L'inoubliable montée du Sco en Ligue 1

Partie 2 - Le film de la saison

SECRET DÉFENSE, SACRÉE DÉFENSE

Cette fois, c'est la bonne ! En 2012- 2013, le Sco avait séduit par son jeu, frappé quelques grands coups, mais cédé dans la dernière ligne droite face à l'armada monégasque, aux séduisants Guingampais et à l’expérience nantaise. La saison dernière, alors qu’il avait passé 28 journées sur le podium, il craquait au printemps, entre un épuisant parcours en Coupe de France (demi-finale) et des blessures en cascade. Cette montée s’inscrit finalement presque logiquement dans la lignée des précédents exercices. Pourtant, elle était devenue quasi inimaginable au début de l’hiver. Ce retour sur le devant de la scène trouva sa source sur… et en dehors du terrain. En dehors, c’est ce stage commando effectué début janvier, dans la Presqu’île de Quiberon. Longtemps, il est resté « secret défense » même si les fuites avaient permis d’en comprendre les grandes lignes. Mardi soir, il a enfin été explicité. Entre épreuves sportives et conditions de vie inhabituelles, les joueurs y apprirent à se surpasser et surtout à s’entraider au maximum. Sur le terrain, le Sco a trouvé un véritable hermétisme. Lui qui s’était trop souvent fait punir par ses adversaires, a gagné en solidité. Dix buts encaissés sur la phase retour (contre 19 à l’aller) : sacrée défense. Les renforts en fin de mercato hivernal du roc Pierre et du métronome Mangani, n’y sont pas étrangers. Certes la dernière ligne droite ne fut pas dénuée de stress, mais l’essentiel est au bout. Le Sco va retrouver la Ligue 1, vingt-et-un ans après l’avoir quittée. Et cette montée n’est pas sans rappeler celle de 1993. Toutes deux s’inscrivent dans un plan à moyen terme après des saisons d’instabilité. Sous l’ère Jacques Tondut, le plan avait été respecté à la lettre avec une accession au bout de cinq saisons. Avec Saïd Chabane, il a été rempli en trois. Gageons que le Sco saura mieux gérer ce retour dans l’élite que le précédent…

Emmanuel ESSEUL.

Au terme d'une soirée grandiose, le Sco est en Ligue 1

La Ligue 1 est pour eux ! Enfin ! Souvent placés ces dernières saisons, jamais récompensés, les Angevins ont réussi leur pari. Rien ne fut facile et c'en est encore plus beau certainement. Car cette équipe, larguée au moment de la trêve hivernale, est revenue de très loin. 

Un mois de février tonitruant et un but d’Ayari dans les dernières secondes au stade l’Abbé Deschamps d’Auxerre les ont remis sur cette troisième marche du podium. La même qu’ils ont conservée près de trois mois durant, parfois dans la douleur, souvent avec courage et abnégation. « On écrit notre histoire », déclarait le manager général Olivier Pickeu, la semaine passée, au lendemain du nul salvateur obtenu à Nancy. 

Leur histoire en Ligue 2 s’est donc achevée sur une victoire éclatante. Rien ne pouvait être plus beau pour les près de 17 000 personnes venus assister à ce moment d’histoire. Beaucoup reviendront sûrement en août prochain pour voir le Sco débuter sa 24e saison au plus haut niveau national. Le soir du 22 mai, un nul suffisait à leur bonheur. Compte tenu de la défaite de Nancy à Dijon (3-1), ils auraient même pu se permettre de perdre. Mais les hommes de Stéphane Moulin voulaient clôturer leur saison avec brio, et remercier au passage un public de Jean-Bouin incroyable de la première à la dernière minute. 

Le Sco maîtrise de bout en bout 

Crispés et bougés par de séduisants Sochaliens deux semaines plus tôt dans un stade déjà comble, les coéquipiers de Charles Diers ont cette fois-ci pris le taureau par les cornes. Il faut dire que le crocodile nîmois manquait cruellement de mordant, avec ses cinq titulaires absents pour ce dernier match de la saison. Qu’importe ! Clémence et Camara, plein d’allant, animaient d’entrée de jeu le front de l’attaque. Angoula et N’Gosso, eux, se donnaient sans retenue, comme à l’accoutumée. Deux acteurs impliqués dans l’ouverture du score. Le latéral droit obtenait la faute. N’Gosso reprenait quant à lui victorieusement le coup-franc botté par Ngando et dévié au passage du talon par Diers (1-0, 40’). Le stade exultait. 

