis 12 ans dans la Résidence Maisons et jardins. « Quand on m'a présenté l'appartement, je suis tombée sous le charme car il est très beau même si par rapport à mon salaire le loyer était un peu élevé. Mais il avait aussi l'avantage de ne pas se trouver loin de la faculté où je travaillais comme secrétaire. »
La pétillante retraitée apprécie sa forme hexagonale « qui change des rectangles et des carrés ». « Ça ne m'a pas gênée pour le meubler », ajoute-t-elle. Les infiltrations d'eau résolues depuis ne l'ont pas rebutée.
Sur la terrasse où elle cultive herbes aromatiques et plantes grasses, elle décrit la vue panoramique qui s'étale devant ses yeux, la Ganterie, Montmidi « où habite mon fils », Blossac « d'où est tiré le feu d'artifice mais je préférais quand il l'était du parc des expositions », la vieille ville…
Elle apprécie les espaces verts « bien entretenus » en contrebas. Lapins, écureuils s'y ébattent et toutes sortes d'oiseaux y prennent leur envol.
Elle assure que l'environnement n'est pas si bruyant que cela au regard de la concentration de population mais note que la vie en collectivité peut se révéler parfois délicate.

Marie-Catherine Bernard

La Grand Goule conçue pour l'échange et le partage

La résidence rue de la Fayette à Beaulieu avait pour ambition – à travers sa conception architecturale – de favoriser les rencontres entre les locataires.

Le temps d'un été, l'an dernier, les façades de la résidence La Grand Goule, avenue La Fayette, ont retrouvé des couleurs, celles des compositions en laine réalisées dans le cadre du projet Tricot urbain du collectif La Bulle. Le blanc est de nouveau de rigueur. Il s'est substitué à la couleur brique d'origine.

Une architecture nouvelle

La Grand Goule a été imaginée dans les années 1970 par une équipe d'architectes composée de M. Robain, J.-F. Galmiche et Y.-J. Laval. Elle s'intégre dans la création de la zone d'aménagement concertée de Beaulieu portée par l'Office public d'HLM de la Ville de Poitiers. « Les aménageurs ont directement traité avec le ministère de l'Équipement pour certaines opérations originales. C'est ainsi qu'avec des crédits d'État, ils ont accepté de tenter une expérience communautaire, dans le cadre d'un plan d'architecture nouvelle. Ce projet a séduit le jury par le fait qu'il s'attaque aux grands maux des collectifs et cités nouvelles : l'isolement et l'individualisme », écrivait en 1976 Yves Thiollet, journaliste à la Nouvelle République.

La Confédération nationale du logement a une antenne au rez-de-chaussée de l'un des quatre angles de la résidence formant un imposant quadrilatère autour d'une vaste cour (« agora ») arborée. A l'un des étages, la présidente Pierrette Réau montre un hall équipé d'une cheminée ; derrière, la salle d'activités partagée numéro 9 ; plus haut, une terrasse qui relie deux groupes d'appartements. Elle a le souvenir d'une très grande table dans la cour remplacée par des jeux pour les enfants.

274 logements (des types 2 en majorité) sont répartis sur 4 étages sans ascenseur. La CNL est à l'initiative d'une fête des voisins. L'Afev (*) organise des activités dans l'une des SAP. « Je trouve que ce lieu est agréable mais les contacts entre les habitants sont devenus plus difficiles », admet Pierrette Réau. Les pionniers s'étaient engagés dans l'expérimentation. Elle échappe aux locataires actuels.

(*) Association de la Fondation Étudiante pour la Ville.

Marie-Catherine Bernard

" On mettait des pancartes pour s'inviter "

Abdel Farahi, éducateur à la retraite, vit depuis deux ans au quatrième étage de la Grand Goule. Pas un lieu inconnu pour lui puisqu'il s'y était installé en 1982 pour une durée de deux ans également. Le nom de la résidence lui était familier même s'il était davantage associé à celui de la célèbre discothèque pictave. « Quand j'étais étudiant j'ai loué un studio près de la boîte de nuit », sourit-il.
« Il y a 35 ans, l'ambiance était conviviale dans la résidence, on mettait des pancartes pour s'inviter. Quand il pleuvait, on s'installait sur le banc en ciment devant la cheminée. Dans la salle d'activités partagée on pouvait jouer de la musique », se remémore Abdel Farahi. Il constate qu'il n'y avait pas d'animosité entre les gens, qu'il y avait plus de partage. « Quand je suis revenu en 2017 - j'habitais avant à Bignoux près de mon lieu de travail - je m'attendais à retrouver la même ambiance. Mais les gens sont devenus méfiants, les rapports entre les différentes cultures sont parfois compliqués. Mais je n'ai jamais vu d'agressions. Le seul souci, ce sont les personnes qui s'alcoolisent et fument », commente-t-il. Après avoir travaillé 38 ans dans le social, il ne se sent pas capable de s'engager pour contribuer à un mieux vivre ensemble.
Il a effectué une demande de changement de logement, de préférence une petite maison, dans un autre secteur, même si celui-ci « est bien desservi en bus, commerces, services publics ».
Le Grand Goule dispose de lieux pour favoriser la rencontre, l'échange mais ils ne font pas tout.

