"Aujourd'hui plus que jamais, nous avons besoin d'une voix forte et unie de la diaspora pour réussir le développement de l'Afrique"

Interview avec Dr. Awil Mohamoud, Fondateur et Directeur du Centre des Politiques de la Diaspora Africaine (ADPC, Pays-Bas)

Pourriez-vous nous en dire plus sur vous? 

Je suis originaire de Somalie, ma famille voyageait beaucoup et j'ai obtenu mon premier diplôme à Delhi, en Inde. Plus tard, j'ai reçu une bourse du gouvernement néerlandais et je suis parti en Hollande pour étudier dans l'une de ses universités. À cette époque, la migration avait un autre visage : il n'y avait pas de gros mouvements de personnes fuyant la guerre, la crise et l'instabilité. Les personnes qui s'installaient à l'étranger étaient principalement de jeunes étudiants à la recherche de bourses et d'études. Depuis, j'ai terminé mon doctorat aux Pays-Bas, obtenu la nationalité néerlandaise et ai décidé de rester.

Quelles sont les dynamiques de la diaspora africaine aux Pays-Bas ?

Premièrement, il y a un nombre relativement faible de personnes de la diaspora africaine aux Pays-Bas. Nous comptons actuellement environ 200 000 migrants originaires de la région subsaharienne et tous ne sont pas engagés dans des actions de développement en Afrique. De plus, la géographie, les difficultés d'accès au marché du travail et les barrières linguistiques font partie des facteurs qui freinent le nombre d'Africains dans le pays. En outre, l'atmosphère générale aux Pays-Bas a considérablement changé en raison de l’arrivée de la droite au pouvoir. La nouvelle reconfiguration politique a eu une incidence négative sur les politiques de développement et de coopération en matière d’aide, ainsi que sur le travail des associations de migrants et des ONG sur le terrain, réduisant les possibilités de financement.

Nous nous efforçons de produire de la connaissance et de la recherche axée sur les politiques afin de les partager avec les gouvernements des pays d'origine et de destination.

Pourquoi et comment l'ADPC a été créé ? 

L'African Diaspora Policy Centre a été fondé en 2006, à l'époque où le gouvernement néerlandais dirigeait une politique de migration et de développement ouverte et s'intéressait à la recherche et au partage des connaissances dans ce domaine. Nous nous efforçons de produire de la connaissance et de la recherche axée sur les politiques pour les partager avec les gouvernements des pays d'origine et de destination. Par exemple, nous menons le programme Diaspora Academy visant à renforcer les capacités et les compétences des membres de la diaspora de toute l'Europe en matière de plaidoyer. Jusqu'à présent, nous avons formé plus de 1000 organisations de migrants engagées dans des activités de développement en Afrique. En outre, nous menons des activités de recherche et de renforcement des capacités à destination des pays africains et les organisations régionales ayant besoin des compétences et de l’expertise spécifique de la diaspora. Nous couvrons des sujets tels que la gouvernance des migrations, la fuite des cerveaux, les envois de fonds, l'engagement de la diaspora, etc. Depuis 2006, nous aidons les gouvernements africains à élaborer des politiques en fournissant une expertise et des connaissances spécifiques.

La diaspora a beaucoup de potentiel, mais aussi beaucoup à faire pour faire du continent un environnement prospère.

Que pourrait faire la diaspora africaine pour stimuler le développement du continent ? 

La diaspora a beaucoup de potentiel, mais aussi beaucoup à faire pour faire du continent un environnement prospère. L'un des points les plus importants est de se réunir et de créer des plateformes de la diaspora au niveau de chaque pays de l'UE pour avoir une voix unie et un impact. Nous devons constamment rechercher de nouveaux partenariats avec les gouvernements locaux, mais également avec d'autres organisations de la diaspora et le secteur privé. Nous vivons dans un monde interconnecté et nous ne pourrons réussir qu'ensemble. Nous devrions faire plus de plaidoyer au niveau local pour pouvoir apporter des changements et bouger les lignes rouges. En ce qui concerne les gouvernements africains, la plupart d’entre eux ont reconnu l’importance de faire participer les diasporas à l’élaboration de politiques en matière de migration. Cependant, malgré la volonté et les bonnes intentions, il leurs manquent souvent des capacités, des compétences et des ressources. C’est pourquoi les compétences et les contributions de la diaspora sont vitales pour les gouvernements africains.

Comment impliquer davantage les jeunes de la diaspora dans le développement du continent ? 

Les jeunes générations sont exigeantes, passionnées et innovantes. Elles ont des compétences, des connaissances et la volonté d'être utiles et elles veulent être entendues. Cependant, il leurs manquent souvent des connaissances spécifiques dans le domaine de développement pour pouvoir s'impliquer, créer et gérer des ONG et des associations. Des programmes tels que Diaspora Academy sont en place pour les aider à obtenir les informations et les connaissances nécessaires pour devenir de véritables agents de changement.

Pour plus d'informations sur ADPC, visitez la page web : https://www.diaspora-centre.org/