Le doublé de Clémence Le début de seconde période fut à sens unique. Dès le retour des vestiaires, Axel Ngando réalisait un festival côté gauche puis centrait plein axe. Clémence reprenait victorieusement du pied gauche (2-0, 48’). Un Sacha Clémence, venu de National et de Carquefou l’été dernier, qui a réussi le pari sur une soirée de faire complètement oublier le meilleur buteur angevin, Jonathan Kodjia. Car dix minutes plus tard, le numéro 9 reprenait de la tête un centre au second poteau de Mangani (3-0, 59’). Pour saluer sa prestation, son entraîneur le sortait dans la foulée. Il pouvait profiter d’une ovation méritée. À 3-0, le match était plié. Les Nîmois eurent malgré tout le mérite de ne pas baisser totalement les bras. La chevauchée de Maoulida aurait d’ailleurs mérité meilleur sort (72’). Mais il était dit qu’Angers achèverait un 19e match cette saison sans encaisser de but. Pour que la fête soit totale. Les spectateurs, sourire aux lèvres, pouvaient entonner le fameux : « On est en Ligue 1 ! » Et envahir la pelouse de Jean-Bouin pour fêter les héros qui leur ont offert la Ligue 1 ! 


Ugo BRUSETTI. 


ANGERS - NÎMES : 3-0 (1-0). Arbitre : M. Lesage. 16 872 spectateurs. BUTS. Ngosso (40’), Clémence (48’, 59’). 

ANGERS : Butelle - Angoula, Pierre, Thomas, Manceau - Diers (cap) (Keïta, 81’), Ngosso, Mangani, Ngando (Gomez, 73’) - Camara, Clémence (Ayari, 61’). Non entrés en jeu : Letellier (g), Guillon. Entraîneur : Stéphane Moulin. 

NÎMES : Michel - Renaut, Sartre, Elie, Cordoval - Parpeix, Briançon, Robail - Nouri, Maoulida (cap), Bobichon. Non entrés en jeu : Gallon (g), Coco, Valls, Depres, Azouni. Entraîneur : Joël Pasqualetti.

Sur la route de la Ligue 1

Le chemin de l'accession n'a pas été un long fleuve tranquille pour le Sco. Retour sur les grandes dates de la saison. 
Première journée. Nîmes - Angers (3-2), le 1er août : 
Pour le premier match de la saison, les coéquipiers 
d'Olivier Auriac tombent de haut chez les Crocos 
avec trois buts encaissés en 30 minutes.
Le Midi Libre
12e journée : Angers - Clermont (3-0), le 24 octobre : 
Après Créteil, Clermont s'incline largement à Jean-Bouin. Impériaux à la maison, les Angevins ne confirment pas à l'extérieur.
Philippe Renault
14e journée. Angers - Dijon (1-0), le 7 novembre : 
Sofiane Boufal réalise un festival et permet à son équipe de l'emporter face au leader dijonnais.
Franck Dubray
16e journée. Angers - Troyes (0-3), le 29 novembre : 
La claque ! Au coude à coude au classement, ce choc tourne au cauchemar pour les Angevins de Kodjia, qui sera expulsé pour un geste d'humeur.
Georges Mesnager
17e journée. Orléans - Angers (2-3), le 12 décembre : 
Après deux cuisants échecs en championnat et en Coupe de France, les Angevins réalisent un match plein à Orléans avec un grand Charles Diers, auteur d'un doublé.
République du Centre

Un stage Commando, le tremplin du Sco

Comme ces rugbymen de Vannes à Lanester, les joueurs du Sco se sont livrés à ce type d'exercices au Fort de Penthièvre.

UN STAGE COMMANDO, LE TREMPLIN POUR LE SCO

Pendant longtemps, Angers Sco n'a pas voulu communiquer sur ce stage de janvier. Pourtant, tout le groupe était unanime : ce fut un socle important pour la seconde partie de saison.

Le 29 novembre, Angers concède sa plus lourde défaite de la saison. Une claque. Le futur champion de Ligue 2, Troyes, venait de s'imposer 3-0 sur la pelouse de Jean-Bouin.

À la fin du match, un homme vient voir Saïd Chabane et lui dit : « Ton équipe, elle a de très bons éléments, mais ce qui lui manque c'est qu’ils ne sont pas solidaires. » Cet homme, c’est le colonel Combi, chef de corps du 6e régiment du Génie d’Angers. Alors que le président angevin réfléchit à une solution pour remobiliser son équipe, l’idée émerge lors d’un repas.

L’armée possède un terrain militaire au Fort de Penthièvre, sur la presqu’île de Quiberon. Et propose d’y accueillir l’équipe de football professionnel pour sa reprise hivernale. Une proposition qui plaît beaucoup à l’homme fort du Sco, son entraîneur est plus réservé, habitué aux thalassothérapies.