M.-C. B.

Le Parvis à la West side story

La façade inclinée avenue de la Révolution (Photo NR, Patrick Lavaud)

La résidence construite en 1995 dans le quartier de Saint-Eloi, présente des façades surprenantes dont une métallique avec des coursives à l'américaine.

La résidence Le Parvis à Saint-Eloi, en face du lycée Saint-Jacques de Compostelle, est la plus récente parmi celles que nous avons présentées au cours de l'été. Elle a été construite en 1995 et a été dessinée par Yves-Jean Laval.


Des arbres cachent la façade du bâtiment du côté de l'avenue de la Révolution. Il faut attendre la chute de leurs feuilles pour constater pleinement son inclinaison. « Cet effet " tremblement de terre " permet à la lumière de mieux pénétrer à l'intérieur des couloirs de circulation », commente l'architecte dans une notice.

L'espace extérieur mis en scène

L'aspect de la façade métallique du second bâtiment, rue du 14-Juillet-1789, est tout aussi surprenant. Elle est animée par des escaliers en diagonale et d'un ascenseur transparent glissant dans un tube. Ils permettent d'accéder aux coursives réparties sur les trois étages. La touche américaine est évidente. « Ces éléments de circulation sont des éléments fondamentaux de mise en scène de l'espace. Habillée de son tulle métallique, la façade façon " West side story " est le garant d'une animation du bâtiment et de l'ensemble du quartier », ajoute Yves-Jean Laval. Les enfants y ont trouvé leur terrain de jeu.

Les deux constructions abritant 87 logements sont reliées par une coursive et réparties de part et d'autre d'un grand hall. Celui-ci s'ouvre sur un vaste parc clôturé. Le hall, la « rue » assez étroite et sa verrière apparaissent comme des reprises de la résidence La Souche également signée par Yves Jean Laval (Lire NR du 1er août). La couleur brique et les palmiers en moins. Au Parvis, les imposantes jardinières posées contre les balustrades sont vides de plantations, elles devaient égayer les structures métalliques et les bétons gris.

En 2012 le bailleur social de l'époque Sipéa (*) a apporté des modifications pour répondre aux besoins des résidents. Le hall « ouvert à tous les vents » a été fermé par d'immenses baies vitrées. Une passerelle a été implantée pour faciliter l'accès au parc et au jardin collectif encore boudé par les habitants. Les coursives extérieures ont été recouvertes pour protéger les locataires des intempéries.
Il manque cependant toujours une âme dans cette résidence. La maison de quartier Seve avait un projet en lien avec le bailleur social pour favoriser les liens entre les locataires. Il n'a pas encore été concrétisé.

(*) La résidence Le Parvis est désormais gérée par Ekidom.

Marie-Catherine Bernard

La tranquillité perdue

Marie-Édith et Urbain Etheve reviennent chez eux, à la Résidence Le Parvis, chargés de courses pour la rentrée scolaire qui avance à grands pas. « Nous y habitons depuis sept ans », confie Marie-Édith dans le hall, un espace parfois très animé. « Nous avons vécu plusieurs années au premier étage. On aimait bien car c'était tranquille mais après le départ de nos deux filles qui poursuivent leurs études dans les universités de Paris et Limoges, nous avions trop de place, nous avons donc déménagé. »

Le couple et leur plus jeune fils résident désormais au troisième étage. « C'est moins bien car il y a plus de bruit », constate la mère de famille approuvée par son époux. Un bruit lié aux nombreux passages sur la coursive en façade qui dessert les logements. Ils apprécient néanmoins la grandeur des appartements, une superficie qu'ils n'avaient pas trouvée lorsqu'ils avaient visité d'autres résidences. Ils aiment aussi le grand jardin clôturé « où les enfants peuvent jouer » et sur lequel donne leur balcon. Toutefois, ils avouent se sentir moins bien qu'avant au Parvis. Alors qu'ils avaient commencé leur déménagement du 1er au 3e étage, ils ont été cambriolés. Un sentiment d'insécurité est né.
S'ils déménagent de nouveau, ils aimeraient louer une maison.