«Les enfants? Un véritable rayon de soleil!»

Silvia Béguelin, infirmière de la CRS, est intervenue au Bangladesh au printemps 2018.

Cela fait maintenant neuf mois que le Bangladesh est confronté à un afflux massif de réfugiés. Depuis le 25 août 2017, 688'000 personnes – selon les chiffres officiels – ont fui les violences dont elles étaient victimes dans l'Etat de Rahkine, au Myanmar. De par son ampleur et sa complexité, il s'agit là d’une des crises les plus graves qu’ait connues cette région au cours des dernières décennies.

Avec ses partenaires, en particulier le Croissant-Rouge du Bangladesh, la Croix-Rouge suisse (CRS) fournit une aide d’urgence dans le camp de réfugiés de Cox’s Bazar. La détresse des gens reste profonde. Pour pouvoir apporter son soutien sur le long terme, la CRS, avec la contribution de la Chaîne du Bonheur, s’attache à améliorer les conditions d’hygiène dans les camps. Elle construit des centres où les femmes et les enfants avant tout reçoivent protection, soins médicaux et conseils (pour en savoir plus).

Silvia Béguelin, infirmière de la CRS, est intervenue au Bangladesh au printemps 2018. De retour en Suisse depuis peu, elle revient sur son quotidien à l'hôpital de campagne de Cox’s Bazar.

Image: CRS, Silvia Béguelin

«J'ai travaillé comme infirmière à l’hôpital de campagne de la Croix-Rouge finlandaise, à Cox’s Bazar. Par le passé, j’ai participé à d’autres missions pour le compte de la DDC et de la Croix-Rouge suisse (CRS). Sur place, nous avons enregistré un grand nombre de décès, surtout parmi les nouveau-nés et les enfants en bas âge. Mais j’ai été impressionnée par le travail remarquable accompli par les infirmières et les médecins locaux. Nous pouvions notamment compter sur de jeunes infirmières au bénéfice d’une excellente formation de niveau Bachelor.

Une route sépare l’hôpital du camp, que j’ai eu l’occasion de visiter. Les conditions de vie y sont incroyablement précaires, avec environ 1 million de personnes entassées dans une grande promiscuité. La nuit, l’obscurité est quasi totale, si bien que les femmes n’osent pas s’aventurer seules dans les dangereuses allées du camp. Même pas pour aller aux toilettes.

La violence et les inégalités hommes-femmes ont été particulièrement difficiles à vivre pour moi. Les hommes décident tout, les femmes n’ont pas leur mot à dire. Nous avons vu des cas extrêmes de violence domestique. Dans le camp, une simple dispute peut rapidement dégénérer et faire des blessés. La violence des hommes à l’encontre des femmes est très préoccupante.»


«Les enfants n'ont guère de perspectives. A l’hôpital, cependant, ils ont toujours été un rayon de soleil pour nous. Dans le camp, l’eau n’est pas potable. C’est pourquoi nous prônons l’allaitement exclusif. Hors de question d’utiliser du lait en poudre!»

La mousson va certainement précariser encore les conditions de vie dans le camp.
Image: CRS

«A l'hôpital, les conditions de travail étaient plutôt bonnes, tout comme la plupart des fournitures. Avant de m’envoler pour le Bangladesh, j’ai toutefois interrogé des collègues déjà intervenues sur place. Suivant leurs conseils, j’ai pu acheter moi-même le matériel médical manquant – sondes gastriques pour nouveau-nés, glucomètres, etc. – et l’emmener dans mes valises. J’ai aussi apporté des sous-vêtements pour les jeunes mères et des vêtements pour les bébés, qui se sont avérés très utiles. En effet, les gens arrivent sans rien, et les petits doivent absolument être protégés du froid.»



«La saison des pluies qui approche m’inquiète au plus haut point. Elle pourrait avoir des conséquences désastreuses. La mousson va certainement précariser encore les conditions de vie dans le camp. Le paludisme risque de faire des ravages, et je crains que nous ne soyons pas suffisamment préparés à une éventuelle épidémie de choléra. Le cas échéant, il faudrait pouvoir isoler les patients, faute de quoi la situation pourrait vite devenir ingérable et dangereuse.»