Sensations fortes, réchauds et dortoirs

Finalement, le club se lance dans cette drôle d’aventure. « C’était un pari fou, reconnaît Saïd Chabane. À partir du moment où on y allait, on s’est dit que le groupe ferait tout ce qui lui était proposé, qu’il n’y aurait pas d’aménagement. »

En accord avec Benoît Pickeu, le préparateur physique du club, le 6e régiment du Génie concocte un programme fait de sensations fortes, de dépassement de soi, mais aussi et surtout d’entraide. « C’est une semaine dont on se souviendra tous, poursuit Stéphane Moulin. Il y avait déjà de bonnes relations humaines au sein du vestiaire, ça les a renforcées. »

Au programme : rappel, sauts, kayak, boxe, sortie nocturne… Le tout dans un univers proche de Fort Boyard, l’émission de télévision de France 2. Dans des conditions de vie à la dure. Rations de nourriture, réchauds, dortoirs, lits peu confortables…

« Finalement, même dans la difficulté, ce stage a donné lieu à de bons moments », confie le défenseur angevin Gaël Angoula. « Mais en fin de journée, on était bien K.O. », raconte Loïc Guillon, dans le film réalisé pour l’occasion.

Étape importante pour la montée

Ce n’était pas gagné d’avance. Mais le staff y croyait, à l’image d’Olivier Pickeu. « J’avais demandé à Alexandre Bourgeois, notre cameraman, de venir faire des images, en lui disant que ce serait le film de la montée. À l’époque, il me prenait pour un fou », poursuit le manager angevin. La suite lui a donné raison. Et les avis sont unanimes : le stage de début janvier y a été pour beaucoup. Pourquoi ? « Les joueurs ont adhéré, répond Olivier Pickeu. Les joueurs ont d’abord été surpris de ce qu’on leur proposait. Ils n’étaient pas au courant du lieu, ni des activités qu’on allait leur proposer. Puis, ils ont été curieux, en se disant que peut-être qu’il y avait la possibilité d’y trouver des vertus. Certes, notre bonne deuxième partie de saison ne s’explique pas uniquement par ce stage, mais ça y a contribué. »

Car l’effectif s’est retrouvé dans des situations dont il ne pouvait se sortir que par des aptitudes collectives. Ce qui s’est reproduit sur le terrain. Avec une équipe bien regroupée au cours de la seconde partie de saison, qui n’hésitait pas à faire le travail de compensation pour avorter les offensives adverses.

Conclusion du manager angevin : « On n’était pas loin d’être les seuls fous à y croire à la trêve, quand on avait huit points de retard. Encore fallait-il que le groupe soit capable de gérer ce qu’on allait leur proposer. J’ai vu des joueurs se surpasser, prêts à la nouvelle épreuve qui se présentait devant nous. Finalement, ce stage a dépassé nos espérances. »

19e journée. Angers - Nancy (3-1), le 9 janvier : 
Ce soir-là, Jonathan Kodjia réalise un festival et un triplé, son premier en pro. Le Sco se relance complètement dans la course à la montée.
Philippe Renault
26e journée. Auxerre - Angers (0-1), le 2 mars : 
Grâce à un but d'Ayari dans les derniers instants, le Sco grimpe sur le podium. Un podium sur lequel il restera jusqu'au bout…
Eddy Lemaistre
32e journée. Dijon - Angers (1-1), le 18 avril : 
Menés et malmenés, les Angevins retrouvent des couleurs en 2e période et Thomas Mangani égalise. Le Sco garde son avance.
Le Bien Public
35e journée. Angers - Orléans (2-1), le 1er mai : 
D'un coup-franc magistral, Thomas Mangani revêt à nouveau le costume du sauveur.
Franck Dubray
36e journée. Angers - Sochaux (0-0), le 11 mai : 
Alors que les coéquipiers de Romain Thomas ont l'occasion de prendre 5 points d'avance sur le 4e à deux journées du terme, ils sont accrochés par une équipe sochalienne séduisante.
Eddy Lemaistre
37e journée. Nancy - Angers (0-0), le 15 mai : 
À trois points du Sco, les Nancéiens avaient l'occasion de passer devant. Raté ! La faute à Ludovic Butelle et des Angevins très solides. Ils font un grand pas vers la L1, ce soir-là.
Philippe Renault
38e journée Angers - Nîmes(3-0), le 22 mai 2015 : 
Les Angevins n'avaient besoin que d'un nul pour monter en L1. Ils réalisent un festival avec Guy N’Gosso, premier buteur.
Jérôme Fouquet

Textes : Emmanuel Esseul, Ugo Brusetti,Ludovic Aurégan.
Photos : Jérôme Fouuquet, Philippe Renault, Eddy Lemaistre, Bien Public, République du Centre Ouest, Georges Mesnager.. 
Vidéos : LFP, France 3. 
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